télécharger 165.17 Kb.
|
DE L’AUTRE COTE…. De Catherine Tullat Lauréate du concours France-Culture/Association Beaumarchais-SACD Sur le thème : Frontières Diffusée le 20 novembre 2004 sur France-Culture PERSONNAGES ET INTERPRETES Marc A : Jean christophe DOLLE Jeanne A : Ingrid JAULIN Piotr W : Miglen MIRTCHEV Charles L : Jean Christophe BRETIGNIERE Victor : Jean Gabriel NORDMANN M. Métal : Bernard BOUILLON Amandine DEWASME, Johanna NIZARD, Jerome CHAPATTE, Hugo MAYER, Jana BITTNEROVA, Pierre Yves DESMONCEAUX, Catherine ARTIGALA, Clémentine SAINTOUL, Emmanuel LEMIRE, Grégory QUIDEL, Aline ALBA, Myren ASTREE, Patrick MAUDON, Axel BRY, Philippe PASCAL, Marie CONSTANT, Omar BAHA, Jeanne RAIMBAULT, Frédérique GARBIES. Bruitage : Patrick MARTINACHE Réalisation : Michel SIDOROFF LIEUX : Appartement Jeanne Le SAS Hall de gare Rues Mairie Souterrain LA FRONTIERE ENTRE QUARTIER NORD ET QUARTIER SUDDes talons martèlent le sol. Des portes claquent. Annonce : Le train Sud Express est entré en gare… Le train Sud Express est arrêté… Descendez calmement et avancez vers les portes qui clignotent. Une porte s’ouvre. L’ambiance est feutrée. VOIX METALLIQUE 22 ! Vous êtes « programmé agité » aujourd’hui ! MARC Pas plus qu’hier, M. Métal. VOIX METALLIQUE Pensez à vos 3 heures de « libertinage ». Rire métallique. Bruit métallique. VOIX METALLIQUE Allez 22, le petit câlin collé. MARC (saisit) Ah ! Vos bras sont glacials. VOIX METALLIQUE Métal premier choix, 22. MARC voix sourde Non, enlevez ça, j’étouffe sous cette bulle. VOIX METALLIQUE Suffit ! Profitez de votre mal avec patience. MARC voix sourde J’ai une crampe … Aïe ! Aïe ! Bruit de métal. VOIX METALLIQUE Il faut souffrir pour être beau. C’est bien vous, humains, qui avez inventé cette figure de style. MARC se détend et prend une grande respiration On a fait mieux. VOIX METALLIQUE Qu’est ce que vous êtes « gronchon », 22 , pour deux petites minutes dans mes bras … Décrispez les mâchoires, vous serez moins « crampé ». Rire métallique. La porte s’ouvre et se referme avec fracas. L’atmosphère est plus bruyante. Une voix métallique annonce : « TOUS LES NUMÉROS ENTRE LE 5 ET LE 12 SONT ATTENDUS AU HALL B » « TOUS LES NUMÉROS ENTRE LE 5 ET LE 12 SONT ATTENDUS AU HALL B » MARC pour lui-même Grignotage, grignotage ! Bruits de la rue. APPARTEMENT JEANNEUne sonnerie de réveil retentit. JEANNEDéjà ? Il avance de plus en plus ce réveil… MARC Non, 3 heures, c’est très court… J’ai envie d’un bon café. JEANNE Il est prêt ! MARC Tu es parfaite !… Jeanne, je n’en peux plus… Et ce M. Métal qui me nargue à chaque intonation. Je prends sur moi, mais… JEANNE Prends sur toi, je t’en prie… Tu n’as pas vu leur dernière invention ? MARC Non ! Ma vision de la ville s’est extrêmement resserrée, depuis que je suis de l’autre côté. JEANNE Ils ont décoré le parking du supermarché avec des petits boxes en pelouse fluo. Ils ont recouvert les caddies de mousse en plastique et planté des marguerites, couleurs bonbons acidulés. MARC Ils camouflent avec du « tape à l’œil ». JEANNE Ils ont aussi verrouillé les jardins. MARC C’est une atteinte à la rêverie passagère. JEANNE A quoi ça sert d’avoir des jardins, juste accessibles par le regard. Le réveil sonne de nouveau. Un temps. JEANNE inquiète Ils sont encore venus à l’Agence ce matin… Ils insistent, ils insistent, mais tant que tu es de l’autre côté… Alors, j’invente : manque de temps, de créatif… Marc, je ne peux pas travailler pour eux. MARC Gagne encore du temps, si tu peux. JEANNE Ils vont finir par me l’imposer. MARC Les élections approchent.…Qu’est-ce que tu fais ce soir ? JEANNE Un bon bain, plateau télé et ma couette. MARC Je vais faire la même chose pour me sentir un peu avec toi. JEANNE Marc. Je dors mal. Je me réveille toutes les nuits. Moi qui aimais prendre toute la place dans le lit… Je n’ose plus…Au cas où tu rentrerais. MARC Fini, l’imprévu. M. Métal veille. JEANNE Il y a une chose qu’ils ne pourront jamais nous enlever, nous ! Ils s’embrassent. MARC A demain, mon petit amour. La porte s’ouvre. Jeanne écoute Marc descendre les escaliers puis ferme la porte. Elle se déplace dans l’appartement, ouvre la fenêtre. Ambiance rue. Des bruits d’animaux préenregistrés (chiens qui aboient, oiseaux…) fusent dans les haut-parleurs installés dans toute la ville. Annonce : Le labrador du N°15 attend son maître au bus C…. Attention, attention, le labrador du N°15 attend son maître au bus C… SOUTERRAIN Des voix fusent dans toutes les langues sortant d’une immense radio. Au milieu de ce concert de voix, la voix sourde de Marc se fait entendre. MARC sourde Piotr, c’est Marc. PIOTR voix plus présente Je t’envoie l’ascenseur. L’ascenseur se met en marche. MARC voix se rapprochant Marcel a été dévalisé aujourd’hui, je n’ai que des fruits et des yaourts. L’ascenseur s’arrête. PIOTR C’est plutôt bon signe. La résistance s’installe… De toute façon, le manque de lumière me coupe l’appétit…Tu n’as pas croisé Charles ?