télécharger 284.82 Kb.
|
Cours de Droit Pénal CM le mardi de 12h à 15h45 Introduction : fondement du droit de punir Le droit pénal pose les interdits fondamentaux qui sont la condition même de toute vie en société. Le droit pénal est défini comme l’ensemble des règles juridiques qui organisent la réaction de l’État vis-à-vis des infractions et des délinquants. Il se compose de plusieurs disciplines : * Droit Pénal Générale * Droit pénale spéciale
Le droit pénal Générale est l’étude de la structure de l’infraction, c’est l’étude de conditions générales pour qu’une personne puisse être considérée comme responsable d’une infraction. Et puis c’est l’étude de la peine générale. Il a donc une vocation de synthèse car il va élaborer une théorie d’ensemble de l’infraction du délinquant et de la peine. Ceci se retrouve dans le livre 1er du CP (Code Pénal) (111-1 à 133-17 pour les crimes et les délits et les articles R131-1 à R131-36 pour les contraventions) Le droit Pénal Spéciale va étudier individuellement les différentes infractions (ex : meurtres, viols,…). Et pour chaque infraction il énumère et précise les éléments constitutifs de l’infraction et indiquer la sanction. Ex : Le vol traité à l’art. 311-1 du CP : « Le vol est l’infraction frauduleuse de la chose d’autrui ». Le vol est composé de 2 éléments constitutifs : élément matériel et moral. En quoi le matériel du vol consiste ? Il consiste en un acte de soustraction dont la chose qui appartient à autrui et la personne à l’intention de se l’approprier. L’élément moral est l’intention de s’approprier l’objet. Art.311-3 du CP : le vol est puni de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Ce droit Pénal Spécial ne se contente pas de viser la fonction pénale en général mais pour chaque infraction il définit une peine. Celui-ci est analytique (=/= de synthétique) : c’est une étude détaillée de chaque infraction. Historiquement, ce droit a précédé le droit Pénal Général. Il est apparu avec les premières sociétés qui ont fait maintenir leur ordre sociale et spéciale. Il y avait des agissements interdits qui étaient punis par des peines plus ou moins vigoureuses. (Code d’ Hammorabi) L’abstraction étant inconnu à l’époque le droit Pénal Général ne pouvait pas exister. Le droit Pénal Générale est donc née du Droit Pénal spécial. Dans la pratique, on utilise plus le droit pénal spéciale. Le juge recherche constamment les faits dont il est saisi qui constitue une infraction. C’est ce qu’on appelle l’opération de la qualification des faits. Toutes les incriminations ne se situent pas dans le CP. Il va y avoir une grande masse d’informations autres que dans le CP, tel que dans le CT (Code du Travail), dans le CSS (Code de la sécurité sociale), le CR (Code Rural) … La production d’infractions nouvelles ne s’inscrit pas essentiellement dans le CP. La procédure pénale est la réglementation du procès pénal : ensemble de règles qui régissent la recherche, la poursuite et le jugement des auteurs des infractions. Ex : Un individu commet une infraction mais ce n’est pas pour autant qu’il passe devant le juge, ainsi il faut tout d’abord que la justice pénale soit saisie. La façon dont la justice va être saisie (organisation, compétences des juridictions, la réunion de preuves, …) résulte de la procédure pénale. Ces règles sont issues du CPP (Code de Procédure Pénale) issus lui-même de l’Ordonnance du 23/12/1958 qui a succédé au CIC (Code d’Instruction Criminelle). Le juge doit se demander s’il existe un texte répressif applicable aux faits qu’ils lui sont soumis. Il le fera au regard des dispositions du titre 1 du CP (Faits) . Le juge par la suite va rechercher si la personne qui lui est déférer, peut être déclaré pénalement responsable. Il le fera au regard des dispositions du titre 2 du CP (Responsabilité pénale). S’il déclare la culpabilité il va devoir prononcer une peine, ainsi pour la prononcer il doit respecter les dispositions du titre 3 du CP (Peines). TITRE 1 : LA LOI PENALE Depuis la Révolution Française nous vivons dans un État de Droit. Un État où les organes législatifs et judiciaires doivent justifier les règles poser par la Constitution et par la Loi. Le juge ne peut donc pas prononcer arbitrairement