Art du droit et théorie politique de la régulation








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I – La suffisance des institutions administratives

10. – Administration et institutions. Dans la crise, les agences de notation et ensuite les traders auront été les responsables expiatoires. Il aura fallu deux ans pour que l’on fonde les diverses fautes (« responsabilités ») dans l’attitude des banques (la nébuleuse des banques étant bienvenue), alors que leur comportement a été fort différent. Les responsabilités publiques ont été évincées, tout au plus sait-on que la régulation n’a pas bien marché, les « régulateurs » restant de célèbres inconnus, en somme une autre nébuleuse. Les réformes visant à réguler l’excès exigeait une critique des institutions publiques elles-mêmes défaillantes. Restructurées au plus vite et sans mea culpa, leur activité de surveillance a été révisée et les institutions qu’elles surveillent et autorisent revues – dont les banques et assurances. L’ordre public financier exige une autorisation administrative publique, d’institutions qu’il y a ensuite à surveiller. Le principe administratif (a) postule des questions d’institutions (b).
11. – a) Administration. Pouvoir administratif et pouvoir politique. Les autorités administratives, indépendantes ou étatiques, disposent du pouvoir de donner des « licences bancaires ou d’assurance » (autorisation administrative préalable à l’exercice). Elles surveillent et le cas échéant sanctionnent. Leur toute-puissance conduit un peu naturellement à une certaine suffisance, celui qui a l’autorité l’entame nécessairement à reconnaître ses fautes. Il convient pourtant d’oser constater le fait par un propos général, telles les questions institutionnelles. Par atavisme, les institutions secrètent des idées générales – phénomène probablement universel – qui se propagent par une administration puissante. Ces idées générales, technocratiques, caractérisent les administrateurs qui de polyvalents s’imaginent omniscients35. Ces administrateurs sont un modèle dans l’Union européenne où, de commissions en comités, on crée sans cesse des structures chargées de réguler (autoriser, surveiller, contrôler, inviter, convoquer, ordonner, sanctionner…), soit administrer de près. Or les idées générales ne valent peu face aux pratiques du droit des affaires. Ici comme ailleurs, les administrations classiques (le pouvoir exécutif) et Autorités administratives indépendantes, dotées d’administrateurs spécialisés, ont défailli. Le pouvoir politique subit l’influence des administrateurs qui portent à son paroxysme une culture administrative institutionnelle dont la propension est toujours de créer ou rénover les… institutions. La finesse des opérations juridiques les intéressent moins que la création d’institutions. Ici, de nouvelles institutions européennes, là l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP), d’institutions de sauvetage des banques sous garantie publique, du Conseil de la régulation. Aucune opération bancaire n’a en revanche pu être réglementée en trois ans. Présidents, gouverneurs, directeurs… n’échappent plus à la critique face à des synthèses grand-publics de « Prix Nobel d’économie »36.
12. – Des administrateurs. En France, les administrateurs noteraient que le système bancaire a résisté à la crise américaine, puis internationale, et que les institutions administratives ont réagi. La réplique montrerait la difficile reconnaissance des erreurs commises. Les graves difficultés du « Groupe Caisse d’Epargne »37 et de Dexia interrogent sur l’issue de la crise en France si deux ou trois autres banques avaient été en aussi graves difficultés. La France aurait risqué la cessation de paiements. Le discours administratif38 doit intéresser le juriste puisqu’en dépend, de façon pratique, l’application de la norme par une institution (ministère, AMF, ACP, BCE…). Le juriste doit aussi noter le rapport distant des pouvoirs publics avec les techniques juridiques de droit privé à la base des activités économiques et financières39. Or, imposer des réformes à l’ingénierie juridique du monde des affaires sans un discours de droit des affaires maîtrisant les libertés susdites (supra n° 4) est voué à l’échec. Tel n’est pas le cas de la méthode adoptant des concepts juridiques étrangers sans existence ou portée dans la plupart des pays européens40. L’incapacité juridique se double d’une paresse intellectuelle et d’une suffisance à s’afficher « international » qui, toutes, révèle une domination irraisonnée des pratiques anglo-américaines. Administrateurs et institutions, culturellement