Chap 1: Spécificité du texte littéraire








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L'œuvre de qualité dépasse son public


Une œuvre "commerciale" est étroitement adaptée au public visé. Cette attitude s'oppose à celle de l'écrivain authentique qui s'adresse à un lecteur pour une large part indéterminé. De ce pt de vue, l'œuvre de qualité est celle qui dépasse son projet et son public; ds une telle œuvre, le destinataire mais aussi le destinateur se révèlent ds l'écriture, qui constitue pour les deux interlocuteurs une véritable recherche.

Michel Tournier, dt les œuvres recourent ptt à des modes de narration plus traditionnels, présente une analyse très voisine. Le critère de la supériorité d'une œuvre "se trouve selon [lui] dans la quantité et la qualité de la co-créativité que le créateur attend et exige du "receveur". J'appelle mineur une art qui ne demande que réceptivité passive et docilité amorphe à ceux auxquels il s'adresse, mineure une œuvre où presque tout est donné, où presque rien n'est à construire" (Le Vent Paraclet, 1977).
"L'auteur d'un manuel scolaire écrit pour la classe de seconde, ou pour l'Ecole polytechnique, conformément à des programmes; lorsque ceux-ci auront changé, il adaptera ses ouvrages

C'est ce qui se passe pour toute littérature "commerciale".

[…] il faut bien se rendre à cette évidence que le destinataire ne peut être jamais entièrement connu par avance, que c'est le texte lui-même qui va le révéler. On pourrait dire: l'auteur d'un manuel scolaire pour la classe de seconde ne peut considérer celui-ci comme une œuvre au sens plein du terme que dans la mesure où il n'est pas seulement destiné aux élèves de seconde, où il a l'impression d'apporter "quelque chose" qui peut intéresser quelqu'un d'autre."

Chap 3: L'œuvre et le réel



La réduction de l'oe au réel correspond à une attitude de lecture spontanée , encouragée par les déclarations des classiques, pour qui l'imitation de la nature était un impératif, ou des romanciers réalistes, qui ont souvent défini leur oe comme le miroir du réel. A cette question, les écrivains fournissent 3 réponses différentes qui affirment la spécificité de la litté.

La première, fréquente au 19e, consiste à opérer une distinction radicale, la reproduction exacte de la nature étant présentée comme la négation même de l'art. Cpdt, elle ne nie pas qu'il existe une relation entre ces deux termes: l'art doit être "un miroir de concentration" qui permet de donner une image de la nature plus expressive, plus intense (Hugo). Plus radicalement encore, c'est la notion même de réalité que met en cause Maupassant dans la préface de Pierre et Jean (" Quel enfantillage de croire à la réalité puisque nous portons chacun la nôtre dans nos pensées et dans nos organes"). Ainsi le romancier ne peut que "reproduire fidèlement [son] illusion" du monde. Poussant cette logique à son terme, le narrateur de la Recherche affirme que "la seule réalité pour chacun [est] le domaine de sa propre sensibilité" que l'artiste doit s'efforcer d'exprimer (Proust).

Les critiques contemporains mettent plutôt l'accent sur la "condition verbale de la littérature" selon l'expression de Valéry. "La littérature, c'est l'irréel même; ou plus exactement, bien loin d'être une copie analogique du réel, la littérature est au contraire la conscience même de l'irréel du langage" (Barthes). Soucieuse de ne pas réduire l'œuvre à un document, un nv type de lecture sociologique montre que la litté aborde le réel sue le mode de la "dénégation" et de la "sublimation" et permet ainsi "l'émergence du réel le plus profond" (Bourdieu). Enfin est apparue la conscience que les oe renvoient moins au réel qu'à d'autres oe (Malraux), ce qu'un domaine de la critique moderne analyse en termes d''intertextualité (Jenny).
10.Victor Hugo, Préface de Cromwell, 1827
Ecrivain polygraphe, H a cherché à ouvrir la litté à ts les aspects de la vie. C'est au nom de cette exigence de liberté que, chef d'école, il a prôné ds la préface de Cromwell, qui a valeur de manifeste romantique, un renouvellement du genre théâtral; "Le caractère du drame est le réel; […] tout ce qui est dans la nature est dans l'art": l'homme étant conçu, dans une perspective chrétienne, cô un être fondamentalement double (à la fois âme et corps), le théâtre doit unir le sublime et le grotesque et répudier la vieille unité de ton. Autres conventions du théâtre classique, les unités de temps et de lieu sont aussi refusées. Défini comme "un point d'optique", le drame romanesque ne connaît d'autre modèle que la nature. Se pose alors la question de la spécificité de l'art.
L'art ne reproduit pas la nature

Désireux de montrer que le romantisme n'est pas simplement un mvt négateur, H réaffirme ici la nécessité de l'élaboration esthétique, de "l'unité d'ensemble": le romantisme n'est pas confondu avec ce que l'on n'appelle pas encore le réalisme. Le dramaturge établit, en une sorte de démonstration par l'absurde, que la nature n'entre pas directement sur la scène, qui ne connaît que l'imitation. L'œuvre elle-même n'existe pas en dehors de cette mise en forme artificielle qui recours à divers "instruments", dont la "grammaire et la prosodie", symbolisées ici par deux écrivains classiques, Vaugelas et Richelet. La métaphore du miroir ne réduit donc nullement le drame à un reflet fidèle et plat de la réalité puisque le drame est défini comme un "miroir de concentration".