une peine à l’égard d’un individu dont l’activité n’a pas été jugée répréhensible par la Loi. Ex: Une personne commet un adultère, la femme porte plainte. Cependant il n’y aura pas de poursuite, car depuis la Loi du 11/07/1975, l’adultère n’est plus un délit. Cependant l’État de droit n’a pas toujours existé, dans l’Ancien Régime se caractérisait par l’arbitraire à la fois dans l’incrimination et dans la peine. Le droit de punir s’inscrivait dans la logique du pouvoir royale et le droit pénal n’était pas codifié. L’action du juge était uniquement canalisée par quelques textes (édit, ordonnance, ...) et par le respect des précédents judiciaires. Mais, en leur absence le juge avait le pouvoir arbitraire puisqu’il pouvait incriminer et prononcer une sanction. « toutes les peines sont arbitraires dans ce royaume !» À cela s’ajoutait l’arbitraire du Roi, celui-ci avait la possibilité d’intervenir dans les procédures judiciaires (lettres de grâce, de cachets, ...) L’inégalité était érigée dans le système de privilège de juridiction aux nobles et aux membres du clergé. Plus l’offenser était considérer plus le crime était grave. Cela variait également selon la condition du coupable. (Tiers État = pendu et Noble = décapité) C’est ce que l’on appelle le principe de Légalité (DDHC du 25/08/1789). Principe repris dans la Constitution de 1958. Ce principe est traditionnellement connu sous le nom du Principe de Légalité des Délits et des Peines. Ce principe concerne également la procédure pénale et non pas que le droit pénal au sens strict (Art. 111-1 et Art. 113-11 du CP). Pour pouvoir punir un délinquant, il faut un texte. Dans la DDHC, la loi est la seule source du droit pénal. Mais dans la Constitution de 1958 il coexiste plusieurs sources formelles du droit : la loi et le règlement. À l’heure actuelle on ne peut plus affirmer que la loi est la seule source du Droit Pénal puisque la Constitution de 1958 a contribué à réduire très fortement la portée symbolique de la loi en donnant aux règlements une importance considérable. La loi pénale française s’internationalise et les conventions internationales jouent un rôle non négligeable. Chapitre 1 : Composantes de la légalité pénale Section 1 : La pluralité des sources textuelles Ces sources sont au nombre de trois : la loi, les traités et le règlement. L’Art. 111-2 du CP fixe la répartition des compétences entre la loi et le règlement dans la détermination des infractions et peines. Le pouvoir exécutif peut déterminer les infractions : les contraventions. Cet Art.111-2 du CP ne fait que rappeler une règle constitutionnelle reprenant le principe de la séparation du domaine de la loi et du règlement consacré par les Art. 34 et 37 de la Constitution de 1958. Les traités sont fixés dans la Constitution de 1958. §1 : La loi La stricte séparation des pouvoirs a cessé d’être respecté au fil des années et au fil des constitutions.
Avant la Constitution de 1958, on peut repérer 3 périodes :
Les révolutionnaires ont réclamé des principes généraux du droit pénal, et il a fallu les appliquer. C’est ce que va faire l’Assemblée Constituante par 3 lois :
À l’époque la tentative n’était pas punissable sauf en matière d’empoissonnement et d’assassinat. La complicité tait punissable mais beaucoup moins qu’aujourd’hui. Les peines corporelles ont été abolies exceptées la peine de mort. Les peines étaient fixes à l’époque, c’est-à-dire que le législateur fixait la peine pour chaque fait de manière invariable. Cela signifie que tous les individus qui commettaient la même infraction avaient la même peine conformément à la loi. Le juge vérifiait la culpabilité du prévenu et appliquait la peine prévue. Ce système ôtait au juge toute la possibilité de nuancer la peine. Le législateur avait institué une division tripartite des infractions : 3 ordres d’infractions et à chacun de ces ordres correspondaient un tribunal: Tribunaux de police municipales, correctionnelles et criminelles. Cette division a marqué tout notre Droit Pénal. A l’époque, on avait un rôle unique de la loi. Ces principes que l’on peut qualifier d’intransigeant ont été rapidement amendés dans un certain nombre de domaines. Ces réformes annoncent la codification napoléonienne.
