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5.1.4 Les dispositions pour réduire l’accès aux sites à risque pour les jeunes. Touchant aux dispositions pour réduire l’accès aux sites à risque pour les jeunes, les jeunes internautes sont favorables à l’interdiction aux enfants de moins de 14 ans, non accompagnés et non assistés devant l’écran, de naviguer dans un cybercafé, ainsi qu’à l’interdiction d’accès, à partir des cybercafés ivoiriens, à tous les sites pornographiques et à leur verrouillage électronique sur les postes clients. Ils jugent opportun et recommandable le contrôle parental sur la navigation des enfants pour les mettre à l’abri de toute influence mauvaise et de tout danger (Tableau 4.14). En effet, le rôle des parents dans cette lutte est sinon capital, du moins nécessaire. Telle est également la pensée de BEKE (2009) et de SYRINGA (2008), dans la recension des écrits. J. PILO (2009) ne dit pas autre quand il affirme que nos enfants sont de plus en plus connectés et que nous entrons dans une ère ou l'opinion sensibilisée demande plus de vigilance et de précautions. Cela se traduit par la présence d'associations (comme Innocence en Danger, en France) qui éduquent, informent et sensibilisent à une meilleure utilisation d'Internet, mais aussi par la volonté des acteurs du web à intégrer au sein de leurs services des innovations techniques qui protègent les internautes. 5.2 DISCUSSION ET INTERPRETATION DES DONNEES DES ENTRETIENS 5.2.1 L’entretien avec le Directeur de la Direction de la Réglementation, des Affaires Juridiques et du Contentieux du Ministère des NTIC (DRAJC) Le Directeur de la DRAJC a situé les attributions de sa direction à trois (03) niveaux de compétences : La réglementation, pour l’élaboration de textes nationaux, prenant en compte l’environnement et les accords internationaux et communautaires, les affaires juridiques, où la DRAJC intervient sur la régularité et la conformité, vis-à-vis de la loi, des contrats et des protocoles passés entre tiers et le contentieux, dans lequel la DRAJC peut être saisie pour apporter son expertise et des informations sur les textes juridiques, de sorte que des parties en conflit puissent mieux pourvoir et instruire leurs dossiers. Il considère la cybercriminalité comme une criminalité non seulement nouvelle mais qui se spécialise par rapport aux autres formes de criminalité. Elle nuit fortement à la réputation de la Côte d’Ivoire et met un arrêt brutal à l’accès des Ivoiriens au e-commerce. Les facteurs qui, pour lui favorise ce type d’infractions, sont d’ordre social : le chômage notamment, aggravé en cela par la crise sociopolitique ivoirienne et la paupérisation des populations qui s’en suit. Notre étude nous montre que l’aspect social, même s’il doit être pris en compte, n’est pas la raison principale des pratiques cybercriminelles des jeunes internautes de Côte d’Ivoire qui, elle, est plutôt d’ordre psychologique et moral : l’attrait du gain facile. Au titre des dispositions prises pour lutter contre ce phénomène, le Directeur de la DRAJC a répondu que les textes de lois sur la protection des données (numériques) à caractère personnel, le e-commerce et la protection des mineurs sur Internet ont été déjà rédigés par ses services et en instance de signature ou d’adoption par l’Assemblée Nationale. Il a insisté sur le fait que le texte sur le Code de la Télécommunication est l’un des actes majeurs que l’Etat doit poser pour réglementer convenablement ce secteur et faciliter la lutte contre la cybercriminalité. Ce texte n’est pas encore pris et constitue une pesanteur majeure dans la lutte contre la cybercriminalité puisqu’il devrait réglementer notamment l’accès à Internet par les ISP, principaux fournisseurs des cyberespaces ivoiriens, véritables antres des « brouteurs ». Les trois domaines de compétences de la DRAJC sont capitaux dans la lutte contre la cybercriminalité et il importe que l’Etat ivoirien veille effectivement à la parfaite opérationnalité de cette direction pour ne pas donner le sentiment au monde d’un vide juridique qui fasse le lit aux cybercriminels, en Côte d’Ivoire. 