… Il est en retard. MARC Il y a de plus en plus de monde à la frontière. PIOTR Marc, ça ne va pas ? MARC Je ne sais pas ce que j’ai… Comme des vertiges. PIOTR Tu n’as pas bonne mine depuis quelques jours. MARC Piotr … J’ai pris ma décision… Demain, je quitte la zone Sud. PIOTR Réfléchis bien ! J’ai besoin de toi, mais réfléchis bien ! MARC C’est tout réfléchi. Une voix d’homme se fait entendre dans la radio VOIX D’HOMME Bonjour Piotr, c’est François… PIOTR Bonjour, François… À Marc reste un peu ! MARC Je ne peux pas, je suis en retard. Ironique M. Métal va s’agiter dans son bocal. L’ascenseur se met en marche. MARC la voix s’éloigne A demain. PIOTR Excuse-moi François, hurle Marc… Ton boîtier. L’ascenseur redescend. PIOTR Si tu veux écouter le débat. L’ascenseur remonte. HALL DE GARELes bruits de la rue s’estompent. Marc arrive dans un hall de gare. Annonce : Le Sud express va partir. Le Sud Express est parti. Tant pis pour les retardataires. Une porte s’ouvre et se referme avec fracas. Ambiance feutrée. LA VOIX METALLIQUE :
Vous accumulez les retards. Demain, vous aurez 30mn de moins et puis après on verra… Je laisse mon humeur » vagabonder »… MARC reprenant son souffle Ça ne se reproduira plus, M. Métal. LA VOIX METALLIQUE Bien ! j’aime quand vous me parlez doux. MARC Sentimental, Métal ? VOIX METALLIQUE Allez, allez ! La porte s’ouvre et se referme brutalement. Ambiance quai. Des chuchotements se font entendre. Des talons martèlent le sol. CHUCHOTEMENT La rue bouillonne, le pavé frémit. Tout le monde y passe mais que personne ne s’y fasse. Annonce : Le train Sud express est à quai. Ne restez pas devant ! Montez Dedans ! APPARTEMENT MARC Marc fume une cigarette, la fenêtre ouverte. Des voix sourdes et lointaines se font entendre, comme des cris étouffés. Marc ferme la fenêtre. Marc allume la radio. Musique de Jazz puis des voix remplacent la clarinette de Louis Sclavis. Marc commente seul devant sa radio ne pouvant communiquer avec les auditeurs. 1e VOIX D’HOMME … Ma femme a été licenciée après 10 ans d’ancienneté. PIOTR Pour quel motif ? 1ÈRE VOIX D’HOMME Retraite à 40 ans. 2e VOIX D’HOMME Encore une loi qu’ils ont signée en catimini. MARC Marc commente seul devant la radio... Ils grignotent, ils grignotent comme des souris sur un morceau de gruyère… VOIX DE FEMME L’intimité les dérange. 2e VOIX D’HOMME L’union fait la force. Alors plus ils séparent, plus ils déstabilisent. Pourquoi pas la retraite dés la maternelle, aussi. VOIX DE FEMME Moi, j’ai eu une promotion. 2e VOIX D’HOMME Et vous l’avez acceptée ? vous saviez bien qu’à salaire non égal, l’un de vous passerait la frontière. PIOTR Monsieur, s’il vous plaît… Laissez parler Madame, libérez l’écoute. MARC commente seul devant la radio Oui, mais il a raison. Pourquoi elle a accepté ? 2e VOIX D’HOMME Pardon ! je m’emballe, je m’emballe et je monopolise, mais Madame n’a peut-être pas lu la loi. VOIX DE FEMME Bien sûr que si, mais je n’y ai pas cru. Je me suis dit, ils ne vont pas oser et puis personne ne laissera faire. On manifestera, on les renversera. PIOTR Nous ne laissons pas faire. MARC commente seul devant la radio. Exactement, nous ne laissons pas faire. VOIX DE FEMME Oui, Mais en attendant chacun attend, attend quoi ? Je ne dois pas être la seule à me le demander. Qu’est ce qu’on peut faire ? 1e VOIX D’HOMME Arrêter le pillage de nos libertés. Empêcher la réduction de notre espace vitale. Annuler la retraite à 40 ans… PIOTR Il faut répéter, répéter les méfaits de cette loi et prouver que l’étude du professeur S... est inepte. 