A titre de prolongement, rappelons que ds son compte rendu du Salon de 1859, B critique "la doctrine, ennemie de l'art" qui se donne pour idéal la représentation de la nature et aboutit à "l'invasion de la photographie": "de jour en jour l'art diminue le respect de lui-même, se prosterne devant la réalité extérieure, et le peintre devient de plus en plus enclin à peindre, non ce qu'il rêve, mais ce qu'il voit". Il exalte au contraire la "reine des facultés": "l'imagination est la reine du vrai, et le possible est une des provinces du vrai. Elle est positivement apparentée avec l'infini".
"la vérité de l'art ne saurait être, ainsi que l'ont dit plusieurs, la réalité absolue. L'art ne peut donner la chose même. […] On doit reconnaître, sous peine de l'absurde, que le domaine de l'art et celui de la nature sont parfaitement distincts. La nature et l'art sont deux choses, sans quoi l'une ou l'autre n'existerait pas. L'art, outre sa partie idéale, a une partie terrestre et positive. Quoi qu'il fasse, il est encadré par la grammaire et la prosodie, entre Vaugelas et Richelet. Il a, pour ses créations les plus capricieuses, des formes, des moyens d'exécution, tout un matériel à remuer. […] le drame est un miroir où se réfléchit la nature. Mais si ce miroir est un miroir ordinaire, une surface plane et unie, il ne renverra des objets qu'une image terne et sans relief, fidèle, mais décolorée; on sait que la couleur et la lumière perdent à la réflexion simple. Il faut donc que le drame soit un miroir de concentration qui, loin de les affaiblir, ramasse et condense les rayons colorants, qui fasse d'une lueur une lumière, d'une lumière une flamme."
La réalité n'est js transcrite directement par l'art. Celui-ci atteint la vérité en usant d'artifice (versification, langue, composition) qui lui donnent un pouvoir de révélation dont serait dépourvue une reproduction intégrale.
11.Marcel Proust, Le Temps retrouvé, 1927
Pr P, le gd écrivain est d'abord à la recherche de son moi véritable. Des rapports nvx s'établissent entre l'art et la réalité.
L'art doit dégager l'essence de la réalité

P procède à une redéfinition de la "réalité". Pr lui, ns avons une perception subjective du réel: nos impressions du moment st mêlées aux choses, et les souvenirs qui ns en restent conservant l'essence de notre moi, qui seule intéresse l'artiste. La réalité brute, immédiate, que l'on pourrait décrire simplement, n'a aucune valeur. L'écrivain ne peut faire l'économie d'un travail d'interprétation et d'écriture: "un beau style", une métaphore st porteurs de cette vérité unique que lui seul pouvait exprimer.

Une telle conception de l'art et de la réalité indique une totale condamnation du réalisme. La litté dite réaliste manque la réalité puisqu'elle se contente de saisir l'apparence des choses.
"la littérature qui se contente de "décrire les choses", d'en donner seulement un misérable relevé de lignes et de surfaces, est celle qui, tout en s'appelant réaliste, est la plus éloignée de la réalité, celle qui nous appauvrit et nous attriste le plus, car elle coupe brusquement toute communication de notre moi présent avec le passé, dont les choses gardaient l'essence, et l'avenir, où elles nous incitent à la goûter de nouveau.

[…] Ce que nous appelons réalité est un certain rapport entre ces sensations et ces souvenirs qui nous entourent simultanément (…) rapport unique que l'écrivain doit retrouver pour en enchaîner jamais dans sa phrase les deux termes différents. On peut faire se succéder indéfiniment dans une description les objets qui figuraient dans le lieu décrit, la vérité ne commencera qu'au moment où l'écrivain prendra deux objets différents, posera leur rapport, analogue dans le monde de l'art à celui qu'est le rapport unique de la loi causale dans le monde de la science, et les enfermera dans les anneaux nécessaires d'un beau style; même, ainsi que la vie, quand, en rapprochant une qualité commune aux deux sensations, il dégagera leur essence commune en les réunissants l'une te l'autre pour les soustraire aux contingences du temps, dans une métaphore."
la réalité n'est pas une donnée brute de l'expérience mais le produit d'une élaboration esthétique qui révèle l'essence du moi.
12.Pierre Bourdieu, Les règles de l'art. Genèse et structure du champ littéraire, 1992
Le sociologue PB poursuit ici un double dessein. Il montre d'abord comment s'est constituée l'autonomie de la litté dans la société du 19e siècle. Dénonçant à la fois ceux qui affirment le caractère ineffable de l'expérience litté et ceux qui réduisent l'oe à un document sociologique, il entend aussi "proposer une analyse scientifique des conditions sociales de la production et de la réception de l'œuvre d'art". Ds cette perspective, l'artiste n'est plus conçu cô un génie transcendant mais cô un créateur qui affirme son originalité ds un champ de déterminations sociales et mentales. Le problème du "réalisme" et du "référent" du discours litté est dc posé en termes nvx.
PB analyse les rapports entre la litté et le réel en termes freudiens: l'oe litté voile et révèle à la fois "la structure du monde social dans laquelle elle a été produite".

D'une part, l'oe ne reproduit pas exactement le réel, elle le nie par sa "mise en forme", comparée à un "euphémisme généralisé". Ms cette "réalité littérairement déréalisée" produit chez le lecteur "un effet de croyance" et fonde la complicité de l'auteur et du lecteur.

D'autre part, la fiction constitue la sublimation d'une vérité refoulée. Cette "vérité qui, dite autrement, serait insupportable" doit être mise au jour par l'analyse sociologique de l'œuvre, seule capable de mener jusqu'à son terme le "retour du refoulé" contrôlé (donc limité) par l'écrivain.