5.2.2 L’entretien avec le Directeur Général de l’Agence des Télécommunications de Côte d’Ivoire (ATCI) Pour le DG de l’ATCI, ces dernières années, la cybercriminalité a fortement affecté l’image de la Côte d’Ivoire au point d’être classée pays à risque dans les transactions en ligne internationales et regardée comme la plaque tournante de l’escroquerie sur Internet. Ses effets sont pervers sur l’économie ivoirienne et sur la société ivoirienne et constitue même une menace sérieuse sur les bases du système éducatif ivoirien en raison de la très forte implication des jeunes, qui pour l’essentiel d’entre eux ignorent les effets et les implications de leurs pratiques qui sont, du reste, liées au problème de chômage et de pauvreté, en Côte d’Ivoire, ce que notre étude présente avec beaucoup de nuance, la cyber-escroquerie ivoirienne étant plus un problème psychologique et moral (attrait du gain facile) que social. Au titre des mesures diverses à prendre contre la cybercriminalité, l’ATCI mène des actions de sensibilisation, œuvre à la mise en place d’un cadre législatif et réglementaire approprié (Projet de loi sur la cybercriminalité, Elaboration des textes communautaires, Décision d’identification des abonnés mobiles, Mesures sur le fonctionnement des cybercafés), prend des mesures organisationnelles (Création d’un CERT : centre de veille, Plate-forme de la lutte contre la cybercriminalité : cadre de discussion pour la mise en œuvre de mesures de lutte, Groupe de travail Internet : pour réfléchir sur tous les sujets relatifs à Internet, en mettant en avant les questions de sécurité, Forum national sur la Gouvernance de l’Internet), forme différents acteurs et est très engagée dans la coopération internationale pour la mise en place de stratégie globale de lutte contre la cybercriminalité. L’engagement de l’ATCI dans cette lutte est de premier ordre et s’inscrit dans la vision générale de tous les auteurs lus dans le cadre de cette étude mais doit être appuyé par une véritable volonté politique, quand on sait que la plupart de ces mesures sont soit en souffrance soit à la traîne pour faute de moyens financiers ou simplement par négligence. 5.2.3 L’entretien dirigé avec les gérants de cyberespaces L’entretien dirigé organisé avec les gérants de cyberespaces de Marcory et de Treichville révèle que la majorité des cybers ont ouvert après l’année 2000, attestant de l’expérience assez récente de la majorité des internautes de Côte d’Ivoire (moins de 6 ans, Tableau 4.13). A part un seul qui est connecté à Bas débit, tous les cybers enquêtés ont une connexion à Haut débit AVISO, offrant de bonnes conditions de navigation et de nombreux postes client aux jeunes qui constituent l’essentiel de leur clientèle et ce fait peut, en partie, expliquer la forte fréquentation de ces établissements par les jeunes. Les cybers enquêtés ouvrent, pour le plus grand nombre, toute la semaine, de 8h à 23h (15 heures par jour), et même plus (de 7h30 à 0h), donnant ainsi aux jeunes internautes, leur principale clientèle qu’ils situent dans la tranche d’âge des 9-35 ans, la possibilité et l’occasion de s’adonner à leur loisir préféré (Tableau 4.3) et de s’approprier de la sorte cet outil moderne, comme l’indique le sénateur David ASSOULINE (2008) quand il affirme, dans la revue de littérature, que « les jeunes sont le fer de lance de ce grand bouleversement numérique et les principaux utilisateurs des nouvelles technologies ». D’après eux, ce que les jeunes recherchent sur Internet, c’est prioritairement l’argent. Comme dit Daniel BEKE (2009), dans la recension des écrits, « ils espèrent ainsi s’émanciper financièrement. Ils s’adonnent très tôt au « broutage » pour, disent-ils, s’en sortir et sauver leurs parents de la misère ». « Les brouteurs d’Abidjan », comme on les appelle, prétendent, dit-il, reprendre aux blancs ce qu’ils ont volé à leurs parents et aux noirs par la traite négrière et la colonisation. L’argent est donc en tête de leurs motivations. Ils nous indiquent également que les sites de prédilection de ces jeunes sont essentiellement les sites de rencontres et les sites de recherches. En général, ils ne manquent pas de ressources pour payer leur temps de navigation. Toutefois, quelques-uns contractent des dettes auprès des gérants et ne les règlent qu’après avoir arnaqué ou soutiré