dominés, ne trouvent plus les bonnes feuilles du Code civil, et d’aucuns souriront en pensant aux arcanes des lignes des bilans de banque… sans doute parce qu’ils ignorent que la comptabilité c’est encore du droit, et dans sa lettre et dans son esprit, (sinon dans ses chiffres, encore que le Droit n’exclut pas le chiffre). Ainsi, le président J. L. BANCEL, pour les coopératives bancaires, parle de droit des affaires en des points précis : statut des actions rachetables, des réserves impartageables et de la solidarité entre banques coopératives. À l’inverse du besoin d’analyses juridiques techniques, des pseudo-juridiques idées, sans réelle substance, sont colportées. La distinction entre réglementation micro-prudentielle et macro-prudentielle41, le too big to fail, la « responsabilisation des agences »… tout cela, loin du droit, n’est que simples observations à connotations juridiques. En l’absence de véritables analyses, se créé du pseudo-juridique – tel le journaliste observant un « vide juridique » incapable de qualifier la situation pour dire la règle à appliquer… Les réformes se portent alors sur les institutions et le pseudo-droit, le brouhaha juridique ce que des parlementaires disent42
13. – b) Réforme permanente des institutions. « Fusion » des institutions dans l’ACP. La relative carence des institutions s’exprime dans la première grande réforme, celle opérée par l’ordonnance du 21 janvier 2010, ailleurs commentée43. Toutes les institutions administratives de surveillance de la finance (banque, assurance et même en partie marché financier) sont refaites. L’Autorité de contrôle prudentiel les réunit désormais toutes (C. mon. fin., art. L. 612-1 à L. 612-50) en empiétant sur le domaine de l’AMF pourtant récemment instituée par un long texte  – cela en dit-il le bilan ? Sur l’ACP, l’apport du jeu institutionnel est à nuancer. On passe d’une capacité de contrôle sectorielle (banques / assurances / entreprises d’investissement) à une capacité de toute le finance, un secteur global ; l’expérience de régulation manque pour assurer que cette méthode est la bonne. Le gouverneur de la Banque de France préside cette institution au risque de conflits institutionnels. Un pont est bâti la reliant à l’AMF, il prend l’allure d’une véritable plateforme de travail (un « pôle »).
14. – Institutions spéciales. Antérieure à la création de l’ACP, la loi du 16 octobre 2008 de finances rectificative pour le financement de l'économie – loi des « 300 milliards d’euros » – ne réforme pas véritablement la finance44. Loi extraordinaire de sauvetage du système financier, adoptée en et par l’urgence, elle est une sorte de loi de gestion donnant de la liquidité et des liquidités. La Société de prise de participations de l’Etat (SPPE) vise à financer pour 24 milliards d’euros les fonds propres des banques. La Société de financement de l’économie française (SFEF), dans un plafond de 265 milliards de titres à émettre, peut financer les banques (par un « droit à prêt » en fonction d’un double critère montant du bilan-part des crédits sur le marché). Une sorte de financement en ultime ressort (!). L’absence de ce système de sauvetage dans l’ordre juridique ordinaire et l’affirmation de la vocation temporaire de ces institutions interrogent.
15. – Des institutions de sauvetage ? Faut-il de telles institutions spéciales. Cela pose le problème du slogan too big too fail, soit la question du sauvetage des établissements à risque systémique45. Passons des institutions à ce slogan qui agite tant les esprits. S’agit-il d’une règle ou d’une loi ? Economique ? Sociale ? Politique ? Voilà une curieuse règle jetée à la face du monde, sans précision de sa nature. Réguler sans analyse juridique rend parfois les débats surréalistes. Pourtant, le Congrès américain vote l’impossibilité de ne pas faire faillite, autrement dit le droit de faire faillite pour les banques et assurances est posé (reposé) dans la loi américaine ! Adopter une telle règle est a priori inutile car la loi ne contraint pas l’État à secourir les banques ou assurances en faillite. Ne votons donc pas une loi contredisant une disposition qui n’existe pas ! Retenons la leçon : avec les certitudes américaines, nous n’avons qu’incertitudes européennes ! Voter une telle règle voudrait dire que tout mécanisme de reprise par l’État (ou au moyen d’argent public) est interdit. La loi ne suffirait pas. En effet, si nous votions une loi d’interdiction, le législateur, terrorisé par les financiers et leurs déficits au cours d’une gravissime crise, pourraient voter en urgence une loi prévoyant l’inverse.
