Edition : Le Laid été Cahiers








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L'incroyable et terrible histoire du petit Antoine

Mais dans quel monde on vit ma p'tite dame, heureusement que maintenant on a un vrai gouvernement

Oeuvre collective et absurde issue du désœuvrement d'une bande de cerveaux malades, spécialement dédicacée à la rédaction des CDFs...


Edition : Le Laid été Cahiers


Auteurs par ordre de disparition de toute lucidité :

Enzo « El Principe » - MajorFatal – Resist – Le Plan – Brouche – Harvest et son double – Piem - Graham (Goudu) Rix – tatoo - René Leys – Océane – ZZ - ARONER

17/07/2002 – 21/07/2002


1. Sur la route

Luiz Antonio Ordonez, dit « Tonino » pour sa mère et « Anto » pour le reste du monde, était assis à l’arrière du petit bus jaune. Le véhicule fatigué de la Nacional des transports serpentait sur la route poussiéreuse qui descend paresseusement des hauts plateaux vers la capitale du pays. Bercé par les cahots réguliers du bus par et la conversation ininterrompue des deux matrones placées devant lui, qui jacassaient sans cesse tout en veillant à l’équilibre précaire de la montagne de valises et de ballots divers qui leur servait d’escorte et débordait sur tous les sièges voisins, Anto réfléchissait. Il pensait à son départ du village, tôt ce matin, à l’émotion de sa mère adorée, à celle de ses amis aux yeux mal réveillés venus lui dire au revoir, et au petit terrain de football en terre battue bosselée qu’il avait vu disparaître progressivement par la fenêtre sale derrière lui, avec ses buts déglingués dans lesquels il avait tant de fois marqué, et au bord duquel Monsieur Perez, avec son costume blanc et ses chaussures bicolores comme on n’en avait jamais vues auparavant de ce côté-ci de la pampa, était venu un jour changer le cours de sa destinée en descendant de sa grosse voiture pour observer durant quelques minutes les évolutions des gamins balle au pied. L’adolescent mesurait tout ce qu’il laissait derrière lui, avec le sentiment diffus du caractère inéluctable et définitif de ce départ, et l’angoisse de l’inconnu. Pour la vingtième fois de la matinée, il ouvrit son petit sac de voyage, regarda la mince pile de vêtements soigneusement repassés, pliés et rangés par sa mère, et effleura du revers de la main le cuir usé mais parfaitement ciré de la paire de crampons d’occasion que celle-ci avait réussi à lui offrir en mettant en gage une partie de ses rares bijoux… Enfin, la tension du départ et l’impatience du lendemain finissant par se relâcher, Anto fut surpris par le sommeil en milieu de matinée et s’endormit profondément, pendant que le bus poursuivait son long périple vers la gare centrale de Buenos Aires.


2. Le rêve

Malgré le tohu-bohu qui règne dans le bus, Anto dort profondément. Son beau visage serein et grave est à peine encore celui d’un enfant, cette enfance qu’il a tant conscience de quitter maintenant. Ses lèvres remuent doucement au gré de rêveries qui ne tendent pour l’instant que vers un seul but, un seul Eldorado : LA VILLE. Des grandes cités il ne connaît pourtant presque rien ; à quelques reprises seulement sa mère l’a amené à Mendoza, chez sa tante Maria ; et déjà ce modeste chef-lieu lui avait semblé éblouissant…Bien sur il a emprunté à l’instituteur un livre sur Buenos Aires et son rêve le conduit maintenant au milieu des images, des noms et des chiffres lus et relus depuis la décision de son départ…

Le Rio de la Plata, les trois millions d’habitants, Moron, Avallaneda, Lanus… Tout se mélange et s’y ajoute les grands noms des clubs phares de la capitale, River, Boca, Argentinos… Mais le rêve hésite soudain, rebrousse chemin ; comme Anto il est sur une frontière, un rio limitrophe entre l’enfant et l’adulte… Les petites maisons blanches, le terrain bosselé, les lèvres poivrées de Gabriela lorsqu’elle lui a dit au revoir, pour un premier baiser d’adieu, tout lui revient Pancho, l’entraîneur et ses leçons d’équilibrisme – « l’équilibre Anto, tout est équilibre, les contrôles, les frappes, la conduite de balle, tu es un artiste de cirque, un funambule » - , et sa mère bien sur… sa mère qui hante longuement son sommeil.