Ainsi, si "mettre en forme, c'est aussi "mettre des formes", c'est-à-dire voiler, la fiction romanesque "permet de savoir tt en refusant de savoir ce qu'il en est vraiment" et assure "l'émergence du réel le plus profond". L'Education sentimentale est alors analysée comme "une entreprise d'objectivation de soi, d'autoanalyse, de socioanalyse".

le texte littéraire n'est pas un document sociologique directement lisible. Ds la fiction romanesque, la structure du monde social est àa la fois refoulée et sublimée, ce qui permet à la litté d'exprimer une vérité plus profonde. Ms cette vérité doit être mise au jour par une lecture sociologique seule capable de rendre compte de la forme même de l'œuvre.
13.André Malraux, L'homme précaire et la littérature, 1977 (posthume)
Il est commode de distinguer plusieurs volets ds l'oe de Malraux: romans (Les Conquérants, 1928; La Condition humaine, 1937); essais (Le Miroir des limbes), écrits d'art (Le Musée imaginaire). L'unité de cette oe (et d'une vie consacrée à l'engagement politique, antifasciste d'abord, gaulliste ensuite) peut être cherchée ds la permanence de l'interrogation métaphysique sur la mort, le sens de la vie, le destin, ms aussi ds le culte de l'art. "Je suis en art comme en religion" déclarait-il en 1945.

Ds sa réflexion sur la création artistique, M oppose constamment le monde des formes et la vie. L'artiste cherche moins à imiter le réel qu'à echapper au destin humain: "l'art est un anti-destin". Son oe posthume réaffirme la distinction fondamentale entre la litté et le réel. L'imaginaire de l'artiste est "un domaine de formes, c'est pourquoi la "création littéraire naît dans le monde des créations et non dans celui de la Création".
M dénonce ainsi l'illusion qui voit dans la litté une transcription de la réalité. L'oe s'inscrit ds une relation non avec le réel mais avec le "monde-d'un-art" qui échappe aux lois de l'espace et du temps humains: c'est le musée imaginaire pour la peinture, la Bibliothèque pour le roman. Il n'y a pas de création sans forme esthétique, aussi Balzac a-t-il construit son oe moins en faisant "concurrence à l'état civil" qu'en s'en appropriant et en renouvelant les formes romanesques de son temps. Une telle analyse conduit dc à faire de l'intertextualité (bien que M n'utilise pas le terme) une caractéristique essentielle de l'oe litté.
"Un poète ne se conquiert pas qur l'informe, mais sur les formes qu'il admire. Un romancier aussi. Avant de concevoir La Comédie humaine et de se battre avec l'état civil, Balzac s'est battu avec le roman de son temps. (…) La création n'est pas le prix d'une victoire du romancier sur la vie, mais sur le monde de l'écrit dont il est habité.(…) Toute narration est plus proche des narrations antérieures que du monde qui nous entoure; et les œuvres les plus divergentes, lorsqu'elles se rassemblent dans le musée ou la bibliothèque, ne s'y trouvent pas rassemblées par leur rapport à la réalité, ms par leurs rapports entre elles. (…) Nous appelons réalité le système des rapports que nous prêtons au monde –au plus vaste englobant possible. La création, ds les arts plastiques et ceux du langage, semble la transcription fidèle ou idéalisée de ces rapports, alors qu'elle se fonde sur d'autres. (…)Car la création, semblable aux liquides, qui ne prennent forme que par leur contenant, ns apparaît par les formes qu'elle a prises; elle ns apparaît encore dès que nous nous attachons à leur dissemblance, non à leur ressemblance: à ce qui sépare Madame Bovary de tout modèle"
14.Laurent Jenny , "la stratégie de la forme"
En réaction contre la critique traditionnelle des "sources" et sous l'influence de la linguistique structurale, la critique moderne (précédée par le Contre Sainte-Beuve) a été marquée par un mvt de retour au texte, considéré comme une structure relativement autonome. Cette critique formelle (ou textuelle) ne constitue pas pour autant la seule approche du txt litté. Celui-ci peut être envisagé comme le résultat d'un lg travail et la critique génétique a entrepris de rendre compte de la spécificité d'un txt en étudiant son mode d'engendrement à partir des traces laissées par l'auteur.

L'autonomie du txt a été aussi relativisée par les travaux du critique soviétique Bakhtine qui a mis en avant la notion de dialogisme: le discours romanesque se compose de diverses voix, de divers discours qui lui préexistent dans la société et ds la litté. La notion d'intertextualité, reprise ensuite par Julia Kristeva, se fonde sur le fait que la litté travaille sur des langages déjà constitués et qu'un texte s'insère "dans l'ensemble social considéré comme un ensemble textuel".
L'artcle de lJ, paru dans un numéro de la revue Poétique, définit d'abord l'intertextualité comme la "condition de la lisibilité littéraire" puisque l'oe travaille le langage, qui véhicule tt un système de représentations. L'intertextualité est dc présente ds le code même; Le texte reçoit là une nvle spécificité: il impose au lecteur un déchiffrage particulier, que la "pratique d'une multiplicité de textes" rend possible. L'intertextualité peut être plus ou moins explicite ds les oe qui pratiquent les diverses formes de l'imitation; elle appartient alors au contenu de l'oe. Qd elle n'est pas explicitement déclarée, son repérage dépend des compétences du lecteur.
 // Julia Kristeva, Sémiotiké, recherches pour une sémanalyse: "tout texte se construit comme mosaïque de citations, tout texte est absorption et transformation d'un autre texte. A la place de la notion d'intersubjectivité s'installe celle d'intextextualité, et le langage poétique se lit, au moins, comme double."