2e VOIX D’HOMME Il a été payé, j’en suis sûr, moi aussi je peux dire n’importe quoi sous l’effet de la science. MARC commente seul devant la radio Oui, cette étude est un pur mensonge. Dis leur Piotr… Qui peut croire que dans un couple si le salaire n’est pas égal, celui ou celle qui gagne moins contamine psychologiquement l’autre… Dis leur Piotr… De la friture se fait entendre sur la ligne PIOTR …Tout le monde le subit… On DOIT et on VA les empêcher de se réélire… Des bribes de mots fusent. Silence. Une coupure d’électricité intervient. MARC … Ça y est après la pénurie d’eau, le retour aux bougies… Nous sommes en pleine technologie de pointe. LA FRONTIERE ENTRE QUARTIER NORD ET QUARTIER SUD. Des portes claquent. Des talons martèlent le sol. Des chuchotements inquiets. Une porte s’ouvre et se referme. L’atmosphère est feutrée. VOIX METALLIQUE 22. Encore « programmé agité ». MARC Définitivement comme hier, mais pas tout à fait comme demain. VOIX METALLIQUE Épargnez-moi votre prose de gare. MARC Vous n’êtes pas sensible à la beauté des mots, M. Métal. VOIX METALLIQUE Ce n’est pas dans mon contrat d’entretien. MARC J’oubliais M. Métal, vous n’avez pas d’humeur. VOIX METALLIQUE Comme ça, on fait moins chier les humains. Bruit métallique VOIX METALLIQUE Allez 22, le petit câlin collé. MARC Vous repasserez pour votre Métal premier choix. J’ai des plaques partout. Un temps Non pas la bulle, voix se fait plus sourde, Non, pas la bulle. VOIX METALLIQUE Vous vous répétez, 22. MARC voix sourde Sadique… VOIX METALLIQUE Si ça pouvait vous rendre muet. Bruit métallique. MARC voix normale Rêvez, M. Métal. VOIX METALLIQUE Allez retrouver votre amoureuse 22, et ne soyez pas en retard. MARC Attention M. Métal, vous commencez à parler humain. VOIX METALLIQUE Et vous, 22, à me fatiguer… Silence… Puis un rire métallique strident résonne. La porte s’ouvre et se renferme avec fracas. L’atmosphère est de nouveau bruyante et à travers ce brouhaha, une voix métallique annonce : « TOUS LES NUMÉROS ENTRE LE 13 ET LE 22 SONT ATTENDUS AU HALL B » « TOUS LES NUMÉROS ENTRE LE 13 ET LE 22 SONT ATTENDUS AU HALL B » L’annonce s’éloigne. Marc se met à courir dans la rue. Il manque de se faire renverser par une voiture qui freine brutalement. VOIX D’HOMME Suicide toi ailleurs que sous mes roues, sale Sudest. Marc se met à courir de nouveau. Sa respiration est saccadée. Les bruits de la rue s’éloignent progressivement comme si Marc allait s’évanouir. DES VOIX Le gris du macadam est en train de virer avec tous ces Sudest dessus. …Il faut l’aider… Je me mêle pas, si ça finit mal. C’est peut-être un chômeur… Mais non, ils les parquent en périphérie… Déjà ça de moins… On dit que les Sudest se nourrissent de nos ordures… On ne peut pas le laisser par terre…. Je préfère mourir dans mon lit… Ne le touchez pas, s’il est contagieux… Y a plus de solidarité… Il est en train d’étouffer. Faut faire quelque chose.… C’est un déserteur, on va être taxé… Et s’il meurt ? tant pis…Ça c’est du spectacle vivant. Marc retrouve sa respiration, les bruits de la rue sont de nouveau plus présents. APPARTEMENT JEANNE JEANNE Tu te sens mieux ? MARC C’était délicieux. JEANNE Merci… Il faut éliminer ce produit de ton corps… Essaye de ne pas l’avaler. MARC C’est impossible. Je suis attaché par des bras métalliques, encerclé dans une bulle de verre… Tout ça pour me prendre deux gouttes de salive par jour. JEANNE Tu as tellement maigri, j’ai l’impression de caresser tes os. MARC N’exagère pas, je n’ai pas maigri à ce point là… Se détendant Je commençais à prendre du ventre. JEANNE Ça ne me déplaisait pas. MARC Jeanne. JEANNE Oui. MARC Jeanne... Un temps Je ne retourne plus de l’autre côté. Silence. JEANNE Tu sais ce qu’ils font aux déserteurs ! MARC Je ne me supporte plus traqué, inutile. J’ai retrouvé Charles, un ami de fac, à la frontière… Il m’a introduit auprès du groupe des souterrains. JEANNE C’était ton ami, il y a 15 ans. Qui te prouve qu’il l’est encore ? A force de se méfier de tout le monde, on finit par perdre tout discernement MARC Jeanne… Il fait partie du groupe. Il milite avec eux… Je les ai rejoints Jeanne cherche une station musicale. JEANNE Depuis combien de temps… ? MARC 15 jours. JEANNE Et… Tu prenais sur nos 3 heures. MARC Oui. Jeanne ferme la radio JEANNE Et moi qui croyais que mon réveil avançait… MARC Il avançait… Je l’avançais. … JEANNE C’est important qu’ils existent mais… MARC Mais de loin… C’est ça. JEANNE Non, bien sûr que non, mais chacun son rôle. Nous, on s’insurge, on