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L’HISTORIEN ET LES MEMOIRES DE LA GUERRE D’ALGERIE
PLAN DU COURS
Problématique : comment et avec quels outils interroger le passé ? L’exemple de la guerre d’Algérie Qu’est-ce-que la mémoire ? C’est l’expression d’un lien avec le passé qui peut être manipulé et propre à chaque groupe particulier ou acteur. C’est donc une construction subjective. Certaines périodes, certaines déchirures, sont particulièrement source d’enjeux de mémoire comme la seconde guerre mondiale et la guerre d’Algérie, cette guerre dite « sans nom ». Le rôle des historiens est alors essentiel : il travaille sur la et les mémoires, sur la représentation du passé et sur le rapport des sociétés à leur passé ; il croise les sources pour tendre vers la vérité, l’objectivité.
Problématique : Comment l’Etat cherche-t- il à réconcilier les Français entre eux ? (Guy Pervillé)
Document 1 : Les accords d'Évian du 18 mars 1962 I - ACCORD DE CESSEZ-LE-FEU EN ALGÉRIE ARTICLE PREMIER Il sera mis fin aux opérations militaires et à toute action armée sur l'ensemble du territoire algérien le 19 mars 1962, à 12 heures. ART. 2 - Les deux parties s'engagent à interdire tout recours aux actes de violence collective et individuelle. - Toute action clandestine et contraire à l'ordre public devra prendre fin.[…] II - DÉCLARATIONS GOUVERNEMENTALES DU 19 MARS 1961 RELATIVES À L'ALGÉRIE. A) DÉCLARATION GÉNÉRALE Le peuple français a, par le référendum du 8 janvier 1961, reconnu aux Algériens le droit de choisir, par voie d'une consultation au suffrage direct et universel, leur destin politique par rapport à la République française […] CHAPITRE PREMIER De l'organisation des Pouvoirs publics pendant la période transitoire et des garanties de l'autodétermination a) La consultation d'autodétermination permettra aux électeurs de faire savoir s'ils veulent que l'Algérie soit indépendante (la question ne sera pas posée lors du scrutin, le seul choix sera Indépendance associée à la France ou sécession) et, dans ce cas, s'ils veulent que la France et l'Algérie coopèrent dans les conditions définies par les présentes déclarations.[…] i) Le FLN, sera considéré comme une formation politique de caractère légal. j) Les personnes internées tant en France qu'en Algérie seront libérées dans un délai maximum de vingt jours à compter du cessez-le-feu. k) L'amnistie sera immédiatement proclamée. Les personnes détenues seront libérées. l) Les personnes réfugiées à l'étranger pourront rentrer en Algérie. Des Commissions siégeant au Maroc et en Tunisie faciliteront ce retour.[…] → L’amnistie implique théoriquement l’arrêt des poursuites par la justice française contre des Algériens, et celles du nouvel État algérien contre des Français. http://mjp.univ-perp.fr/france/1962-1903evian.htm Document 2 : la loi du 3 décembre 1982 : la dernière loi d’amnistie Article 1. Par dérogation aux dispositions des articles L. 5 et L. 11 du code des pensions civiles et militaires de retraite [*bénéficiaires*], les anciens fonctionnaires, militaires et magistrats radiés des cadres à la suite de condamnations ou de sanctions amnistiées en application des lois n° 64-1269 du 23 décembre 1964, n° 66-396 du 17 juin 1966, n° 68-697 du 31 juillet 1968 […] pourront, sur demande, bénéficier de la prise en compte pour la retraite des annuités correspondant à la période comprise entre la radiation des cadres et soit la limite d'âge du grade détenu ou de l'emploi occupé au moment de cette radiation, soit le décès s'il est antérieur. Ces dispositions s'appliquent aux personnes de nationalité française à la date de promulgation de la présente loi. Elles s'appliquent, en outre, aux militaires ou anciens militaires ayant servi à titre étranger. […] → loi réintégrant dans l’armée les officiers putschistes et permettant les révisions de carrière nécessaires à la perception de l’intégralité de leurs retraites. F Mitterrand: « il appartient à la nation de pardonner ». 