Partie II: L'expérience de l'écrivain
L'expérience de l'écriture et de la lecture semblent radicalement différentes: selon Valéry, l'écrivain ne peut jouir de "l'effet instantané" que produit son texte, cette sensation étant réservée aux lecteurs "qui ne connaissaient pas cet ouvrage, qui n'ont pas vécu avec lui, qui ne savent pas les lenteurs, les tâtonnements, les dégoûts…mais qui voient seulement un magnifique dessein réalisé d'un coup" (Tel quel). Flaubert souhaitait provoquer chez son lecteur une "espèce d'ébahissement". La création litté doit-elle dc rester un mystère pour le lecteur? Mérite-t-elle de retenir notre attention puisqu'aujourd'hui la critique s'intéresse à la poétique de l'œuvre plus qu'à son auteur?

Selon les témoignages de Rousseau, Aragon et Balzac, la création litté est régie par des mécanismes qui échappent partiellement à la conscience claire de l'écrivain. La notion d'auteur au sens d'individu entièrement conscient des buts et des moyens de sa création doit être remise en cause: l'écriture et ce qui s'y joue manifestent une série de déterminations intérieures et extérieures à l'écrivain. C'est bien pourquoi on ne peut établir de relation privilégiée entre l'homme et l'oe. Certes, comme l'a noté Sartre, contrairement à l'artisan qui peut objectiver son ouvrage, l'artiste "ne trouve jamais que [lui] dans son œuvre" parce qu'il a lui-même inventé les règles de sa production. Ms il y trouve sa personnalité d'artiste et non l'individu qui intéresse le biographe.
Chap 4: La création littéraire
Robbe-Grillet notait en 1957 dans Pour un nouveau roman que "les mythes du XIXe siècle conservent toute leur puissance": l'artiste est encore vu comme un "médiateur entre le commun des mortels et une puissance obscure, un au-delà de l'humanité, un esprit éternel, un dieu…". On peut penser qu'aujourd'hui, la médiatisation de la litté aidant, le romancier apparaît davantage au public comme un honnête artisan capable d'expliquer ce qu'il a voule dire ou faire. Délaissant le problème de l'inspiration poétique, ns choisissons de présenter divers témoignages de prosateurs. Les expériences évoquées st de 2 ordres.

Certains écrivains déclarent avoir conçu leur oe ss l'effet de l'illumination (Rousseau) ou d'un besoin impérieux de noter des phrases qu'aucune réflexion n'appelait (Aragon). Ds le premier cas, une forme d'inspiration révèle un système de pensée qu'il faudra ensuite mettre en forme; ds le 2ème, une phrase mystérieuse et gratuite s'impose à la conscience de l'écrivain comme un incipit et déclenche le processus de création. Balzac, dt le nom est associé à l'idée d'un labeur forcé, affirme lui que le mécanisme créateur lui est resté mystérieux.

Pour M, qui tranche le débat, la création est "gouvernée et instinctive".
15. Rousseau, Lettre à M. de Malesherbes, le 12 janvier 1762
Malgré l'importance de son oe, R ne s'est js considéré comme un écrivain de métier. Tte son oe est inspirée par une gde sensibilité, le sentiment de sa valeur et de sa singularité et une haute exigence morale. R n'a pas "écrit pour écrire" mais pour satisfaire 3 exigences vitales: intervenir ds les gds débats de son temps, goûter par la fiction ou les mémoires un bonheur que lui mesurait chichement une vie difficile et, ds les dernières années, se justifier.
Avant-texte des Confessions, les 4 lettres à M. de Malesherbes racontent comment Rousseau est devenu écrivain. En 1749, allant rendre visite à son ami D emprisonné à Vincennes, il eut la soudaine intuition de son système en découvrant le sujet mis au concours par l'Académie de Dijon "si le rétablissement des Sciences et des Arts a contribué à épurer les mœurs". Celle intuition aboutit au Discours sur les sciences et les arts et aux autres œuvres de R.

Témoignage authentique? Les manifestations physiques et morales de l'enthousiasme de R sont impressionnantes. Ms on n'oubliera pas que ce texte, composé plus de 12 ans après l'événement pdt une crise profonde marquée par la rupture avec les philosophes, est inspiré par un désir d'autojustification.
16.Aragon, la force entraînante de l'incipit
Œuvre et vie marquées par des engagement différents: aux txts provocants et éclatants d'invention du jeune surréaliste succède la production plus "rangée" du communiste et du chantre d'Elsa: réalisme socialiste des romans du Monde réel, retour à la poésie versifiée avec les recueils de la Résistance et les poèmes d'amour, jusqu'à ce que la crise politique de 1956 (déstalinisation) amène un renouveau des formes et de l'inspiration.

Cpdt, unité de cette œuvre discontinue se révèle ds la permanence chez l'homme et l'écrivain d'un questionnement sur soi et de la référence au surréalisme.
16a. Postface des Cloches de Bâle, 1964

le mécanisme de la création romanesque y est évoqué de manière concrète. 30 ans après sa publication, A rapporte comment il a écrit ce roman à partir d'une phrase venue spontanément ss sa plume et tt de suite comme la phrase initiale d'un texte. A l'origine du processus créateur, il y a dc une expérience voisine de celle décrite ds le Manifeste du surréalisme où Breton raconte sa découverte de l'écriture automatique, qui a constitué la pierre de touche du premier surréalisme.

