Arts, ruptures et continuités








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date de publication19.12.2016
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HISTOIRE DES ARTS

Document n°2

Thématique:

Arts, ruptures et continuités

Domaine artistique :

Arts visuels

Niveau 3ème

Matière: Anglais

PROBLEMATIQUE

En quoi le passage est-il l’illustration des problèmes majeurs des Etats-Unis des années 1960.


INTRODUCTION




La Couleur des Sentiments est l’adaptation du premier roman et best-seller de Kathryn Stockett paru en 2009. Le film a été réalisé en 2012 par Tate Taylor et a rencontré un immense succès lors de sa sortie en salles aux Etats-Unis. L’action se déroule dans la petite ville de Jackson (Mississippi) au début des années 60, période pendant laquelle la ségrégation est encore fortement présente et ressentie, particulièrement dans les Etats du Sud des Etats-Unis. L’histoire s’articule autour du personnage d’Eugenia Phelan, surnommée Skeeter, jeune femme blanche qui rêve d’être publiée et qui pour cela, décide d’écrire un roman du point de vue des domestiques noires de sa communauté.
La Couleur des Sentiments a été très bien accueilli par la critique et a même été diffusé à la Maison Blanche en présence des époux Obama. Cependant, certains ont trouvé que ce film ne reflétait qu’une vision aseptisée de la condition des noirs, omettant d’aborder le lynchage, les viols, les arrestations arbitraires et les incendies criminels qui faisaient pourtant partie du véritable quotidien des afro-américains de l’époque.

Les thèmes abordées dans ce film sont multiples (ségrégation, place de la femme dans la société de l’époque, minorités et rébellion) et traités de différentes façons y compris avec humour. (Source : http://www.zerodeconduite.net/dplock/zdc_lacouleurdessentiments.pdf)
Le passage que nous allons étudier est un passage important car il soulève des problèmes essentiels abordés à la fois dans le livre et dans le film tels que la ségrégation, la condition des domestiques noires dans le Sud des Etats-Unis dans les années 60 et l’application des Lois Jim Crow qui prônaient l’égalité par la séparation (les noirs et les blancs étaient en effet censés être « séparés mais égaux »).
Ce passage est également capital puisqu’il se situe dans les quinze premières minutes du film. Il nous permet donc de nous familiariser avec les personnages présents dans la scène et de remarquer rapidement la tension qui existe entre les personnages de Skeeter et Hilly.
Cette partie de bridge entre jeunes femmes blanches de bonne société est l’occasion pour le spectateur d’analyser les différents rôles de chaque personnage et de soulever le problème de la ségrégation. Ainsi, nous nous intéresserons dans un premier temps au personnage de Hilly en tant que leader d’opinions. Puis, nous aborderons un thème a priori trivial mais récurrent à la fois dans le livre et dans le film : le thème des toilettes, illustration du racisme de l’époque. Enfin, nous aborderons la question des Lois Jim Crow, dont la présence se fait sentir en filigrane tout au long du passage.


PARTIE 1 : HILLY, « MAITRESSE » DU JEU


La scène se passe chez Elizabeth Leefolt (jeune femme blonde), pourtant, c’est bien Hilly qui semble être au centre de toutes les attentions. Avec sa robe aux couleurs vives et ses cheveux bruns, elle se démarque des autres jeunes femmes et attire l’œil du spectateur. Par ailleurs, c’est elle qui distribue les cartes lors de la partie de bridge. Ce geste est hautement symbolique dans la mesure où c’est également elle qui distribue les rôles de chacune au cours de la conversation. En effet, elle n’hésite pas à donner un coup de pied discret à son amie lorsqu’elle estime que celle-ci n’aurait pas dû aborder la question du mariage de Skeeter. Tout au long de la conversation, le personnage d’Elizabeth semble chercher anxieusement l’approbation de son amie Hilly. Ainsi, lorsque Skeeter lui demande l’autorisation de se faire conseiller par sa bonne pour sa chronique domestique, le premier réflexe d’Elizabeth est de regarder dans la direction de Hilly. Cette dernière donne son accord à Elizabeth d’un simple hochement de tête. La domination de Hilly sur ses amies et en particulier sur Elizabeth paraît totale. Cette idée de domination devient évidente lorsqu’Aibileen annonce que Celia Foote a encore téléphoné et qu’Elizabeth, visiblement très gênée, promet à Hilly qu’elle ne l’a jamais rappelée. Elle se sent obligée de se justifier auprès de son amie. Le regard désapprobateur qu’Hilly lui jette est presque similaire à celui qu’une mère jetterait à un enfant qui a fait une bêtise. Elizabeth, qui est pourtant la maîtresse de maison, est infantilisée. Elle doit rendre des comptes, se justifier et se plier au rôle qu’Hilly lui a attribué. Cette domination est d’ailleurs telle qu’à la fin du film, Hilly réussira à convaincre Elizabeth de renvoyer Aibileen sans motif valable.
Le seul personnage qui tient tête à Hilly est celui de Skeeter. Elle se permet de lui répondre de manière abrupte lorsqu’elle estime que cela est nécessaire et n’hésite pas à se moquer d’elle en lui rappelant qu’elle aurait pu être à la place de Celia Foote ou en suggérant qu’il serait peut-être plus judicieux qu’elle fasse construire des toilettes séparées spécialement pour elle et non pas pour les domestiques. Cependant, Hilly ne se laisse pas impressionner et reste dans son rôle de maîtresse du jeu en coupant la parole à Skeeter qui tente de changer de conversation lorsqu’elle s’aperçoit qu’Aibileen entend tout. C’est bel et bien Hilly qui impose les règles du jeu, comme lorsqu’elle déclare : « A toi de jouer, Elizabeth ». Le spectateur comprend qu’elle ne fait pas référence qu’à la partie de bridge, mais qu’elle demande à Elizabeth de la soutenir en faisant elle aussi construire des toilettes séparées pour Aibileen. Ainsi, le  « je passe » prononcé timidement par Elizabeth prend lui aussi une toute autre dimension. Elizabeth ne souhaite pas prendre position concernant le projet de Hilly visant à séparer les blancs des noirs, en particulier dans un endroit aussi intime que les toilettes.