16. – Terreur financière. Structures de defeasance. La loi votée en 1993, à l’unanimité des grands partis politiques, dans l’affaire du Crédit Lyonnais, montre un cas de création d’une structure de défaisance46. Près de vingt ans après les actifs transmis ne sont pas encore tous vendus et la coût pour le budget de l’Etat est effroyable. Voilà la terreur financière. Elle permet aux grandes banques de faire des faillites finalement payées par le contribuable. Il y a là un dilemme économique mais le juriste peut donner un point de vue. Ce sauvetage public est largement jugé comme immoral et comme créant ce que les économistes appellent l’aléa moral (plus on sauve plus les financiers prennent des risquent en se disant on sera sauvé… !). Faudrait-il alors constitutionnaliser une interdiction de sauvetage ? Une loi ne pourrait-alors plus déverser d’argent public dans les caisses des banques et assurances en faillite. On le pensera, tout en ajoutant qu’il faudra alors qu’en pleine crise quelques chevaliers blancs imposent encore à la classe politique, terrorisée, le respect de la Constitution ! Mais à quoi bon ? L’interdiction des aides publiques est déjà supra-constitutionnelle à raison du Traité sur l’Union Européenne. Or, au cours de cette crise, une pluie d’aides s’est déversée dans le système financier (la violation du Traité a fait l’unanimité, ou presque…). Le juriste sait que la loi incorpore les faiblesses des hommes et notamment des Parlements… Les grands financiers savent donc qu’ils peuvent essayer de gagner des centaines de millions au préjudice du contribuable (le fameux « aléa moral »). Le comportement des pouvoirs publics reconduit ce risque. Faut-il alors réfléchir à une solution de science politique, à des sanctions pour les dirigeants politiques qui violent leur constitution ou le Traité sur l’Union européenne ?
17. – La régulation bancaire dans une seule et nouvelle loi. La carence des institutions se retrouve dans le projet de loi carrément appelé de « régulation bancaire ». Le Conseil de la régulation bancaire et du risque systémique (CRBRS) convoquera, sous l’autorité du ministre de l’économie, les diverses autorités de régulation… pour une sorte de super-régulation ? Le fait de resserrer les choses montre bel et bien quel fut le mauvais jeu des institutions. Cette nouvelle autorité interroge. Que ressortira-t-il des discussions entre les banquiers et le CRBRS ? Dans quelles conditions ces auditions se feront-elles ? Voilà une institution dont les ressorts juridiques méritent précision. La volonté politique du ministre de reprendre la main (reflux de la régulation ?), que l’on comprend, ne suffit pas à donner une parfaite cohérence juridique à ce conseil. Quid en effet de l’indépendance des autorités administratives qui participent ès-qualité à ce conseil. Sera-t-il juste une autorité d’influence, cela peut s’entendre, ou prendra-t-il des décisions… à la place de l’ACP ? Le projet de loi assez bref donne une loi lourde, s’éloignant de l’impératif de brièveté qui seul façonne l’autorité.
18. – L’institut d’émission. Dans ce jeu institutionnel, la Banque de France représentant la Banque centrale européenne, laisse perplexe. Les institutions ad hoc votées en urgence ont joué au prêteur en dernier ressort (supra n° 14). Tout le monde doit y réfléchir. Les marchés ont en effet été débloqués aussi par les sociétés spéciales qui ont prêté aux banquiers et créé une liquidité garantie. L’État n’est pas seulement redevenu le régulateur mais l’animateur du marché ! Plus généralement, la parole de l’institut d’émission, semble trop rare dans un monde de communication47. Régulateurs originaux, les Banques centrales disposent d’un pouvoir d’influence à travers sa parole discours. D’aucuns, dans une analyse approfondie des communications, ont relevé l’incapacité de l’institution à dire ce qu’elle fait alors même qu’elle le fait bien48… Ses actions réglementaires sont invisibles et la piste de les utiliser à plein ou de les préciser. La BCE semble en effet seulement capable de rappeler (en vain, mais avec une constance) l’exigence de respect du pacte de stabilité et de croissance et en dernier lieu baisser ses taux de refinancement. À relire le Traité sur l’Union européenne et ses pouvoirs, ce bilan semble modeste. Les opérations de « politiques de refinancement non-conventionnelles » ne sont pas de nature à modifier notre sentiment49. Voilà une action qui pose des questions juridiques. On manque d’analyses juridiques : après la monnaie centrale à taux d’intérêt zéro, diverses perspectives interrogent dont celle de la monnaie à taux négatif (de la monnaie négative). Une émission – d’un prêt – supérieur au remboursement dû ne désarçonne pas le privatiste. Cependant, et à nouveau, le potentiel de la technique juridique peut inquiéter s’il n’est pas annoncé, éventuellement « encadré », par des textes qui annoncent et rationalisent l’action. Ce sont là les limites que le juriste s’autorise à côtoyer alors que de tradition les opérations monétaires ressortissent du contrat de droit privé. Telle est la monnaie centrale : du contrat50. L’absence de définition légale de la monnaie  – dans sa forme classique51 ou centrale – semble montrer une longue absence des juristes. Or comment maîtriser un ordre juridique financier dont on ne sait pas même définir la pièce première ?