"j'écrivis, tout à fait comme si j'étais encore eu temps de l'écriture automatique, une phrase, une première courte phrase, comme une provocation. Le type de phrase qu'il m'eût naguère encore paru inadmissible d'écrire (nb: allusion à la double condamnation du réalisme et du roman par les surréalistes). Tout ce qu'il y avait d'inconscient ici, c'était le caractère d'incipit de cette phrase: je l'imaginais dans une table des matières…Cela ne fit rire personne quand Guy appela M. Romanet papa (…) au-delà de ces mots s'enchaînait, s'articulait un livre épais, une histoire cohérente, un roman".
16b. Je n'ai jamais appris à écrire ou les Incipit, 1969

L'incipit y voit sa fonction créatrice systématisée. "conjonction de mots" donnée par "accident" et engendrant l'ensemble du roman, il constitue le germe d'une création qui s'opère en dehors de la conscience du romancier: l'auteur est un autre. Ce processus créateur répond à une nécessité intérieure et constitue une aventure personnelle. L'entreprise romanesque perd ainsi cette apparence de jeu gratuit et pauvrement inventé qui lui valait le mépris de Breton.

"Mes romans, à partir de la première phrase, du geste d'échangeur qu'elle a comme par hasard, j'ai toujours été devant eux dans l'état d'innocence d'un lecteur. Tout s'est toujours passé comme si j'ouvrais sans rien en savoir le livre d'un autre, le parcourant comme tout lecteur, et n'ayant à ma disposition pour le connaître autre méthode que sa lecture. Comprenez-moi bien: ce n'est pas manière de dire, métaphore ou comparaison, je n'ai jamais écrit mes romans, je les ai lus."
17. Balzac, Préface de La Peau de chagrin, 1831
En 1842, B se présente comme un historien, un "secrétaire" du réel. Tte imagination semble répudiée au profit de la stricte observation du réel. La préface de La Peau de chagrin, en reprenant la métaphore romantique du reflet, donne ptt une autre vision de la création romanesque: le pouvoir du romancier est comparé à un "miroir concentrique où, suivant sa fantaisie, l'univers vient se réfléchir". Ainsi la capacité d'observation du monde est inséparable de celle qui permet à l'artiste d'en donner une vision conforme à sa personnalité. Et une 3ème faculté distingue le romancier de génie.

Pour "reproduire la nature par la pensée", les écrivains disposent de trois "puissances": au couple de capacités constitutives du talent (observation-expression), s'ajoute celle qui définit les gds artistes comme doués d'une "sorte de seconde vue qui leur permet de deviner la vérité dans toutes les situations possibles" sans avoir à se déplacer. L'intuition, la voyance, sont essentielles au génie.
"Les hommes ont-ils le pouvoir de faire venir l'univers dans leur cerveau, ou leur cerveau est-il un talisman avec lequel ils abolissent les lois du temps et de l'espace?…La science hésitera longtemps à choisir entre ces deux mystères également inexplicables."
 Cf Baudelaire, Théophile Gautier: " J'ai maintes fois été étonné que la grande gloire de Balzac fût de passer pour un observateur; il m'avait toujours semblé que son principal mérite était d'être visionnaire, et visionnaire passionné".
Chap 5: L'écriture et ce qui s'y joue
Ecriture = autre chose qu'un beau style, un ornement destiné à donner la qualité litté à un langage transparent qui désignerait directement son objet, le réel ou le message de l'auteur.

Ecrivain = celui qui travaille sa parole, selon Barthes, et ce travail n'est pas une opération simple. Engageant à la fois ce qui relève du plus secret et de l'Histoire (des hommes et des formes), le langage litté se trouve à l'articulation de l'individuel et du social. Qu'en est-il alors du sujet de l'écriture? Il ya chez le poète une part obscure mais féconde qui interdit de percer le mystère de l'"arcane de la génération des poèmes" (Valéry). Si l'on approfondit la réflexion, cette dualité devient une multiplicité: le je de l'auteur s'analyse en une série de "strates" (Calvino). La sociologie de la litté ajoute une autre dimension à l'écriture en considérant que l'écrivain donne forme et cohérence aux "tendances affectives, intellectuelles et pratiques " d'un groupe (Goldmann).
18.Roland Barthes, Le Degré zéro de l'écriture, 1953
Selon B, la forme litté correspond au choix de l'écrivain confronté à la double détermination de la langue et du style. Code social, la langue s'oppose à la parole, acte individuel. Le style, "phénomène d'ordre germinatif", est l'expression de la nature de l'écrivain, il renvoie à un "passé". Produits naturels du corps et du temps, la langue et le style ne relèvent pas de la responsabilité de l'écrivain. Celui-ci s'engage en inventant une autre forme, l'écriture.

Par l'écriture, l'écrivain affirme des valeurs ("il n'y a pas de littérature sans une morale du langage" dit B), s'inscrit dans une "aire sociale" et ds les gdes "crises de l'Histoire". Mais une nvle détermination pèse sur l'écriture: celle des formes litté, historiquement datées. "Jamais innocent", le langage conserve des significations anciennes au sein même d'une "nouvelles problématique du langage littéraire", limitant ainsi la liberté de l'écrivain.
"Quel que soit son raffinement, le style est toujours quelque chose de brut: il est une forme sans destination, il est le produit d'une poussée, non d'une intention (…) il est la "chose" de l'écrivain, sa splendeur et sa prison, sa solitude. Indifférent et transparent à la société, démarche de la personne, il n'est nullement le produit d'un choix, d'une réflexion sur la Littérature. Il est la part privée du rituel, il s'élève à partir des profondeurs mythiques de l'écrivain (…) Le style est un phénomène d'ordre germinatif, il est la transmutation d'une humeur. (…)Par son origine biologique, le style se situe hors de l'art, c'est-à-dire hors du pacte qui lie l'écrivain à la société."
soumis à des déterminations biologiques (le style) et sociales (la langue), l'écrivain invente une écriture. Mais cette liberté est encore réduite par le poids des formes litté anciennes.