3. Une nouvelle vie

Quand Anto ouvrit les yeux, la lumière était encore forte. elle semblait avoir plus d'éclat. le repos lui avait du bien. Anto regarda sa mère et se demanda si elle s'était reposée elle aussi. Le désert brulait tout et la route semblait encore longue. Le bus roulait toujours. Avec les tonnes de poussière qu'il soulevait, il semblait à Anton qu'il marchait dans un brouillard de feu ; ça et là cependant des lueurs de clarté comme des lucioles la nuit. Il recommença à somnoler. Mais etait-ce l'air brulant ou la peur de l'inconnu ? il fut soudain pris de doutes. L'espoir qu'il nourrissait allait-il se réaliser ? serait-il assez fort ? oh oui, pensa-t-il. Et il répéta bien fort : oui je serai fort. Cette détermination et cette force, il les avaient en lui, (parce qu'il les valaient bien). Et c'était pas le moment de craquer. Et puis maintenant, il commençait enfin une nouvelle vie... en regardant la route avancer, il rêva... comment était Buenos-Aires? Alvaro lui parlait souvent de cette ville et de la gare de retiro, cette gare à nulle autre pareille et qui racontait toute l'histoire de l'argentine. C'était le premier lieu que connut son lointain ancêtre, le premier ordonez, un "cabecita negra", qu'on appelait aussi tête noire, en des temps plus lointains. Il allait voir enfin le Rio del Plata, la place San Martin. L'excitation commença à le gagner. Il commençait vraiment une nouvelle vie...


4. Le mystère du Tetris

Devant lui se tenait une jeune femme, une Bresilienne probablement, a en juger par les petites tresses qu'elles avait noue sur le haut de sa nuque et le teint tres fonce de sa peau. La sueur qui perlait sur son cou degageait une odeur forte d'encens, qui plaisait au garcon. Elle avait un walkman Sony vise sur les oreilles, et jouait depuis le depart de l'autobus sur sa console Game Boy Color. Anto se pencha et reconnu les formes geometriques familieres de Tetris, qui tombaient de plus en plus rapidement. Les doigts de la jeune femme se promenait a une vitesse folle sur les boutons de sa machine. "Elle doit etre au niveau 10 ou 11", se dit Anto, admiratif.

Il contempla de longs moments la dexterite inouie de sa suave voisine, et se demanda comment l'aborder pour lui emprunter son petit gadget japonais.


5. L'ombre d'Enzo

Anto rêvait à sa nouvelle vie. A la ville, ses sons, ses lumières, ses couleurs, ses odeurs. Il savait que sa destinée avait changé le jour où ce recruteur l’avait repéré sur le terrain de son enfance. Il savait aussi qu’il ne pouvait se permettre de décevoir sa mère chérie. Elle avait été si déçue quand son aîné, Enzo, avait échoué préférant sortir avec des jeunes danseuses de samba plutôt que travailler inlassablement sa frappe brossée du gauche.
Anto repensait à tout ça et réalisait que sa maman ne supporterait pas un second affront.

Anto avait une énorme pression sur ses frêles épaules……

6. De Amalia à Buenos Aires

« Tiens, ça y est t’es réveillé ? ça fait au moins 400 kilomètres que tu dors… » Anto venait de faire connaissance avec la voix espiègle et le sourire moqueur de Amalia, le sortant en sursaut de sa rêverie habituelle. La jeune métisse brésilienne avait repéré le trouble du garçon et son intérêt marqué pour sa console électronique portative. Le reste du voyage fut à peine suffisant pour faire connaissance et apprendre à Anto les rudiments de ce jeu dont il avant tant entendu parler. Au village, aucun gamin ne possédait de Game Boy, mais tous en rêvaient depuis que le petit Rodriguo était parti en vacances chez son oncle aisé de Platense qui avait réussi dans les travaux publics et leur avait raconté au retour les longues heures passées à s’amuser avec la petite machine infernale de ses cousins. Anto, tout en exerçant ses doigts au maniement de l’objet ludique, interrogeait timidement Amalia. Un peu plus âgée que lui, elle allait aussi à la découverte de Buenos Aires, attendue par sa tante installée là-bas depuis une dizaine d’années pour tenir un kiosque à journaux hérité de son mari et par un célèbre professeur de musique dont les cours devaient l’aider à perfectionner son joli brin de voix. Tout le monde s’accordait à reconnaître le talent naissant de chanteuse d’Amalia et celle-ci avait fini par se décider à franchir le pas pour tenter une carrière professionnelle à la ville. Les deux adolescents étaient portés par leurs rêves incertains de gloire, l’espoir de réussir et d’aider leur famille, la crainte de décevoir et de se perdre dans la tentaculaire capitale.

Enfin arrivés, ils se quittèrent sur un quai de gare de l’immense gare routière en promettant de se revoir. Anto serra dans sa poche le bout de papier sur lequel étaient griffonnées les coordonnées de la tante d’Amalia.