2. Se dresser contre le silence et l’oubli pendant et après la Guerre : les intellectuels et la guerre d’Algérie Document 3 : « La question » le témoignage d’Henri Alleg Membre du PC algérien et directeur du journal « Alger Républicain » de 1950 à 1955, quotidien ouvrant ces colonnes à toutes les tendances de l’opinion. Ce journal fut interdit en 1955. Pour échapper à une mesure d’internement Henri Alleg rentre dans la clandestinité. Il est arrêté le 12 juin 1957 par les parachutistes de la 10e DP qui le séquestrent et le torture pendant un mois entier dans la banlieue d’Alger à El-Biar. « Alors, me dit-il, ça ne te suffit pas ? On ne te lâchera pas. A genoux ! » De ses énormes battoirs, il me giflait à toute volée. Je tombai à genoux, mais j’étais incapable de me maintenir droit. J’oscillais tantôt à gauche, tantôt à droite : les coups d’Erulin rétablissaient l’équilibre quand ils ne me jetaient pas contre le sol : « Alors, tu veux parler ? Tu es foutu, tu entends. Tu es un mort en sursis ! » « Amenez Audin, dit Charbonnier, il est dans l’autre bâtiment. » Erulin continuait à me frapper, tandis que l’autre, assis sur une table, assistait au spectacle, assis sur une table, assistait au spectacle. Mes lunettes avaient depuis longtemps voltigé. Ma myopie renforçait encore l’impression d’irréel, de cauchemar que je ressentais et contre laquelle je m’efforçais de lutter, dans la crainte de voir se briser ma volonté. « Allez Audin, dites-lui ce qui l’attend. Evitez-lui les horreurs d’hier soir ! » C’était Charbonnier qui parlait. Erulin me releva la tête. Au-dessus de moi, je vis le visage blême et hagard de mon ami Audin qui me contemplait tandis que j’oscillais sur les genoux. »Allez, parlez-lui », dit Charbonnier. ‘C’est dur, Henri », dit Audin, Et on le remmena. Brusquement, Erulin me releva. Il était hors de lui. Cela durait trop. »Ecoute, salaud ! Tu es foutu ! Tu vas parler ! Tu entends, tu vas parler ! »[…] On a fait la guerre en Indochine, ça nous a servi pour vous connaître. Ici, c’est la Gestapo ! Tu connais la Gestapo ? Puis ironique: « Tu as fait des articles sur les tortures, hein, salaud ! Eh bien ! Maintenant, c’est la 10e D.P. qui les fait sur toi. »…. Extrait P 34 -35 « La Question » Henri Alleg. Editions de Minuit.1958 Doc.4 « Le petit soldat » Jean–Luc Godard – 1960 En 1958, pendant la Guerre d'Algérie, Bruno Forestier (Michel Subor), déserteur réfugié en Suisse, travaille pour un groupuscule d'extrême droite. Il croise un jour Véronica (Anna Karina) et en tombe amoureux. Ses amis le soupçonnent de mener un double jeu, et pour le tester, lui ordonnent d'assassiner un journaliste. ![]() Doc. 5 « Muriel ou le temps d’un retour » Alain Resnais - 1963 : Dénonce la torture sur les femmes. Septembre 1962. Hélène Aughain, femme au début de la quarantaine et antiquaire à domicile, vit à Boulogne-sur-Mer avec Bernard Aughain, son beau-fils qui revient d'Algérie. Elle fait revenir son amour de jeunesse, Alphonse Noyard, un homme dissimulateur, charmeur et habile. Il arrive accompagné d'une jeune femme, Françoise, actrice débutante, qu'il fait passer pour sa nièce. Hélène les accueille et la cohabitation du groupe va s'avérer source de tensions : rémanence du passé propre à chacun, résolution du passé et amours contrariés. ![]() Doc. 6 « Avoir 20 ans dans les Aurès ». 