19.Paul Valéry, "au sujet d'Adonis", Variété, 1924
Dans les volumes de Variété, V a mené une réflexion constante sur la litté, la philo, la politique, sur l'art et sur sa propre pratique de poète. Admirateur et continuateur des classiques mais aussi contemporain des linguistes de la première moitié du 20ème, il a nettement opposé la litté et le réel. Trois principes sous-tendent sa conception de la création litté:

le refus de l'inspiration et du roman

l'affirmation du primat du langage et de la forme: une "espèce de matérialisme verbal" prévaut chez le poète qui, "créateur créé", se trouve ainsi partiellement dépassé er révélé par sa création.

le rejet de la biographie, motivé par la distinction radicale entre l'homme vivant et l'homme écrivant.
Comme Proust, V oppose "l'ouvrier d'un bel ouvrage" et le "personnage peu considérable" que livre la biographie de l'auteur. "Un connu et un inconnu" coexistent dans l'être qui crée. Si la création n'est jamais entièrement dirigée, elle n'est pas l'œuvre d'une inspiration transcendante mais d'un "instinct", d'une puissance qui joue "des secrètes harpes qu'elle s'est faites du langage". Elle exprime ainsi l'unité profonde du Moi qui ne se connaît pas lui-même et se révèle dans l'œuvre: l'auteur n'existe qu'en tant qu' il est "fils de son œuvre"(Tel quel).
"Tout se passe dans l'intime de l'artiste comme si les événements observables des son existence n'avaient sur ses ouvrages qu'une influence superficielle. Ce qu'il y a de plus important,- dans l'acte même des Muses, - est indépendant des aventures, du genre de vie, des incidents, et de tout ce qui peut figurer dans une biographie."
le poète effectue un travail sur le langage dont les motivations ne lui sont pas toutes connues. Il n'engage pas l'homme de la biographie mais le moi profond de l'artiste.

20.Italo Calvino, La Machine littérature, 1984
"Si autrefois la litté était vue comme un miroir du monde, ou comme l'expression directe de sentiments, aujourd'hui nous ne pouvons plus oublier que les livres sont faits de mots, de signes, de procédés de construction; nous ne pouvons plus oublier que ce que les livres communiquent restent parfois inconscient à l'auteur même, que ce que les livres disent est parfois différent de ce qu'ils proposaient de dire; que dans tout livre, si une part relève de l'auteur, une autre part reste anonyme et collective." > acquis de la critique moderne. Le romancier italien confirme l'analyse de Robbe-Grillet selon laquelle ns sommes dans une "époque de fiction où les problèmes de l'écriture [sont] envisagés lucidement par le romancier". Traducteur de Ponge et membre de l'OuLiPo, C a réuni ses réflexions ds La Machine littérature.
Analysant les "niveaux de réalité en littérature", C signale "la multiplication du sujet de l'écriture". L'auteur du roman n'est pas l'homme de la biographie mais une image particulière que ce texte donne de lui, une création de l'œuvre: l'auteur de Madame Bovary n'est pas l'auteur de Salammbô, qui n'est pas l'individu Flaubert.

Ainsi le je de l'écriture est un " "je" fantomatique", un "lieu vide". C'est pourquoi il peut servir de médiation à la culture collective, à l'époque historique ou aux sédimentations profondes de l'espèce". On pourrait ajouter que ces trois "strates" autorisent des lectures différentes faisant appel respectivement à l'intertextualité, à la sociologie ou à la psychologie.
"La condition préliminaire de tte œuvre litté est la suivante: la personne qui écrit doit inventer ce premier personnage qui l'auteur de l'œuvre. Qu'une personne se mette tout entière dans l'œuvre qu'elle écrit, voilà quelque chose qu'on entend fréquemment mais qui ne correspond à aucune vérité. Ce n'est jamais qu'une projection de soi que l'auteur met en jeu dans l'écriture, et ce peut être la projection d'une vraie part de soi-même comme la projection d'un moi fictif"
21.Lucien Goldmann, Pour une sociologie du roman, 1964
LG a largement contribué au renouveau des études litté. Se réclamant du matérialisme dialectique, le critique entend expliquer la pensée par "l'homme vivant et entier", lui-même conçu comme un "élément de l'ensemble qu'est le groupe social": aucune œuvre importante ne peut être l'expression d'une expérience purement individuelle (biographie et psychologie st d'ailleurs récusées comme étant à la fois externes à l'oe et impossibles à établir scientifiquement). Il a élaboré une "méthode sociologique et historique qui se sert du concept de vision du monde". Ainsi "les tragédies de Racine, si peu éclairées par sa vie, s'expliquent, en partie tout au moins, en les rapprochants de la pensée janséniste et aussi de la situation sociale et économique des gens de robe sous Louis XIV"(Le Dieu caché).