réfléchit, on commente, mais le terrain, on ne connaît pas. MARC J’arrête le militantisme cérébral. Je vais militer actif. Il faut empêcher ces pantins désarticulés de se réélire, de se reproduire. Il faut éradiquer leurs lois, détruire leur mur, empêcher qu’ils en construisent d’autres. Ces gens-là doivent disparaître de notre paysage. JEANNE On ne s’improvise pas résistant, Marc. MARC Tu ne vis pas au Sud, ta vie n’a pas changé. JEANNE Non, je dors seule depuis que je suis mariée. Je supporte leur pression à l’Agence pour te protéger. Je subis le harcèlement de notre charmante voisine. Je tremble à chaque coin de rue. Je ne peux même plus m’asseoir sur un banc, mais à part ça, ma vie n’a pas changé… De quoi je me plains ! Mais de quoi je me plains ! Marc la prend dans ses bras. MARC … Excuse-moi, excuse-moi… JEANNE Il n’y a pas que toi qui souffres, Marc. MARC La milice citoyenne nous séparent pour nous rendre vulnérables. Je suis entré dans le groupe des souterrains pour les rendre, à leur tour, vulnérables. Marc ouvre la fenêtre. Des chants d’animaux Préenregistrés fusent des hauts parleurs installés dans la ville. Marc ferme la fenêtre. MARC Oh ! Cette basse-cour, c’est insupportable ! Un temps. JEANNE Pourquoi tu ne m’as rien dit ? MARC Pour nous, pour te protéger. Un temps JEANNE Je vais accepter de fabriquer leurs tracts, ils se méfieront moins. … Chut ! Marc s’approche de la porte et l’ouvre brutalement. MARC Vous prenez le frais sur le palier. VOISINE Vous ne trouvez pas que les appartements sont surchauffés. MARC Ouvrez la fenêtre si votre conscience vous étouffe. Marc ferme la porte. Jeanne met de la musique JEANNE Tu vois, c’est tout le temps comme ça. MARC allume la radio et chuchote Viens… Suis- moi La musique s’éloigne avec Marc et Jeanne. Marc place la radio dans la salle de bain, augmente le volume. On n’entend que les chuchotements de Marc et de Jeanne. SOUTERRAIN Des voix dans plusieurs langues envahissent la pièce. VOIX MARIA accent espagnol Piotr, tu m’entends ? PIOTR Oui, Maria. VOIX MARIA Ça y est, Madrid a voté le mur. PIOTR Empêchez les ! Vous êtes nombreux ? VOIX MARIA Peut mieux faire, mais on s’organise, on recrute, on recrute. VOIX DE MARC de la salle de bain de l’appartement de Jeanne Maria, c’est Marc. MARIA Hola Marc, como esta ? VOIX DE MARC Luego la libertad. VOIX MARIA Au 29. On sera là… PIOTR On ne doit pas rater cette date… VOIX MARIA On ne la ratera pas, Piotr. VOIX VITTORIO OFF Allo, allo, bonjourno. Ultima infos. Nos gouvernants « biglottent » sur votre mur, ils le trouvent seyant. PIOTR- VOIX DE MARC ET DE JEANNE Seyant ? VOIX VITTORIO Vous vous êtes agrandis … N’oubliez pas que nous sommes le pays de la mode. Tout est seyant chez nous. PIOTR Pas chez nous, je te le dis… Allo, Vittorio… Allo ! Allo ! J’entends personne… est-ce quelqu’un m’entend… ? Allo ! Encore coupé… C’est normal… Cette installation, c’est du bidouillage … Des grésillements se font entendre. Des sons par moments surgissent, mais incompréhensibles. SOUTERRAIN La voix sourde de Marc se fait entendre. MARC voix sourde Alors Madrid a voté, Rome s’y prépare… Il faut appeler Lisbonne, Athènes… L’ascenseur se met en marche. PIOTR Voix forte Tu as retrouvé ton énergie, toi. L’ascenseur s’arrête. MARC la voix présente J’imagine M. Métal, là, en ce moment, à m’attendre… Rire La colère va le faire disjoncter. PIOTR N’oublie pas que tu en semi-liberté, Marc. Des voix dans toutes les langues fusent de nouveau dans la pièce. MAIRIE Des coups de tampon résonnent dans la grande salle de réunion de la mairie. VICTOR Tu perds du temps… Il y a assez d’encre sur ces tampons. SUZANNA Il faut que ca soit lisible. VICTOR Accélère, on prend du retard… La liste est longue Rosario C… , Philippe T…,Marc A…, Emilie E…, Laurent D…, Marceline V…, SUZANNA Cette liste s’allonge de jour en jour. VICTOR Avec leur photo grandeur nature et nos « fourmis » entraînées, ils ne vont pas se terrer longtemps. … Philippe T… Il serait plus viril avec une moustache. Suzanna prend un marqueur et commence à dessiner. SUZANNA Non, ça le rend plus coquin ! VICTOR Essaye avec une barbe. SUZANNA Trop baba cool. VICTOR Ces gens-là sont des transformistes. Devançons, imaginons tous les cas de figure… Rajoute du noir dans les cheveux et dans les pupilles, pour voir. SUZANNA Il devient bel