2 grands codes : CIC de 1808 et le CP de 1810. Les principes fondamentaux sont maintenus : on retrouve le principe de légalité (Art. 4 du CP de 1810). On reprend la classification tripartite des infractions (crime, délit et contravention à l’Art. 1 du CP de 1810). C’est la peine qui définit la catégorie de l’infraction cela signifie que la gravité sociale de l’acte commande la peine. Dans le CP de 1810, on remarque un changement au niveau de la tentative et de la complicité. Ces modifications vont changer les rapports du juge et de la loi, le législateur a introduit dans les peines un minimum et un maximum. Donc il a abandonné l’idée des peines fixes puisque le juge peut choisir un maximum et un minimum. La législation pénale napoléonienne marque un recul de la loi comme source absolue du droit pénal. Ce recul ne va faire que s’accroitre de 1832 à 1958.
Ce recul va se manifester par des habilitations, c’est-à-dire que le législateur va déléguer une partie de ces attributions à un autre pouvoir, soit un pouvoir exécutif et au pouvoir judiciaire. - Habilitation au pouvoir exécutif : Il va en y avoir de 2 ordres : des habilitations temporaires et des habilitations permanentes. * Habilitations permanentes : Loi du 28 avril 1832. Cette loi va ajouter à l’Art. 471du CP un 15è alinéas : « Sont puni d’une amende de police de première classe ce qui aura contrevenu aux décrets et arrêtés légalement faits par l’autorité administrative et ceux qui ne se seront pas conformés aux règlements et aux arrêtés publiés par l’autorité municipale ». Cela veut dire que dès 1832, tous règlements ou arrêtés municipales légalement faits, constitue une contravention de 1è classe. L’intention des rédacteurs de cette loi établie était de limiter les champs d’applications de l’Art. 471-4 aux arrêtés de police municipale qui concernaient la salubrité et la sécurité publique. Malheureusement, la jurisprudence va utiliser la sanction pénale à l’encontre de tous les actes administratifs, ainsi tous les règlements contenaient une incrimination pénale. Avec la loi de 1832, de façon permanente, le législateur a délégué au gouvernement une parcelle du pouvoir de punir. Le législateur a abandonné son monopole de la maitrise de l’incrimination. (Art. R26-15 du CP : Actuellement Art. R610-5 du CP.) On s’aperçoit qu’étant donné le développement de l’administration les moindres manquements à des règles minuscules constituent des contraventions. La cour de cassation aperçut le danger et elle refusa de faire entrer certains décrets et arrêtés alors qu’ils étaient pourtant légalement faits. Elle a déterminé un certain nombre de critères pour empêcher l’extension indéfinie de cet article. Elle a refusé la sanction de l’art. R26-15 du CP au règlement qui ne tente pas à la protection de l’ordre public.
Avant 1958, certes, on a assisté à un recul de la loi comme un fondement de droit public, mais la loi occupait encore une place éminente et elle l’emportait encore sur les autres sources du droit : elle incriminait des actes et édictait des peines. tandis que le règlement ne pouvait que définir les infractions et n’avait donc pas le pouvoir d’établir des peines. Cette hiérarchie loi/règlement a été bouleversée par la Constitution de 1958.
Cette Constitution a pour caractéristique d’avoir reparti le droit de punir entre le législateur et le pouvoir réglementaire. L’Art. 34 de la Constitution y définit le domaine réservé de la loi, au sein de l’alinéa 4 : la loi fixe les règles concernant la détermination des crimes et des délits ainsi que les peines qui leur sont applicables. Mais aussi les règles concernant la procédure pénale, l'amnistie, la création de nouveaux ordres de juridictions et le statut des magistrats. Le pouvoir exécutif va estimer que cet Art. 34 excluait du domaine de la loi les contraventions et que par voie de conséquence en vertu de l’Art. 37 de la Constitution, la définition des contraventions relevaient désormais du règlement. Dès le lendemain de l’entrée en vigueur de la Constitution, le gouvernement arguant de la compétence qu’il tenait de l’Art. 37 de la Constitution s’est octroyé une compétence exclusive dans le domaine des contraventions. Il va faire disparaitre de la partie législative du CP la définition de contravention. D’après cette interprétation gouvernementale de la Constitution les contraventions échappent au pouvoir législatif et seuls les décrets peuvent définir les contraventions et en fixer les peines. Cependant le pouvoir exécutif ne peut pas fixer n’importe quel peine, il doit respecter les limites légales fixées par les Art. 464 à 466 du CP c’est-à-dire que s’il fixe une peine d’emprisonnement pour une contravention, cette peine d’emprisonnement devait être comprise entre 1 jour et 2 mois et s’il fixe une peine d’amende elle doit être comprise entre 30 francs et 12 000 francs. Des critiques ont été formulées à l’encontre de cette interprétation. Cette lecture de la Constitution qui finalement donne des pouvoirs au Gouvernement en matière contraventionnelle est contraire à l’Art. 8 de la DDHC qui fait partie du préambule de la Constitution et qui énonce que nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi. Depuis 1958, le système pénal français repose sur une interprétation jurisprudentielle de la valeur respective du corps de la Constitution et du préambule. Certaines interprétations jurisprudentielles ont évoluées dans le temps et on peut distinguer 2 périodes.
