V.4. Transparence dans les politiques publiques : la réponse au passage de l’ouragan Sandy Le 31 octobre, suite au passage de l’ouragan Sandy en Haïti, le gouvernement a proclamé l’état d’urgence pour une période d’un mois. L’état d’urgence peut être considéré comme une mesure exceptionnelle pour répondre à la situation générée par le passage de l’ouragan Sandy. Elle implique la prise d’un ensemble de mesures dérogatoires, notamment pour la mobilisation des ressources financières et d’utilisation de fonds publics40. Le gouvernement avait annoncé son intention de mobiliser cinq milliards de gourdes haïtiennes et d’élaborer un budget rectificatif. En désaffectant des crédits alloués pour les utiliser à d’autres fins, en l’espèce, pour répondre aux besoins identifiés après le passage de l’ouragan Sandy, le gouvernement peut être amené à effectuer des choix difficiles compromettant des programmes et projets à plus long termes nécessaire au relèvement et développement du pays. Ces choix doivent être assumés et présentés publiquement. Au moment de la rédaction de ce rapport, les informations relatives à l’utilisation de fonds dans le cadre de l’état d’urgence étaient insuffisamment communiquées au public. Une demande d’audition de cinq ministres concernant l’allocation des fonds déboursés dans le cadre de l’état d’urgence avait été faite par le Sénat. L’audition devait avoir lieu le 13 décembre mais a été repoussée sine die par le Premier Ministre qui a expliqué que le gouvernement n’était pas en mesure de fournir de telles informations pour le moment. L’absence de publication effective de l’acte proclamant l’état d’urgence pose un problème de transparence et a généré des inquiétudes parmi les représentants du peuple concernant le respect des dispositions législatives dans le cadre de l’état d’urgence. VI. RECOMMANDATIONS VI.1. A l’Etat haïtien :
Prendre des mesures légales, administratives et financières afin d’institutionnaliser un organe d’Etat permanent chargé d’élaborer les rapports nationaux aux organes internationaux des traités et de faire le suivi de la mise en œuvre des recommandations suivant l’Examen périodique universel.
Soumettre les rapports gouvernementaux dus aux organes de traités, notamment :
- Les rapports périodiques au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, dû depuis 2000 ;
- Les rapports périodiques au Comité des droits de l’enfant, dus depuis 2007;
- Le rapport initial au Comité des droits des personnes handicapées, dû depuis 2011.
Ratifier, comme annoncé par le Premier Ministre lors de la réunion de haut niveau sur l’état de droit à New York, en septembre 2012, les conventions suivantes :
- La Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
- La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ;
- La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille ;
- Le Statut de Rome établissant la Cour pénale internationale ;
- La Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.
Promulguer la loi adoptée par le Parlement ratifiant le Pacte international relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels, et déposer un instrument d’accession, afin que le Pacte entre en vigueur.
Finaliser au plus vite le travail de réforme du Code pénal et du Code d’instruction criminelle, dont le projet final est présentement au ministère de la Justice.
Se consacrer à publier les lois adoptées par le Parlement et promulguées par le Président dans le journal officiel, le Moniteur, afin que la population soit informée de ses droits et devoirs. Plus précisément, la loi ratifiant le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (adoptée par le Parlement le 31 janvier 2012), la loi sur la paternité et la filiation (votée par le Sénat le 12 avril 2012) et le décret sur l’état d’urgence (adoptée le 30 octobre 2012) devraient être publiées au Journal Officiel.
Assisté de la communauté internationale, poursuivre ses activités de consolidation de l’OPC, notamment quant à l’établissement de bureaux régionaux et à la facilitation de la coopération avec la société civile.
Attribuer un budget de fonctionnement à la Ministre déléguée chargée des droits de l'homme et de la lutte contre la pauvreté extrême.
Avec le soutien de la communauté internationale, l’UCLBP devrait adopter et mettre en œuvre une stratégie globale, notamment une politique de logement, afin de répondre aux besoins des personnes déplacées vivant dans des camps, éviter les évictions forcées et développer une vision pour un développement urbain dans le respect des droits de l’homme.
Le Parlement devrait adopter un cadre législatif en conformité avec le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier les femmes et des enfants, ratifié par Haïti en 2011.
Rendre compte au Parlement, dans un intérêt de transparence, de l’utilisation de fonds dans le cadre de l’état d’urgence.
Interdire formellement le recours par des élus et des fonctionnaires d’état à des forces de sécurité parallèles, notamment des civils armés.
VI.2 Aux organes chargés du suivi du bon fonctionnement des institutions judiciaires et policières
L’IGPNH doit ouvrir systématiquement des enquêtes lorsque l’usage de la force par des agents de la PNH provoque la mort ou des blessures graves. Elle doit aussi fournir des réponses aux cas soumis par la SDH en mai 2012.
Le CSPJ doit jouer pleinement son rôle d’organe de discipline et de contrôle du pouvoir judiciaire, notamment en s’assurant que les juges s’acquittent de leurs responsabilités en toute indépendance et de la manière la plus efficace possible.
L’Académie de police et l’Ecole de la magistrature, appuyés par la communauté internationale, devraient améliorer la formation des agents de la PNH et des magistrats concernant le traitement des cas de violences sexuelles, incluant notamment l’interdiction des règlements à l’amiable et la sensibilisation aux droits des femmes.
Le ministre de l’Intérieur, ainsi que le ministre de la Justice et le CSPJ devrait adopter une directive destinée, respectivement aux agents de la PNH et aux magistrats, précisant que l’absence d’un certificat médical dans les cas d’agression sexuelle ne doit pas empêcher la poursuite de ces crimes.
Le ministre de la Justice devrait élaborer une stratégie nationale compréhensive pour lutter contre la détention préventive prolongée, permettant le respect des principes internationaux sur la détention.
En l’absence de tribunaux pour enfants dans plusieurs juridictions, les doyens des tribunaux devraient désigner des juges pour enfants dans les meilleurs délais.
Les autorités de police et la Direction de l’administration pénitentiaire devraient assurer que les mineurs soient toujours détenus séparément des adultes.
Le ministre de l’Intérieur, ainsi que le ministre de la Justice et le CSPJ devrait envoyer des instructions claires et précises, respectivement aux agents de la PNH ainsi qu’aux magistrats, afin que les mesures nécessaires soient prises pour prévenir et réprimer les lynchages.
VI.3. Aux organisations de la société civile :
S’impliquer de manière significative dans le suivi de la mise en œuvre des traités relatifs aux droits de l’homme ratifiés par Haïti, notamment en élaborant des rapports alternatifs aux organes des traités et en organisant des activités de plaidoyer à l’occasion de l’examen des rapports nationaux devant les organes des traités.
Prendre une part plus active dans l’élaboration de politiques publiques, en appuyant la préparation et la présentation de cahiers de charges sur les besoins prioritaires par les communautés, et en organisant des activités de plaidoyer auprès des organes de l’Etat compétents.
|