En 1964, en appliquant cette méthode au roman, G établit une homologie de structure entre la forme romanesque et la société individualiste née du capitalisme, ds laquelle la qualité et la valeur d'usage st dégradées en quantité et en valeur d'échange. L'écrivain, qui privilégie des critères qualitatifs, apparaît ainsi comme un individu problématique et le roman comme "l'histoire d'une recherche dégradée de valeurs authentiques dans un monde inauthentique" (G développe les théories de Lukàcs et de Girard). L'économie libérale valorisait la vie individuelle, c'est pourquoi le roman balzacien se présente cô la biographie d'un "héros problématique". Qd le marché libéral et individualiste est dépassé apparaît le Nouveau Roman "à caractère non biographique".
Ds les dernières pages de son livre, G précise la relation entre l'œuvre et "le groupe social, qui –par l'intermédiaire du créateur- se trouve être en dernière instance le véritable sujet de la création". Un chef-d'œuvre se distingue de l'oe médiocre par sa capacité à exprimer de façon rigoureuse la structure virtuelle d'un groupe, auquel il permet d'objectiver et de comprendre ce qui, ds ses façons de penser et de sentir, fait système.
"le caractère collectif de la création littéraire provient du fait que les structures de l'univers de l'œuvre sont homologues aux structures mentales de certains groupes sociaux ou en relation intelligible avec elles, alors que sur le plan des contenus, c'est-à-dire de la création d'univers imaginaires régis par ces structures, l'écrivain a une liberté totale. L'utilisation de l'aspect immédiat de son expérience individuelle pour créer ces univers imaginaires est sans doute fréquente et possible mais nullement essentielle (…) et secondaire de l'analyse littéraire"
tte gde œuvre litté ou artistique du passé est l'expression d'une conscience collective.
Chap 6: L'homme et l'œuvre
Une solide tradition scolaire fait de la connaissance de la vie de l'écrivain un préalable à l'étude de l'œuvre. Or cela favorise la confusion du personnage et de l'auteur, ce que Balzac dénonçait ds la préface de La Peau de chagrin: "difficile de persuader au public qu'un auteur peut concevoir le crime sans être criminel!". Au XIXème siècle s'oppose à l'impersonnalité hautaine de l'artiste (Flaubert) l'engagement moral du romancier qui désire être compris et éclairer ses lecteurs (G.Sand). D'autre part cette tradition se fonde sur une conception réductrice du travail de l'écrivain, qui procéderait à la mise en forme d'une pensée ou d'une expérience préexistantes au texte; au lecteur d'en retrouver la trace ds l'oe en s'aidant des données biographiques. Or, comme l'a montré la section précédente, le sujet de l'écriture n'est pas la personne qui écrit; si "un livre est le produit d'un autre moi", le questionnement biographiques perd son intérêt (Proust). C'est la position qu'adopte la nvle critique d'inspiration psychanalytique qui s'intéresse à "l'inconscient du texte" (Bellemin-Noël).
22.Gustave Flaubert, l'exigence d'impersonnalité
F est ss doute le premier écrivain à avoir accordé une aussi gde place à la réflexion sur sa pratique de romancier. Sa correspondance constitue une sorte d'art poétique où il expose ses principes esthétiques. Le culte de la forme et du style est poussé jusqu'à une "espèce de mysticisme esthétique". Le sujet est secondaire: "il n'y a pas en littérature de beaux sujets d'art (…) l'artiste doit tout élever". Mais le domaine de l'art est toujours "le Vrai", le beau style étant la forme exacte de la vérité: "où la Forme, en effet, manque, l'Idée n'est plus". Cela implique la critique des lieux communs et le retrait de la vie sociale: "le vrai n'est jamais dans le présent". Cela exige aussi "l'impersonnalité de l'œuvre (…) il ne faut pas s'écrire" si l'on veut atteindre le Beau.
22a. Le refus de la sentimentalité romantique (Lettre à Louise Collet du 22 avril 1854)

La critique du romantisme larmoyant, dt Lamartine est la figure emblématique, revient cô un leitmotiv ds la correspondance. Au déballage de cette sensibilité féminine, F oppose la force virile du style. Paradoxalement, c'est le W de la forme et non l'expansion du moi qui exprime les plus intenses et les plus vrais sentiments de la vie.

//Baudelaire qui condamne la "poésie du cœur".
22b. L'exigence d'impersonnalité (Lettre du 9 déc 1852)

Omniprésent mais impassible, le romancier peut donner une vie saisissante à son oe.

"L'auteur, dans son œuvre, doit être comme Dieu dans l'univers, présent partout, et visible nulle part."
22c. Le refus de l'engagement (lettre à Mme Roger des Genettes, juillet 1862)

Selon F, en voulant philosopher et intervenir dans la vie de son temps, Hugo s'est éloigné du vrai et de l'art.

"Les Misérables m'exaspèrent (…) je ne trouve dans ce livre ni vérité ni grandeur. (…)il n'est pas permis de peindre si faussement la société quand on est le contemporain de Balzac et de Dickens"
 le but de l'écrivain est de composer une oe qui s'imose par ses qualités esthétiques, ce qui exclut tte expression personnelle et tt engagement.
23.George Sand, lettre à Flaubert, janvier 1876
F a longtemps considéré GS comme le modèle de l'écrivain sentimental et sans style. Plus tard, ptt, les deux écrivains ont été liés par une amitié dt témoigne la correspondance qu'ils ont échangée de 1866 à 1876. Figure maternelle et artiste respectée, S prodiguait conseils et encouragements à F aigri par des revers de fortune et des échec littéraires (L'Education sentimentale, 1869). L'art poétique de GS s'oppose en ts points à celui de F, auquel elle répète qu'une œuvre doit exprimer "une vue bien arrêtée et bien étendue sur la vie". Désireuse de rendre "moins malheureux ses lecteurs", elle refuse de ne montrer que le mauvais comme le réalisme (ds lequel F ne se reconnaissait nullement) et récuse le culte de la forme et l'impersonnalité qui ne s'adresse qu'à des lettrés alors qu' "on est homme avant tout". Pour elle, l'auteur doit guider le lecteur en jugeant clairement ses personnages.

