Campagnes de diffamation Les campagnes diffamatoires se sont multipliées dans la presse de caniveau. Ils se sont pris nommément à d'éminentes figures du mouvement démocratique. Relayant les agressions policières, plusieurs journaux liés aux services de sécurité (dont Al Hadeth, Al Chourouk, Les annonces, l’Observateur…etc.) poursuivent en toute impunité leur campagne de diffamation visant nommément des opposants ou des défenseurs de droits humains en des termes orduriers et les qualifiant de “ traîtres à la patrie. ” Après avoir pris à partie Kamel Jendoubi, Khémaies Chamari, Khémaies et Fatma Ksila, Néjib Hosni, Khédija Cherif, Chawki Tabib, Radhia Nasraoui, Raouf Ayadi, Mohamed Charfi…etc, cette presse de caniveau concentre ses attaques, ces derniers temps, sur madame Souhayr Belhassen, la vice-présidente de la LTDH chargée des relations extérieures, qui a fait l’objet d’agressions physiques répétées de la part de la police politique au printemps dernier.
Hostilité à l’égard des défenseurs étrangers : Le 21 février 2001 de Robert Ménard, Secrétaire Général de Reporters sans Frontières, a été expulsé. Rappelons que cette ONG internationale a classé le gouvernement Tunisien parmi les dix premiers ennemis de la liberté de la presse dans le monde.
Cette expulsion fait suite à celles de Maître Patrick Baudouin, président de la FIDH, et Donatella Rovera, responsable du département Moyen-Orient d'Amnesty International, et maître Eric Plouvier, mandaté par la FIDH au dernier procès de la Ligue en décembre 2000.
Le 29 septembre 2001, deux responsables du département Moyen-Orient d'Amnesty International, Jerôme Bellion et Philippe Luther ont été agressés par des policiers en civil et emmenés au poste, leurs documents et dossiers ont été confisqués
V- Liberté de communication étouffée
Depuis mars 1999, date de publication de notre dernier rapport, le paysage médiatique tunisien est resté pratiquement inchangé. Avec près de 180 titres recensés officiellement, la liberté de la presse est quasiment nulle, même si des journaux ont été « autorisés » à laisser filtrer quelques informations sur la société civile;
Par ailleurs, le discours officiel commence à reconnaître la médiocrité de cette presse et des promesses de changements ont été faites. Promesses tenues, il faut l’avouer, mais quel changement ? Comme toujours, on ravale la façade et on renforce le contrôle des moyens de communication (tel, fax, messagerie postale ou Internet).
L'affaire Ben Brik a été l’événement marquant de l’année 2000 et a constitué un moment important dans le combat pour la liberté de la presse en Tunisie. Elle a permis de dévoiler la chape de plomb dans laquelle était enserrée la presse en Tunisie. La grève de la faim de 43 jours menée le 3 avril 2000 par le journaliste Taoufik Ben Brik qui voulait ainsi protester contre le harcèlement constant dont il était l'objet lui et sa famille, et médiatisée pendant plus d'un mois, a porté un coup sévère à l’image d’Épinal d’une Tunisie où tout va pour le mieux.
Le Président de la république a été obligé de reconnaître la médiocrité de la presse tunisienne et promis une révision du code de la presse dans son discours du 3 mai 2000, à l'occasion de la Journée internationale de la liberté de la presse où il a appelé les journalistes «à ne plus pratiquer l’autocensure » !
I -Un dispositif juridique répressif - Le 3 mai 2001 paraissait au journal officiel (loi organique 2001-43) un amendement au code de la presse annoncée depuis près d’un an comme devant révolutionner la situation de la presse.
Mais, à ceux qui en doutaient encore, cet amendement a confirmé la volonté du gouvernement de maintenir dans l'étau la liberté de la presse.
S'inscrivant dans cette tradition de duplicité qui consiste à dire le contraire de ce qu'on fait, les amendements apportés dans le texte de loi, ont été une occasion de faire un peu de ménage dans les codes en déplaçant les meubles.
En effet, la nouveauté de cet amendement consiste en un transfert des articles (35, 37, 38, 39, 45, 61 et 62) sanctionnant les délits commis par voie de presse, au Code pénal ! Ce qui se traduit par un allongement du délai de prescription qui était de trois mois, à trois ans.
L’article 56 punissant la diffamation par voie de correspondance à pli ouvert est transféré au code de la poste qui autorise l’administration postale à ouvrir les plis fermés, si elle juge qu’ils troublent l’ordre public (art 21 du code de la poste). Ainsi les plis fermés seront ouverts et seront ainsi sous le coup de l’article 56 qui se nomme désormais 29 bis!
L’unique aspect positif de cet amendement, c’est l’annulation du délit de diffamation de l’ordre public. Mais les délits d’offense au Président de la république, de diffamation des membres du gouvernement ou des cours, des tribunaux, des armées, des corps constitués et des administrations publiques sont maintenus.
Même la docile Association des journalistes Tunisiens (AJT) a crié l’arnaque, ce qui ne l’a pas empêché de soutenir, dans une motion en date du 26 octobre 2001, la candidature anticonstitutionnelle du Président Zine El Abidine Ben Ali à l'élection présidentielle de 2004 ! - Par ailleurs, un nouveau Code des communications est promulgué le 15 janvier 2001 et entrait en vigueur le 15 avril 2001.
Ce code organise les normes de cession des concessions de communication, jusqu’ici monopole d’état, aux privés, et place en passant toute activité d’émission, de réception ou d’exploitation de tout matériel de communication, sous contrôle des Ministres de la défense et de l’intérieur (art 52 et 56). Une « Agence nationale des fréquences » est crée, ainsi qu’un « Conseil national des communications ». Désormais l’exploitation d’une radio libre sans autorisation de l’Agence est passible d’une peine de six mois à cinq ans de prison ferme (art 82). Alors que jusqu’ici les radios n’étaient pas soumises à autorisation préalable. Est punie de la même peine toute personne qui se connecte à un réseau satellitaire privé (usage téléphonique par exemple) sans avoir reçu l’agrément de l’Agence (art 82).
Plusieurs demandes d’agrément de radios libres ont été déposées auparavant, aucune n’a reçu l’autorisation d’émettre, et ceci en flagrante violation de la loi qui était libérale avant la promulgation de ce code. Zied El Hani, directeur de la radio « Paix et liberté » (qui n’a jamais pu émettre) a porté plainte contre le Conseil supérieur de la communication devant le tribunal administratif en juillet 2000, pour abus de pouvoir.
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