19. – Surveillance, contrôle et irresponsabilité. La surveillance est la mission des autorités administratives. L’Autorité de contrôle prudentiel se retrouve désormais face à une responsabilité historique, celle de l’AMF n’en est pas moins grande. Souhaitons qu’elle ne se dissipe pas aux motifs d’autorités européennes et de réseaux ! Le souhait général selon lequel la surveillance doit être européenne, voire globale, implique que les autorités nationales ne sont plus les premières ou seules responsables52. Les institutions administratives nationales pourraient y trouver une nouvelle justification d’une régulation molle ou d’une absence de responsabilité. J. STIGLITZ note d’ailleurs que la surveillance globale est un leurre et qu’il faut surveiller (et punir) au plan national. Le cas européen est intermédiaire mais cet échelon pourrait déresponsabiliser le plan national.
Le problème est d’autant plus épais que personne n’a oublié que la Commission bancaire (et d’autres tel le CECEI) engageait la seule responsabilité de l’État… lequel sort quasiment indemne d’une crise qu’il a laissé prospérer. L’État et surtout la Commission européenne n’ont pas un bon bilan. Les clients doivent donc savoir que leurs actifs financiers ne sont pas toujours en sécurité dans les banques et assurances…
Les commissaires aux comptes, qui certifient des comptes dont ils ne peuvent manifestement que peu certifier, méritent la palme de l’irresponsabilité. On ne comprend guère leur excuse générale. L’absence de critique des CAC paraîtrait-elle déstabiliser les comptables, rouages précieux pour l’économie et l’impôt ? Ou bien la critique porterait-elle tellement profond qu’elle déstabiliserait totalement le système juridico-comptable actuel ? En tout cas, cela fait oublier que les CAC, s’ils sont considérés comme de véritables organes de la société auditée, en sont aussi un contrôle externe. Cela fait aussi oublier que leur mission est légale et solennelle, contrairement à celle des agences de notation. Pourtant aucun commissaire au compte n’a été interpellé. Est-ce que cette critique dévierait, en qu’elle serait donc vaine, parce qu’il faudrait chercher les responsabilités chez les auteurs des normes comptables ? On se souvient que les règles auront changé en pleine crise pour éviter de dire que les actifs des banques étaient fortement dévalorisés par la méthode de la valeur du marché – on pourrait ajouter la notion de valeur à nos préoccupations, infra n° 26.
20. – Banque de dépôts, banque d’investissements et de participations… et caisses de dépôts. La responsabilité institutionnelle des banquiers s’esquive en posant des questions qui ne se posent pas (par exemple « faut-il brûler les banquiers ? », comme le fait M. Georges PAUGET, ancien président de l’organe central du réseau du Crédit agricole). La méthode assure de la (bonne) réponse attendue : « non ». Institution essentielle des économies, la banque ne peut pas être brûlée, les banquiers demeurant dans un système de financement reposant sur les dépôts (voy. infra n° 24). La puissance bancaire vient des dépôts des clients sur lesquels, selon notre thèse, la banque a un droit d’usage réel consacré par la loi. Que la loi supprime cette originalité et le banquier devra, comme tout prestataire, rendre une prestation pour recevoir l’argent de ces clients. Réformer la finance suppose de rappeler le principe actuel de la banque, ce qui recadre les idées. En contrepartie de ce privilège d’usage de la monnaie déposée, qui sert la Nation et la banque53, ce dernier à une obligation de restitution absolue54… remettre hors toute contrepartie tout son argent au banquier exige un confort juridique ! Le juriste connaît bien la vigueur de cette obligation de restitution. Les divers ratios bancaires ne sont donc pas une invention technocratique mais un contrepoids de la technocratie financière sans quoi ce droit d’usage serait sans limite. De la grande réalité macro-bancaire (les ratios) à la technique juridique (les dépôts) il n’y a qu’un pas à faire. Les banques ne sont pas des entreprises commerciales comme les autres, ce qui légitime des projets de réformes.
Dans ce droit fil, on pensera qu’il doit exister des banques de purs dépôts, ce qui fut probablement le statut des caisses rurales ou coopératives et qui fit leur succès. Le client doit avoir le choix de déposer ses fonds dans une banque qui en dispose ou dans une banque qui les préserve. Une appellation distinctive s’imposerait : caisse de dépôts. Mais le sujet est généralement évoqué sous une autre dimension.