La réponse de F montre qu'il ne renoncera pas à ses principes: "si le lecteur ne tire pas d'un livre la moralité qui doit s'y trouver, c'est que le lecteur est un imbécile, ou que le livre est faux du point de vue de l'exactitude. Car du moment qu'une chose est Vraie, elle est bonne". C'est dc bien la question du public qui oppose les deux romanciers.
"Cacher sa propre opinion sur les personnages que l'on met en scène, laisser par conséquent le lecteur incertain sur l'opinion qu'il doit avoir, c'est vouloir n'être pas compris, et, dès lors, le lecteur vous quitte: car, s'il veut entendre l'histoire que vous lui racontez, c'est à la condition que vous lui montriez clairement que celui-ci est un fort et celui-là un faible. L'Education sentimentale a été un livre incompris (…)tous les personnages sont faibles et avortent, sauf ceux qui ont de mauvais instincts; voilà le reproche qu'on te fait, parce qu'on a pas compris que tu voulais précisément peindre une société qui encourage ces mauvais instincts et ruine les nobles efforts: quand on ne nous comprend pas, c'est toujours notre faute. Ce que le lecteur veut, c'est de pénétrer notre pensée, et c'est là ce que tu lui refuses avec hauteur. Il croit que tu le méprises et que tu veux te moquer de lui. Je l'ai compris, moi, parce que je te connaissais.(…) vous aurez beau faire, votre récit est une causerie entre vous et lui."
la volonté d'impersonnalité expose le romancier à n'être pas compris des lecteurs, qui s'attachent à la personne de l'écrivain et souhaitent qu'il exprime clairement ses opinions sur les personnages.
24.Marcel Proust, Contre Sainte-Beuve, 1954 (posthume)

S-B écrivait ds une étude au titre significatif "Chateaubriand jugé par un ami intime en 1803": "je puis goûter une œuvre, mais il m'est difficile de la juger indépendamment de l'homme même; et je dirai volontiers: tel arbre, tel fruit." L'auteur de la Recherche s'est élevé contre cette fameuse méthode au nom d'une conception radicalement différente de la litté et de l'art: le gd écrivain ne retranscrit pas les incidents de sa vie, il déchiffre le "livre intérieur de signes inconnus" que les impressions fugitives ont laissé en lui.

E lecteur doit effectuer, par "un effort de [son] cœur" un travail "au fond de [lui-même]" pour "recréer" le moi profond de l'auteur. Ainsi l'idée que P se fait de l'art conduit à distinguer radicalement l'homme de l'œuvre et à réévaluer le rôle du lecteur.
"un livre est le produit d'un autre moi que celui que nous manifestons dans nos habitudes, dans la société, dans nos vices."
 // Paul Valéry, Tel quel: "l'auteur est une création de l'œuvre".
25.Jean Bellemin-Noël, Vers l'inconscient du texte, 1979
S'il est vrai que "le fait littéraire ne vit que de receler en lui une part d'inconscience", on comprend que certains critiques, en suivant l'exemple de Freud (cf son étude de la Gradiva de Jensen) aient entrepris de lire les textes littéraires à la lumière de la psychanalyse. Une place particulière doit être accordée à la "psychocritique" de Charles Mauron qui, par une méthode rigoureuse de superposition des textes, met en évidence des réseaux d'associations et d'images qui ordonnent l'ensemble de l'oe puis dégage une structure symbolique fondamentale, inconsciente, comparable au sens latent d'un rêve, dt le critique cherche ensuite confirmation ds les données biographiques. Phèdre transpose ainsi un fantasme oedipien: en aimant Ariste, Hippolyte (le Moi) tente d'échapper à une mère possessive (Ca) et se heurte à un père implacable (Surmoi). Plus généralement, l'oe de Racine exprime sa lutte contre "la menace de la névrose janséniste", héritage de l'éducation rigoriste reçue à Port-Royal.

Le risque est de s'intéresser à l'homme plus qu'à l'œuvre. Todorov a reproché à la psychocritique de "postuler l'existence d'un original" biographique alors que le texte "est toujours la transformation d'une autre transformation". Pour se prémunir contre le beuvisme, J B-N choisit d'aller vers l'inconscient du texte sans "jamais faire appel à l'auteur des textes mis en lecture".
Le je(u) littéraire

Il y a ds le txt "un effet de désir" que le lecteur met en scène par son travail, aussi cet inconscient du txt ne peut-il être js isolé et attribué au sujet-créateur. La lecture du fameux incipit de la Recherche met ainsi en relation toute une série de sujets:

Le monde le texte le lecteur


Marcel Proust JE: l'auteur implicite du récit je: le moi conscient du lecteur

Je: le narrateur explicite "je": le moi inconscient du lecteur

Je: le personnage du récit
C'est ds ce "jeu des je" que réside, selon J B-N, la séduction mystérieuse de la litté. Expliquons: le lecteur ne s'approprie pas purement et simplement le je de la fiction, il est contraint de composer avec lui, de faire une expérience nvle, susceptible de le transformer.
le txt litté met en relation plusieurs sujets, conscients et inconscients. L'interconnexion entre les inconscients du txt et du lecteur est à la source du plaisir de la lecture.


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