PARTIE 2 : LES TOILETTES , SYMBOLES DE LA SEGREGATION


Les toilettes sont un thème récurrent dans le livre Kathryn Stockett et dans le film de Tate Taylor. Cela permet d’apporter un élément comique à l’œuvre mais aussi d’illustrer la question de la ségrégation. Dans cette scène, tout commence lorsqu’Elizabeth se rend compte qu’Hilly se retient d’aller aux toilettes chez elle. La mère de Hilly (Mrs walters), souffrant d’Alzheimer, intervient alors de manière brutale en expliquant que sa fille refuse d’utiliser les toilettes qu’une « nègre » (Aibileen) utilise également. Mrs Walters semble exaspérée par l’attitude de sa fille et son intervention vise de toute évidence à mettre cette dernière mal à l’aise. D’autre part, ces propos ainsi que le terme « nègre » utilisé ne semblent pas venir d’elle mais font davantage écho à ce que serait capable de dire Hilly. Le spectateur peut déjà sentir d’emblée la tension qui règne entre la mère et la fille. Les deux femmes sont en constante opposition. Mrs Walters et Hilly ne se ressemblent pas physiquement. L’allure soignée de Hilly contraste avec l’air défait de sa mère qui refuse de prendre part à la réception et préfère s’isoler dans le salon pour regarder son feuilleton. Cependant, l’intervention de Mrs Walters, même si elle est supposée mettre Hilly dans une situation inconfortable, permet à cette dernière de rebondir et d’exposer ses idées à ses amies.
C’est en effet avec beaucoup de fierté et de sérieux qu’Hilly présente son projet de « Plan Sanitaire pour une Maison Saine » approuvé par le Conseil des Citoyens Blancs. Il s’agit de faire construire des toilettes spécialement pour les domestiques noirs, et de préférence à l’extérieur, en dehors de la maison. Afin d’appuyer son point de vue, Hilly a recours à des préjugés raciaux et insiste sur le fait que les noirs ont des maladies différentes qui pourraient leur être transmises. Face à l’absurdité de ses propos, Skeeter intervient mais Hilly reprend le contrôle de la conversation en utilisant l’image de l’innocence des enfants pour donner plus de force à son argumentation. En expliquant qu’elle souhaite faire tout son possible pour protéger leurs enfants, Hilly rallie ses amies à sa cause. Elles ne peuvent pas contester une loi qui est censée protéger ce qu’elles ont de plus cher. Hilly sait également que les hommes seront sensibles aux bénéfices financiers que pourrait apporter un tel projet de loi. C’est pour cette raison qu’elle dit à Elizabeth de convaincre son mari, Raleigh, de faire construire des toilettes séparées en insistant sur le fait que cela apportera une valeur ajoutée à leur maison lorsqu’ils souhaiteront la vendre. Plus tard dans le film, on s’aperçoit que Raleigh n’est pas dupe du stratagème de Hilly. En présence de Skeeter, il se disputera avec Elizabeth et finira par dire à cette dernière qu’ils n’ont aucun ordre à recevoir de la part de Hilly. Pourtant, des toilettes spéciales pour Aibileen seront installées à l’extérieur de leur maison. Hilly aura gagné.
Aibileen, pourtant la première personne concernée par cette mesure, est très discrète dans cette scène. Elle n’a que deux répliques : « Miss Celia a encore appelé » et « Oui, Madame ». Ces deux répliques suffisent à mettre en relief le rôle utilitaire qu’elle occupe dans cette maison. Elle doit servir et être obéissante. Elle est dépourvue d’identité. Elle n’est qu’une bonne. Elle voit tout et entend tout mais tout le monde fait comme si elle n’était pas là. Le spectateur est amené à compatir avec sa situation lorsqu’il se retrouve dans la même position qu’elle, à espionner la conversation des quatre jeunes femmes dans le couloir. En effet, nous entendons la même chose qu’elle (le son est plus bas et plus étouffé) et nous éprouvons alors de la sympathie pour ce personnage qui est humilié mais qui est condamné au silence. Un seul personnage dans cette scène semble s’apercevoir de sa présence et en faire cas. Lorsqu’elle sert de l’eau aux jeunes femmes, seule Skeeter la remercie en l’appelant par son prénom, montrant ainsi qu’elle la considère comme une personne à part entière. En revanche, lorsqu’Elizabeth s’adresse à Aibileen, ce n’est que pour lui donner l’ordre de s’occuper de sa fille et surtout pour qu’elle n’entende pas la conversation à propos des toilettes. Elizabeth semble plus humaine que Hilly mais est totalement incapable d’imposer un point de vue personnel face à elle. Elle aussi voit les domestiques noirs comme des objets qui leur appartiennent. C’est ainsi que lorsque Skeeter lui demande l’autorisation de s’entretenir avec Aibileen pour sa chronique, Elizabeth répond très spontanément : «MON Aibileen ? », privant ainsi Aibileen de toute identité propre et même de liberté. L’esclavage a pourtant été aboli mais certains réflexes restent très présents. La ségrégation, thème principal du film, est bien au cœur du débat. Les Lois Jim Crow sont ancrées dans la société de l’époque et dans l’esprit de ses contemporains.