1972 - René Vautier : La question des appelés En avril 1961, dans le massif des Aurès, un commando affronte un groupe de l'Armée de libération nationale : il fait un prisonnier algérien. Le soldat français blessé au cours de l'accrochage, instituteur dans le civil, se rappelle les événements qu'il a vécus avec ses camarades au cours des derniers mois : leur opposition à la guerre en Algérie les a conduits dans un camp réservé aux insoumis ; on les a peu à peu transformés en éléments d'un commando dont tous les membres, sauf un, cèdent progressivement à l'escalade de la violence ![]() Doc. 7 « La Guerre sans nom » film documentaire français de Bertrand Tavernier – 1992 Documentaire. Les appelés Entre 1954 et 1962, près de trois millions de jeunes Français, appelés ou rappelés, ont fait une guerre qui ne voulait pas dire son nom. Trente ans après, ceux qui n'ont jamais parlé racontent. ![]() 3. « Le silence n’est pas un remède ». Document 8 : le discours des associations d’anciens combattants Dans un premier temps, la France a pratiqué une politique d’amnistie et d’amnésie, destinée à réconcilier les Français entre eux. […]Cette politique officielle, visant à terminer une série de guerres civiles, prônait le silence comme remède, et s’opposait ainsi à la politique de commémoration nationale censée rassembler tous les Français, qui était réservée aux deux guerres mondiales. Pourtant, les anciens combattants de la guerre d’Algérie ne pouvaient accepter le silence comme seul remède. Ils s’organisèrent dans plusieurs associations qui défendaient à la fois leurs droits d’anciens combattants (très limités du fait de la non-reconnaissance de la guerre d’Algérie avant la loi du 18 octobre 1999) et leur mémoire propre. Mais si toutes les associations pouvaient s’entendre sur des programmes revendicatifs communs, elles s’opposaient par des mémoires différentes. La principale de ces associations, la FNACA ( Fédération Nationale des Anciens Combattants en Afrique du Nord) choisit d’organiser dès 1962 la célébration de l’anniversaire du cessez-le-feu du 19 mars comme date de la fin officielle de la guerre, et entraîna de nombreuses municipalités à baptiser des rues et des places du 19 mars 1962, « fin de la guerre d’Algérie ».Sa position était à la fois légaliste et antimilitariste : si des membres admettaient que cette guerre avait été inutile et aurait dû être évitée, et s’ils condamnaient la torture ( sans vouloir exagérer son extension dans l’armée), ils n’approuvaient pas pour autant les actes d’insoumission et l’engagement au côté du FLN prônés par les « porteurs de valises » du réseau Jeanson. Par là ils démentaient les accusations de leurs adversaires de droite, qui considéraient à tort la FNACA comme une filiale du PCF. […] Ces positions de la FNACA n’étaient pas partagées par la plupart des autres associations, et notamment par la principale située à droite, l’UNCAFN ( Union Nationale des Anciens Combattants en Afrique Française du Nord), Celle-ci maintenait que la cause servie par l’armée française était fondamentalement juste, que celle-ci avait été victorieuse, et qu’elle n’avait pas à avoir honte de sa victoire méritée, même si le pouvoir politique avait fini par la désavouer.[…] L’UNCAFN s’associait à la plupart des associations d’anciens combattants, mais aussi de rapatriés et de harkis, pour refuser la commémoration du 19 mars, début de la pire époque de la guerre d’Algérie. Mais cette question n’a pas eu d’importance majeure aussi longtemps que l’Etat a persisté dans sa politique d’amnésie. « La Guerre d’Algérie Histoire et mémoires », Guy Pervillé, CRDP Aquitaine, P 107-108, Mars 2008 |
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