La question du statut bancaire est généralement présentée en forme d’alternative rigide : ou bien les banques sont universelles, ou bien elles doivent choisir entre le statut de banque universelle ou banque de dépôts. La pratique est beaucoup plus nuancée à raisons des divers statuts d’établissements, voire des programmes d’activités désormais agréés par l’ACP. Les banques universelles ne le sont pas réellement toutes et, du reste, nombre d’établissements de crédit n’ont pas le statut de banque. Imaginer une séparation stricte n’aurait pas d’intérêt à l’égard du public si des caisses de dépôts étaient inventées.
Ce qui est essentiel est de signaler les établissements dangereux, les banques d’investissement qui font des affaires avec toute types d’opérations (participations via un marché réglementé ou pas, participations spéculatives, contrats financiers, devises…). Celles-ci ne doivent pouvoir qui prennent des dépôts du public qu’à titre marginal et après avertissement du client. Leurs activités de marchés sont dangereuses, presque autant que leurs participations, sujet éclipsé, alors que les pertes dues à des cessions de groupe sont parfois considérables ; cela montre sous un autre aspect les limites des débats55.
Entre ces deux pôles, caisse de dépôts et banque d’investissement, on peut laisser vivre des banques universelles, le cas échéant en en faisant deux ou trois catégories, certaines plus proches des banques d’investissement, d’autres plus proches des caisses de purs dépôts. Cela règlerait le problème de la banque universelle qui en vérité, aujourd’hui, peut opérer avec une telle liberté, par ses participations ou instruments financiers, qu’elle représente probablement un risque structurel que les décisions sur les fonds propres ne purgeront pas56. Quel que soient les fonds propres, si on parie de façon gigantesque ou si l’on se ruine dans des participations industrielles, une banque pourra toujours « tout risquer » et « tout perdre », faire faillite, relativisant la question des fonds propres57.
Voilà une voie pour une rénovation en profondeur du paysage bancaire.
21. – Dirigeants de banque. Des questions de responsabilités plus ou moins juridiques : quelle doit être la responsabilité des dirigeants de banques? Deux événements montrent le sujet sur des affaires de salle de marché qui ont amené la démission du président de l’organe central du réseau des Caisses d’épargne et du président de la Société générale. Les traders menacent davantage les dirigeants de banque que les autorités administratives qui les autorisent à exercer, y compris après des pertes records. Il n’y a pas ici de régulation ou de règles à adopter. Il y a seulement à exiger des autorités qu’elles exigent des compétences et un plus grande probité des dirigeants de banque. Elles peuvent aussi s’assurer que le cumul des mandats ne rend pas vaine l’agrément de deux dirigeants (certains dirigent la holding et quelques filiales : il y a-t-il encore de dirigeants dans l’établissement filiales ?). A défaut d’une régulation stricte, on verra un jour des déposants attaquer l’Etat pour faute lourde. La garantie du client par les fonds de garantie est en effet à un niveau assez bas. Plus philosophiquement, on se demandera encore ce qu’ont été pour les banques les aspirations de bonne gouvernance et de responsabilité sociale de l’entreprise, tant évoquées en colloques et rapports. Finalement, sans se faire trop d’illusions sur la menace pénale (quand des centaines de millions de profit sont escomptés), on rappellera que, dans nombre de pays, une faillite d’entreprise systémique conduit à la prison à vie58… Il y a là un problème de cohérence de politique législative puisque le ton est à la dépénalisation du droit des affaires. Méritée pour les petites entreprises, elle ne l’est guère pour les titans que personne ne semble diriger ou contrôler. Les autorités de régulation pourraient demander la criminalisation de certains comportements ; un notaire risque pour un oui pour un nom la cour d’assises, on voit mal pourquoi ce ne serait pas le cas pour la préservation de milliards d’euros et, davantage, la préservation du système de financement placé sous des « risques systémiques ».
22. – De la suffisance à l’insuffisance. Réguler le système financier impose de considérer la dimension institutionnelle. Nombre de faits et réformes illustrent en effet leur carence, fût-ce en s’en tenant à la France. Le citoyen peut donc maugréer contre un système financier qui, dans ses composantes privées et publiques, a laissé entrevoir le désastre. Cette carence institutionnelle est amplifiée par le manque de considération pour l’art juridique. Toutefois, tous concourent à une carence spéciale. En effet, dans les divers aspects juridiques, une question paraît à la fois se nourrir et se détacher des autres. Toute l’assurance administrative converge vers l’insuffisance de technique juridique.
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