Cette période est marquée par la suprématie du corps de la Constitution sur son Préambule : Partage entre la loi et le règlement pour déterminé les infractions. Cette interprétation a été posé par le Conseil D’Etat qui est l’arrêt de Société Eky du 12/02/1960. La Société Eky organisait des jeux radiophoniques entrainant l’attribution de prix et de cadeaux. Cette société à pensé être tombée sous le coup de disposition pénale nouvelle qui était des contraventions édictées par voie règlementaire, c’est la raison pour laquelle cette société a intenté un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’État. Parmi les moyens invoqués, la société prétendait que la création de contravention par l’exécutif était contraire à l’Art. 8 de la DDHC. Le conseil d’État va lui donner tort en affirmant qu’il résulte de l’ensemble de la Constitution et notamment des termes de l’Art. 34 que les auteurs de la Constitution ont exclus du domaine de la loi, la détermination des contraventions et des peines dont elles sont assorties et donc que les auteurs de la Constitution ont par conséquent entendu spécialement déroger sur ce point au principe générale énoncé par l’Art. 8 de la DDHC. La décision du Conseil d’État est extrêmement claire : les contraventions et peines afférentes proviennent du pouvoir réglementaire et il s’agit d’une dérogation à un principe qui demeure général et qui est édité par l’Art. 8 de la DDHC. Le Conseil Constitutionnel confirmé cette décision. La polémique à été réactivé en 1973 car le Conseil Constitutionnelle à été consulté sur un projet de décret et a affirmé qu’un décret ne pouvait prévoir de peine privative de liberté. Or, une contravention est susceptible d’une peine.
Cette période est marquée par une évolution des positions du Conseil Constitutionnel qui affirme la suprématie de la DDHC sur le corps de la Constitution. Le Conseil Constitutionnel a été saisi le 28/11/1973 par le Premier ministre de l’époque pour qu’il précise le caractère législatif ou règlementaire de certaines dispositions du CR qui était puni d’une amende de 500 à 2 000 francs. Le Conseil Constitutionnel a affirmé, dans un attendu accident, que «La détermination des contraventions et des peines qui leur sont applicables appartient au domaine règlementaire lorsque lesdites ‘’peines‘’ ne comportent pas de privation de liberté.» Cela revenait à dire que les règlements peuvent bien prévoir des peines d’amendes pour sanctionner leur propre disposition mais qui ne peuvent jamais prévoir qui est de sanctionner une contravention pas une peine d’emprisonnement. (Aucune question sur ce point avait été posé au Conseil Constitutionnel) Le droit applicable se trouvait en contradiction avec la position du Conseil Constitutionnelle car depuis 1958, le pouvoir règlementaire s’était vu reconnaitre par les Art. 464 et 465 du CP, la possibilité d’édicter des peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 2 mois. Le pouvoir règlementaire se voyait donc priver dans l’avenir d’une sanction efficace et il apparaissait qu’une multitude de textes réglementaires qui avaient été votés par la passé et qui prévoyait des peines d’emprisonnement au titre de sanction, se voyaient rétroactivement anticonstitutionnels. Mais tout contrevenant se voyait la possibilité devant un tribunal répressif d’invoquer l’exception d’illégalité des milliers de recours possibles.
c) Depuis 1994 : Les auteurs du Nouveau code pénal ont bien compris ce problème puisqu’en adoptant l’interprétation gouvernementale de la Constitution de 1958 soit que la loi concerne les crimes et les délits et que le règlement détermine les contraventions, ils ont renoncé à placer l’emprisonnement parmi les peines de police. En se réservant le monopole de la privation de liberté, le législateur revigore le principe de légalité puisque seule la loi qui est une émanation de la volonté des individus peut porter atteinte à la liberté des citoyens. |