PARTIE 3 : LES LOIS « JIM CROW »


Afin de bien comprendre les enjeux de ce passage, il est nécessaire de revenir sur le contexte de l’époque. En effet, à travers le personnage très antipathique de Miss Hilly, le réalisateur du film, mais surtout Kathryn Stockett, l’auteure du roman, offrent un regard très critique sur les Lois Jim Crow qui sévissaient à l’époque et dont Miss Hilly semble se faire le porte-parole. Ces Lois sont apparues au cours des années qui ont suivi la Guerre de Sécession. En 1865, l’esclavage a été aboli grâce au Treizième Amendement de la Constitution Américaine. Les « hommes libres » (anciens esclaves) sont ensuite officiellement devenus citoyens américains grâce au Quatorzième Amendement de la Constitution américaine (1868). Le droit de vote leur a été enfin accordé en 1870 par le Quinzième Amendement.Tous ces droits ont été protégés par le Gouvernement américain jusqu’à l’élection de Rutherford Hayes à la présidence des Etats-Unis à la fin des années 1970.
A partir de ce moment- là, certaines personnes se sont attachées à remettre en cause tous les efforts menés pour défendre l’égalité entre les Blancs et les Noirs. L’arrêt Plessy v. Ferguson (Plessy contre Ferguson) rendu par la Cour Suprême le 18 mai 1896 souligne bien ce changement d’attitude. Il autorise les États qui le souhaitent à imposer par la loi des mesures de ségrégation raciale, pourvu que les conditions offertes aux divers groupes ethniques par cette ségrégation soient égales. La doctrine qui découle de l'arrêt est appelée « separate but equal » (séparés mais égaux). Elle impose pour longtemps (jusqu'aux années 1950 et 1960) une interprétation très restrictive du Quatorzième Amendement à la Constitution, censé garantir à chacun l'égale protection de la loi. Dans de nombreux états, les noirs et les blancs sont séparés : des sièges leurs sont réservés dans les cinémas, dans les trains, dans les bus … Cela n’est pas sans rappeler l’histoire de Rosa Parks*.
Dans une autre scène du film, Hilly fait clairement référence aux Lois Jim Crow en revenant sur son projet de toilettes séparées et en poussant Aibileen à la remercier pour avoir encouragé sa patronne à lui faire construire ses propres toilettes à l’extérieur de la maison. Elle annonce ainsi très fièrement à ses amies que c’est ainsi que les noirs et les blancs doivent être traités, qu’ils doivent être « séparés mais égaux ». En citant la Loi, Hilly pense probablement légitimer son projet et ses opinions. Pourtant, le spectateur, à l’instar de Skeeter, comprend bien que cette égalité n’est qu’illusion.


CONCLUSION

Ainsi, nous nous sommes efforcés de démontrer que ce passage, bien que traitant a priori d’un sujet banal (une simple partie de cartes entre jeunes femmes de bonne société), comportait des enjeux importants. En effet, il nous permet de cerner immédiatement le caractère des personnages principaux et de nous faire prendre parti pour certains d’entre eux (Aibileen et Skeeter). Il nous permet également de nous replonger dans le contexte historique et politique de l’époque.
Enfin, il reste assez fidèle au passage du livre qui lui correspond. En effet, dans le livre, la narratrice de cette partie de bridge n’est autre qu’Aibileen elle-même. Nous voyons également la scène de son point de vue. Nous sommes amenés à prendre position pour elle et ainsi à nous interroger sur la condition des bonnes noires dans le Sud des Etats-Unis dans les années 1960.


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