homme. VICTOR Allez gringo, coup de tampon « refus de séjour, refus de sursis ». … Et cette Marcelline V avec sa figure d’ange. Un trait de crayon sur la paupière, un peu de rouge aux lèvres, la voilà fatale. Tous les hommes vont la dénoncer pour la « sauter ». Coup de tampon SUZANNA Allez Lolita, « refus de séjour, refus de sursis ». VICTOR Et ce Piotr W… Si on lui rajoutait des reflets roux dans les cheveux… ? Un petit côté juif polak, ca réveillerait les antisémites qui auraient perdu le goût rire… Suzanna déchire la photo. SUZANNA Il est russe. VICTOR Tu fais une erreur, Suzanna. Ton passé n’intéresse personne. Le passé pollue l’avancée d’une nation. Tu as mal lu ton contrat. SUZANNA récitant sa leçon Il ne suffit pas de le lire, il faut l’appliquer. VICTOR Bien, mais tu as encore des progrès à faire. Tu ne t’es pas assez assimilé. Il te reste des vieux réflexes. Pourtant Suzanna, ton temps d’adaptation est arrivé à terme. SUZANNA Je sais. Ça ne se reproduira plus, Victor. Ça ne se reproduira plus. VICTOR Je l’espère. Tu sais ce qu’on fait de la sensiblerie ? on la balance de l’autre côté du mur. Alors. Reprenons…Marc A… Tout fraîchement sorti… Tiens, vas-y ! improvise ! voyons comme il t’inspire… Bruit de marqueur Pas mal ce petit côté rock’n’roll. Coup de tampon Allez Elvis « Refus de séjour, refus de sursis ». Tu vas t’occuper de sa future veuve. Hein !…Entre futures veuves, de quoi parle-t-on ? … De ses petits maris. Tu ne la quittes pas d’une semelle… Les amoureuses sont nos meilleurs indics… N’est-ce pas Suzanna ?… Rire… Coups de tampon. VICTOR entonne L’avenir est au sans passé Liberté, égalité, fraternité Dans la milice citoyenne, On est lavé de tous soupçons L’avenir est aux actes à venir, Le passé aux actes réchauffés. Entrez dans la milice citoyenne Surtout si vous avez des choses à vous reprocher. Victor rit. Allez Suzanna, avec moi. Victor et Suzanna chantent ensemble L’avenir est au sans passé Liberté, égalité, fraternité Dans la milice citoyenne, On est lavé de tous soupçons VICTOR Plus de conviction, Suzanna L’avenir est aux actes à venir Le passé aux actes réchauffés. Entrez dans la milice citoyenne Surtout si vous avez des choses à vous reprocher. Le chant se transforme en un chant baroque. CHUCHOTEMENT La rue bouillonne, le pavé frémit. Tout le monde y passe mais que personne ne s’y fasse. RUES Ambiance rue. Annonce : Le caniche du N°36 attend son maître au bus C. Attention attention ! Le caniche du N°36 attend son maître au bus C. Le canari du n°1 est attendu au bus A… Le canari du n°1 est attendu au bus A IMMEUBLE JEANNE Jeanne monte les escaliers. Elle sort ses clefs, soudain elle pousse un cri. Une porte s’ouvre. VOISINE Voilà ce qui arrive aux indésirables. JEANNE C’est quoi cette horreur ? VOISINE La carte de visite milicienne. Décrochez ce mannequin ! il dépareille dans le couloir. Jeanne décroche le mannequin, UNE VOIX METALLIQUE se met en marche Marc A… « Refus de séjour, refus de sursis ». Elle jette par terre le mannequin et entre chez elle. Jeanne entend frapper à la porte. Elle ouvre, la voisine lui jette le mannequin. VOIX DE FEMME Je vous ai dit qu’il dépareillait dans le couloir. Jeanne ferme la porte. Elle ouvre la fenêtre et lance le mannequin par la fenêtre. Chants d’animaux préenregistrés. Elle ferme la fenêtre. Jeanne s’effondre sur le canapé, elle sanglote. Soudain on frappe à la porte. JEANNE Oubliez-moi ! SUZANNA Jeanne A ? Un temps. SUZANNA ouvre la porte Vous avez perdu quelque chose. JEANNE Ça ne m’appartient pas. SUZANNA C’est bien Marc A… Votre mari. JEANNE Ce mannequin n’est pas mon mari. SUZANNA comme récitant un discours Les mannequins immobiles dans les vitrines sont inutiles, nous avons décidé de les animer. … Votre mari n’a pas passé la frontière depuis trois jours. Nous sommes très inquiets. JEANNE Vous pourriez au moins mettre une photo qui lui ressemble. SUZANNA C’est prévu, nous avons l’original. Puisque vous ne m’invitez pas à entrer, j’entre. … Vous savez, je préférerais participer à la décoration de la ville, j’étais décoratrice avant, plutôt que de courir après des rebelles à la petite semaine. JEANNE Je ne sais pas où est mon mari. Je l’attends. SUZANNA comme récitant un discours Madame Jeanne A. La loi est la loi. Vous passez outre, vous devenez hors la loi. JEANNE Vous l’avez rendu malade. Je ne