de l’argent à leurs correspondants. Accepter un tel procédé ou un tel mode de règlement des dettes de navigation est un blanc-seing et une caution répréhensible accordés par certains gérants à la cyber-escroquerie. Au demeurant, quand ils les surprennent dans des pratiques délictueuses, la grande majorité des gérants de cybercafés ne se contentent que de les interpeller ou de les conseiller, et d’encaisser leurs recettes. Autant de manières de faire qui dressent le lit à la cybercriminalité, en Côte d’Ivoire. Les amener à s’impliquer dans cette lutte, par des mesures réglementaires qui les y astreignent, serait salutaire, comme le conçoit également l’ATCI qui propose la prise de mesures sur le fonctionnement des cybers. Sur le point des facteurs psychosociaux susceptibles de favoriser la navigation délictueuse des jeunes ou celle les ciblant, les gérants de cybers sont formels : la situation économique et sociale des parents ou de la famille, même si elle ne doit pas être rejetée du revers de la main, ne peut être évoquée comme la raison qui pousse les jeunes à la cybercriminalité, bien que certains affirment le contraire. Pour la majorité des gérants de cyber, la première raison qui pousse les jeunes à s’adonner aux pratiques cybercriminelles, c’est l’attrait du gain facile, suivi de la pauvreté. Concernant les dispositions pour réduire le recours à la navigation délictueuse chez les jeunes et touchant précisément aux documents à eux exigés par l’Administration ivoirienne (Ministère des NTIC et ATCI) pour ouvrir leurs cybers, les réponses extrêmement disparates que nous avons reçues témoignent de l’inexistence de dispositions formelles et sécuritaires régissant l’ouverture des cyberespaces, en Côte d’Ivoire. Quant aux pièces administratives déposées au fournisseur d’accès Internet pour obtenir une connexion, la majorité dit n’avoir fourni qu’une carte nationale d’identité et un plan de situation du local ; ce qui est bien maigre comme dossier à produire pour être autorisés à connecter des milliers d’internautes au réseau mondial. Pour la majorité, ils n’ont reçu aucun cahier de charges à observer ou à exécuter, avec des exigences sécuritaires contre la cybercriminalité, au moment de leur abonnement ; ils pensent même qu’un tel document n’existe pas, même si une minorité affirme le contraire. La réalité est qu’à l’heure actuelle, aucune véritable mesure n’est prise concernant le fonctionnement des cybers. Pour l’essentiel, les gérants attestent que la police effectue des descentes dans leurs cybers mais elles ne sont pas régulières et bien souvent elles sont même faites, disent-ils, dans le but de racketter, de rançonner les « brouteurs ». Cette remarque vient corroborer les résultats de l’enquête du journaliste Y. DOUMBIA (2008), dans la revue de littérature, qui incriminent des agents de police laxistes comme complices et protecteurs des « brouteurs » ou complices des guichetiers et guichetières des agences de transfert d’argent pour dépouiller les « brouteurs ». En général, disent les gérants de cybers, ils prennent des mesures personnelles pour empêcher la pratique de la cybercriminalité dans leurs cybers : affichage de mises en garde, avertissements verbaux, affichage de règlements intérieurs et verrouillage électronique de sites non-recommandés. Ils sont disposés, pour la plupart, à verrouiller sur leurs postes client les sites d’extraction d’e-mails utilisés par les cybercriminels pour envoyer des milliers de SPAM d’arnaque aux internautes du monde. La moitié des gérants de cybers interrogés sont favorables à une collaboration avec la police pour arrêter les cybercriminels, quand l’autre moitié n’ose pas même le concevoir. Il en est de même concernant la mise en place d’une police des cyberespaces. En clair, la majorité des gérants de cybers sont disposés à apporter leur contribution à la lutte contre la cybercriminalité. Néanmoins, sur les critères que devraient remplir un agent des forces de l’ordre pour faire éventuellement partie d’une telle police, ils insistent sur la probité, après quoi ils retiennent « une connaissance approfondie en informatique ». Insistant sur leur option pour la probité, ils ont souligné le fait que c’est pour éviter que le