sais pas ce que vous lui faites avaler, mais ça le rend malade… Et puis, les trois heures ne sont pas écoulées… SUZANNA comme récitant un discours La voix de la porte I nous a signalé que votre mari était agité lors de son dernier passage. Il est mûr, pour avoir fait le mur. Vous étiez un couple uni, non ? JEANNE Nous le sommes. SUZANNA comme récitant un discours C’est avec des gens comme vous, que les révolutions capotent. JEANNE Vous osez parler de révolution, elle rit Vous n’avez pas choisi le bon camp. SUZANNA L’arrogance est un délit, Madame Marc A, plus douce mais pour cette fois, je passe… Un mari déserteur est une lourde responsabilité pour sa femme. Tout dépend d’elle et de son état mental. JEANNE Je vous plains, Madame. SUZANNA Vous pouvez. Elle marche dans l’appartement et se dirige vers la salle de bain. Drôle d’endroit pour une radio. JEANNE Je capte mieux. Suzanna allume la radio. Musique Jazz... SUZANNA Subtil écho ! A bientôt, Jeanne A… vous pouvez m’appeler Suzanna… JEANNE Je n’ai rien de commun avec vous. SUZANNA Qui sait ! Jeanne ferme la porte. Elle entend des chuchotements de l’autre côté de la porte. Elle attend que les chuchotements cessent et que la porte se ferme. Elle ouvre la fenêtre. Des chants d’animaux préenregistrés fusent. Jeanne après avoir vérifié que Suzanna est partie, ferme la fenêtre et va dans la salle de bain. Elle adapte le boîtier de Marc sur l’appareil. JEANNE parle doucement Allo, allo… PIOTR Allo… Allo ! Parlez plus fort, je vous entends en écho. JEANNE chuchote C’est normal, Je suis dans la salle de bain… Je suis Jeanne… MARC Ma chérie, comment vas-tu ? JEANNE Ça s’accélère. En rentrant j’ai trouvé devant la porte ta tête grimée sur un mannequin hideux et une certaine Suzanna, sort de chez moi, de la milice… Marc… Je veux militer active. Un temps MARC Tu en es sûre ? Je ne t’oblige en rien. JEANNE Si je dois mourir autant que je meure utile. MARC Ça, on va essayer de l’éviter… Trouve-toi demain à 4 heures au café Barnabé. Charles va te rejoindre. Il va t’expliquer… Jeanne … Merci ! On a besoin de toi… Tu me manques terriblement… JEANNE Moi aussi… Tu sais que je n’arrive toujours pas à prendre toute la place dans le lit… MARC C’est une question de semaine. JEANNE Comment va ta vie en sous-sol ? MARC Je m’adapte. PIOTR Bienvenue Jeanne… Est-ce que tu peux nous faire des tracts ? JEANNE Je vais prendre sur le papier de la milice. Ils en ont de toute façon, trop. Et tes vertiges, Marc ? MARC Toujours là, mais plus espacés. PIOTR Ne t’inquiète pas, On ne va pas leur laisser le temps de nous empoisonner. On frappe à la porte JEANNE chuchote Je te laisse, je t’aime… MARC Moi aussi. Jeanne remet la musique et cache le boîtier. Jeanne ouvre la porte. Apparemment, personne ne se montre. Elle referme la porte, soudain elle l’ouvre de nouveau, sa voisine est derrière la porte. JEANNE Vous n’avez que ca à faire de vos journées. VOISINE Je suis payée pour ça, et bien payée. Vous devriez en faire autant. Pensez à la réputation de l’immeuble. … La radio dans la salle de bain, c’est une bonne idée… Jeanne ferme la porte. Elle augmente la musique. RUES Ambiance rue. Annonce : Le chat du n 23 est attendu au camion E… Le chat du N°23 est attendu au camion E. Des cloches de vaches sont si fortes qu’on a l’impression qu’un troupeau va surgir d’une rue. Charles et Jeanne sont assis à une terrasse d’un café. CHARLES … Pour les courses, vous n’achetez que chez Marcel, il fait partie de notre groupe. Quand vous marchez dans les rues, tenez ces petits miroirs dans chaque main. Utilisez-les comme des rétroviseurs. Comme ça si vous êtes suivie, vous repérez sans êtes repérée et vous pouvez vous échapper. JEANNE Ça ne va pas ? CHARLES Juste un vertige, mais ca va passer. JEANNE Marc a la même chose. C’est ce produit que vous avalez. CHARLES Ils ne peuvent pas nous tuer en nombre, ça se remarquerait. JEANNE Non, mais vous affaiblir pour vous faire taire. Cette prise de salive est un prétexte. Il faudrait connaître le nom de ce poison pour l’antidote… Tout poison a son antidote. Un concert d’oies et de canards qui se répondent en écho. Annonce : »… Rosario C… Philippe T… Vicente E… « Refus de séjour, Refus de sursis » CHARLES Vous avez vu ?… Ils quadrillent la ville. Ils osent appeler ces bus de délation, « bus citoyen »... Vous avez lu leur programme ? JEANNE Non. Je ne préfère pas. CHARLES Lisez juste le paragraphe, « LIBERTE D’EXPRESSION. Ils sont imbattables dans le détournement des mots, du sens des mots. JEANNE J’ai l’impression d’avoir pris un sacré coup de vieux. …. Qu’est ce que vous faisiez au siècle dernier ? ironique CHARLES J’étais avocat. Ils m’ont remercié. Trop subversif, mais j’ai droit à 5 heures de liberté … Alors, je milite utile. JEANNE Vous étiez à la fac avec Marc. CHARLES Pas dans la même section… Ironique Il était nettement plus doué que moi. Ils rient. Annonce : « … Marc A… Piotr W…Emilie E… » Refus de séjour, Refus de sursis ». JEANNE Ça y est ! Marc va être suspendu en l’air… CHARLES La rassurant Jeanne, ce n’est que son mannequin… Une heure de retard à la frontière et vous êtes déclaré déserteur… On y va ? Actionnez vos rétroviseurs. Jeanne actionne ses rétroviseurs. JEANNE Attendez… Je suis surveillée… Elle ne va pas me lâcher, cette Suzanna…Efficace ces rétroviseurs… CHARLES Vous courrez vite ? JEANNE Plus jeune, j’ai fait de l’athlétisme en compétition, c’est là que j’ai connu Marc. CHARLES Alors, dans 1/4 heures devant le 5 rue de la villette. Prêt… Partez… SOUTERRAIN La radio est coupée. Piotr essaye de réparer. PIOTR C’est la première fois que la coupure dure. MARC C’est assez angoissant d’être au-dessous de ses ennemis. PIOTR Je me suis habitué à écouter. Le son, c’était mon métier. Je me souviens d’un voyage au Sahara, il y avait beaucoup de vent et le son du vent sur les grains de sable me fascinait. J’étais le seul ! J’ai fait des tas d’enregistrements, mais quand je les faisais écouter, personne n’entendait le vent chatouiller les grains de sable. Je les ai souvent réécoutés pour le simple plaisir. MARC Et tu entends toujours les grains de sable ? PIOTR Toujours. MARC Je n’ai pas cette sensibilité particulière. Les sons m’agressent le plus souvent, j’ai du mal à les distinguer. PIOTR En ce moment, ils font de la pollution sonore. Même moi, ça m’agresse. Ils croient nous endormir avec leurs bandes préenregistrées, c’est du même niveau que leur programme. Vide, truqué, mauvaise copie… MARC Charles est en retard. PIOTR …. Je n’aime pas ces longs silences, vides. … Marc ? Marc… Marc entend Piotr comme s’il était loin. MARC Toujours ces vertiges… PIOTR Il faut que tu manges…. On va manquer de provisions, s’il ne vient pas. MARC ironique Vous voulez tous me gaver. CHARLES Voix sourde Piotr… C’est moi… MARC Encore un jour de gagné. L’ascenseur se met en marche CHUCHOTEMENT La rue bouillonne. Le pavé gronde. Tout le monde y passe mais que personne ne s’y fasse. RUES Ambiance rue. Un haut de contre chante sous des arcades, sa voix porte et résonne. Une musique enregistrée accompagne le chant. Jeanne à l’aide de ses rétroviseurs à repéré Suzanna. Elle la surprend. JEANNE Bonjour, Suzanna ! SUZANNA Bravo ! JEANNE Vous êtes partout, mais vous manquez de discrétion. SUZANNA Ce chant est inécoutable. JEANNE Vous n’aimez pas la beauté ? SUZANNA L’opéra mérite d’être écouté dans un opéra, pas dans une impasse. JEANNE Les mannequins sont plus utiles dans une vitrine que suspendus dans l’espace. SUZANNA Faux. Ils s’aèrent, ils se dépoussièrent, ils suivent le rythme du vent. Tenez, asseyons nous là, j’ai à vous parler. Elles s’assoient à une terrasse. Certaines conversations fusent autour d’elle avec en bruit de fond, les voitures, des klaxonnes… Des galops de chevaux se font très présents. Soudain une musique de western vient renforcer les galops des chevaux. SUZANNA Comment vous trouvez notre nouvelle tendance sonore : Nature, ferme, produits bio… JEANNE Je déteste la campagne, surtout en ville. Annonce : « Vincent P…Serge T…Lucas M… » Refus de séjour, refus de survie » SUZANNA Les élections arrivent et l’on manque de personnel… JEANNE Je ne fais pas de politique SUZANNA Pourtant vos derniers slogans sont plutôt décapants. Elle lui jette sur la table JEANNE Qui vous les a donnés ? SUZANNA C’est moi qui pose les questions. … C’est lui ou vous, réfléchissez bien. Je sais que vous savez où il est… Et moi ça m’intéresse de savoir où il est. Vous courrez vite, mais je m’entraîne… Au fait, La radio dans la salle de bain, subtil ! JEANNE Sans amour, on n’est rien du tout SUZANNA On s’habitue à tout. Un temps. JEANNE Vous êtes mariée ? Un temps SUZANNA Je l’étais, mais mon mari a