racket ne devienne l’activité principale de cette nouvelle police. Cette appréhension n’est pas dépourvue de tout fondement : nous connaissons, en effet, le grave problème que constitue le racket des forces de l’ordre, en Côte d’Ivoire. Installer une telle police ne devrait donc pas se faire avec légèreté mais avec les critères et les conditions les plus drastiques, pour lui permettre d’atteindre effectivement ses objectifs. Dans leur majorité, les gérants de cybers adhèrent à la mise en place d’une réglementation régissant l’ouverture des cyberespaces, en Côte d’Ivoire. Quant aux lois et dispositions réglementaires allant dans le sens de fermer leurs cybers et leur faire assumer une partie de la responsabilité pénale des pratiques cybercriminels qui ont cours dans leurs établissements, ils les récusent fortement, arguant n’y être pour rien et affirmant que cela favorisera le chantage et le racket des forces de l’ordre à leur encontre. Seule une minorité soutient que cela les rendra plus vigilants et exigeants dans leurs cybers contre ces pratiques, ce qui est une vision absolument remarquable de leur part. Ils affirment que la lutte contre la cybercriminalité, même s’ils reconnaissent qu’elle relèvera le niveau de cybersécurité, fera chuter leurs recettes. Dans leur majorité, les gérants de cybers interrogés sont favorables à la tenue d’un grand forum réunissant fournisseurs d’accès Internet, propriétaires de cybercafés, abonnés Internet, associations de consommateurs et structures de l’Etat engagés dans la lutte, pour prendre des dispositions et des recommandations contre la cybercriminalité. Cette préconisation aura l’avantage d’apporter une solution plus globale à la question cybercriminelle, en Côte d’Ivoire. Quant aux dispositions pour réduire l’accès aux sites à risque pour les jeunes, en grande partie, les gérants de cybers que nous avons enquêtés sont favorables à une interdiction à tous les enfants de moins de 14 ans non accompagnés et non assistés devant l’écran de naviguer dans leurs établissements et favorables à l’interdiction et le verrouillage électronique sur leurs postes client de tous les sites pornographiques et assimilés. Seuls quelques-uns y trouvent des inconvénients, en termes de recette. Compte tenu de la très forte dimension morale de ces genres de sites, les dispositions en la matière devraient être implacables pour protéger les enfants et les jeunes.
L’analyse des résultats nous a donné une meilleure perception de la question cybercriminelle dans les communes de Marcory et de Treichville. D’une part, nous avons pu relever effectivement que la cybercriminalité y est essentiellement le fait des jeunes de 12 à 23 ans ; ils ont Internet pour loisir préféré ; ils sont majoritairement des élèves du secondaire et de sexe masculin. Nous avons également noté qu’ils appartiennent en général à des familles stables et de taille réduite. Ils sont issus de parents légalement ou traditionnellement mariés, travailleurs salariés ou exerçant une activité économique informelle et d’un niveau d’étude supérieur ou secondaire. Ils pratiquent principalement la cyber-escroquerie qu’ils appellent le « broutage » et qui n’est rien d’autre que de l’arnaque; très peu parmi eux sont des hackers, c’est-à-dire des pirates informatiques. D’autre part, cette étude nous a montré que ces jeunes s’exposent dangereusement aux nombreux périls charriés par Internet, du fait de leurs dispositions mentales, psychologiques et morales favorables aux propositions et avances à caractère sexuel ou sentimental, sur Internet. Par ailleurs, ces résultats nous ont fait apparaître l’insuffisance de volonté politique des autorités de l’Etat de Côte d’Ivoire, malgré quelques actions et projets initiés dans le sens de combattre ce fléau. Dans l’ensemble, ces résultats sont d’une grande importance pour notre étude car leur analyse nous a apporté une plus grande netteté dans la lecture du phénomène de la cybercriminalité dans les quartiers d’Anoumabo Sans-fil, Remblai, Arras et Belleville. Partant de là, nous allons faire, dans le chapitre suivant, des suggestions allant dans le sens de réduire l’ampleur du phénomène, en Côte d’Ivoire. |
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