préféré déserter, comme le vôtre, plutôt que de s’inscrire dans l’Histoire. JEANNE Vous êtes entrée dans la milice pour le rechercher ? c’est noble. SUZANNA … Le choix d’une femme de déserteur est limité : le dénoncer ou le suivre. JEANNE parlant doucement Alors vous êtes montée dans ce bus d’exception, vous avez pris une liste par ordre alphabétique, et vous avez inscrit son nom sur la liste. Aucune trace, pas d’explication et la vie continue. SUZANNA Ces bus évitent les psychodrames, les déchirements inutiles... JEANNE La chaleur de son corps, le regard qu’il vous portait, l’odeur de sa peau, cet accord des corps unique et irremplaçable, ca ne vous manque pas ? SUZANNA Le passé est un acte définitivement dépassé. Article 3. JEANNE Essayez de vous souvenir, vous nous ferez moins de mal. … Laissez, je vous invite… Je ne vous donnerai jamais mon mari. SUZANNA Et si j’avais besoin de vous pour retrouver le mien. JEANNE Vous ne m’aurez pas avec de la sensiblerie. Jeanne se lève laissant Suzanna songeuse. SUZANNA Ils vont se faire arrêter. JEANNE Votre conscience vous étouffe ? Jeanne disparaît rapidement laissant Suzanna rêveuse. VOIX DE JEANNE La chaleur de son corps, le regard qu’il vous portait, l’odeur de sa peau, cet accord des corps unique et irremplaçable, ca ne vous manque pas ? Un temps Essayez de vous souvenir, vous nous ferez moins de mal. SUZANNA se parlant à elle-même On se ferait moins de mal… Cette femme ne craque pas pourtant elle paraît fragile… J’envie son amour… Moi aussi, j’aimais Piotr, c’est par amour que je l’ai dénoncé… Non, ma fille, tu l’as fait par trouille. C’est tout. J’ai espéré qu’il s’échappe, il s’est échappé… Piotr, tu me manques… Comment te dire que je suis entrée dans la milice pour te sauver, pour détourner l’attention. Il n’y a qu’à moi que je peux dire ces choses-là. CHUCHOTEMENT La rue bouillonne, le pavé gronde. Tout le monde y passe, mais personne ne s’efface. SOUTERRAINLa radio est toujours coupée. Des coups de marteaux persistent depuis quelques heures MARC Je suis sûr que les coups de marteau ont quelque chose à voir avec les coupures d’ondes. PIOTR Probablement. MARC Pourquoi Jeanne ne vient pas nous dire qu’il se passe quelque chose. Elle le sait qu’Il se passe quelque chose, il faut qu’elle nous le dise…Ça fait trois jours… A moins que cette Suzanna... PIOTR … Ma femme s’appelait Suzanna… MARC Tu ne m’as jamais dit qu’elle était dans la milice ? PIOTR Je ne t’ai jamais parlé d’elle… Elle y est peut-être entrée depuis, je ne sais pas… Si elle y est entrée, c’était peut-être pour me laisser prendre la fuite. Détourner l’attention. Si elle est y entrée… Elle n’a pas pu y entrer comme ça… On n’y entre pas comme ça, sauf les salauds. MARC Elle t’a dénoncé ? PIOTR Je n’ai aucune preuve, un doute c’est tout. Tant que j’ai le doute, je garde l’espoir. MARC L’espoir de quoi ? PIOTR Elle s’appelait Suzanna, c’était ma femme, c’est tout ce que j’ai à dire. MARC Dénoncer par peur, c’est irrationnel, non ? PIOTR Oui, mais après… Le regard que tu portes sur l’autre, quand tu sais que c’est l’autre. Là, tout devient rationnel. MARC De toute façon, tu n’as qu’un doute, c’est tout. On ne peut pas accuser sans preuve … Ma seule certitude, c’est Jeanne. PIOTR La peur outrepasse les bornes, parfois. MARC …Tu aimerais la revoir ? PIOTR Je ne sais pas. MARC Juste pour savoir. PIOTR Je préfère le doute, c’est plus confortable, sans doute ! Des voix en langues étrangères fusent de nouveau dans la pièce. Soudain la voix de Jeanne se fait entendre. JEANNE voix lointaine. Marc… C’est moi… Jeanne… Marc, tu m’entends. |
![]() | «Pays émergents et en développements» (ped) se déroulent en République du Bénin. Plus précisément sur un quartier de Cotonou qui... | ![]() | «secte», IL y a des factions qui se sont formées ce qui crée des conflits exploitables par un mj entreprenant (pour ne pas dire vicieux... |
![]() | «quartier de l’Europe» qui se crée sous Louis-Philippe dans les années 1840, autour de la première gare parisienne Saint-Lazare,... | ![]() | «le Chaudron» est un stade sportif français situé à Saint-Étienne, construit en 1930. IL est situé au nord de la ville dans le quartier... |
![]() | ![]() | ||
![]() | ![]() | ||
![]() | ![]() | «Les Allées des Senteurs», sis à grasse (06130), Chemin de la Cavalerie, Quartier de Saint Claude |