Dans l’autre poche, l’adresse du bar dans lequel travaillait grand frère Enzo depuis qu’il avait abandonné le football était noté sur un second bout de papier. Les deux seules personnes qu’il connaissait à Buenos Aires… Enfin presque. Chassant rapidement Amalia de son esprit, Anto pensa à sa mère qu’il avait quittée, sans savoir dans combien de temps il pourrait la revoir, dans les petits abris bus où elle était descendue attendre la correspondance pour Mendoza, pour aller rendre visite à sa sœur Maria, et il prit sa respiration et décrocha le téléphone. « Allô ? Monsieur Perez ? C’est Anto. Je suis là, je viens d’arriver. »


7. L'accueil de M. Perez

M. Perez l'attendait. C'était un homme tout en rondeurs (comme El Mallorquin, le rugueux latéral d'Huracan rendu célèbre par sa suspension à vie pour un tacle d'une barbarie sans nom) portant une barbe désordonnée et une veste de couleur indéfinie. C'était à lui qu'incombait la lourde tache d'accueillir les gamins et leur faciliter les premiers jours, souvent difficiles, au centre. Anto appréhendait cette rencontre mais le sourire de M. Perez lui rendit un peu de confiance. Les yeux rieurs et compréhensifs de l'homme en face de lui lui semblaient familiers. M. Perez lui prit la maigre valise et lui dit : "As-tu fait bon voyage, Anto, voudrais-tu manger ou préfères-tu aller te reposer ?". Mais Anton était ailleurs. Ses yeux dépassèrent le vieux grillage vert et rouillé pour se perdre plus loin. Un groupe de garçons, calme et recueilli écoutait un homme assis sur 1 ballon...


8. Un sacré personnage

"... venait souvent ici, du temps ou les danseuses du cabaret de son père venaient accueillir les joueurs a la sortie de l'entraînement. Il garait sa mobylette a cote de l'arbre, la bas, et se tenait derrière le grillage, son chapeau a la main. Un sacre personnage, ce Renaldo. Plus d'une fois j'ai du le renvoyer chez lui, pour l'empêcher de se battre avec un joueur. C'était un romantique, et chaque nouvelle danseuse lui brisait le cœur. Au début des années 80, quand le cabaret a ferme, il est parti en Europe, dans les Ardennes belges. On s'écrivait un temps, puis je n'ai plus eu le courage de tout lire. Aux dernieres nouvelles il avait passe la frontière Française et monte une société de pari clandestin. Deja quand il était jeune, il n'arrêtait pas de se vanter de pouvoir prédire l'issue des matchs... Quel sacre personnage, je me demande ce qu'il est devenu". Anto se demandait si lui aussi, il aurait la chance de voyager à Paris.

9. Une nuit d'enfer aulassien

Cependant, une rafale de vent un peu plus forte écarta les nuages pour laisser apparaître une lune roussâtre qui éclaira la scène de sa pâleur sinistre. L'objet arrondi que l'homme assis tentait tant bien que mal de maintenir n'était pas un ballon, c'était la tête d'un homme, enseveli jusqu'au cou, et qui se débattait dans un hochement de tête mécanique. Tout à coup M. Perez se révéla bien plus grand qu'Antonio ne l'avait cru jusque là ; des cornes verdâtres pointaient sous sa chevelure hirsute et sa voix caverneuse se fit alors entendre à peine couverte par le tonnerre qui s'approchait rapidement : "Antonio de la Pena, voici le contrat que ta mère a signé avec moi de son sang, tu es désormais en mon pouvoir et tu devras acquitter la dette immémoriale de ta famille en travaillant pour moi : Tu seras dès demain envoyé dans une contrée lointaine au-delà de l'Océan, dans une ville où coulent deux fleuves appelés Saône et Rhône, là tu exerceras la fonction de gardien des enfers aulassiens en lieu et place de mon fils chéri Grégory qui naquit jadis de mes amours adipeux avec le maire du village, un certain Raymond".


 « Là, doucement ! mon trésor, ce n'était qu"un cauchemar »

Antoine aperçut alors, encore effrayé, les murs de sa chambre, ce qui eut pour effet de ramener un peu de calme dans ses pensées. Sa maman, Jacqueline, était assise au bord du lit, essuyant son front inondé de sueur." Dehors, il neigeait abondamment et l'on distinguait à peine par la fenêtre le clocher de Ste Hyacinthe et encore moins les lueurs de Québec au loin.


10. Le jour du derby

Le lendemain matin, un grand derby doit opposer l'équipe des cadets de Ste-Yacinthe à son homologue de L'Iroquoise-du-Fleuve, un duel au sommet du foot régional... Pour la première fois de la saison, Antoine sera titulaire sur l'aile droite, son entraîneur le lui a confié la veille, c'est la juste récompense de ses efforts répétés à l'entraînement. Cette situation le rend nerveux, c'est sans doute l'anxiété qui a causé le cauchemar de cette nuit. A son délire fébrile se sont mêlées les images nées dans son esprit de la discussion qu'il a eu au téléphone avec son père dans la soirée, en déplacement professionnel en France, et qui lui a raconté sa visite du stade Gerland et la déroute du club local contre le rival marseillais, l'équipe de son cœur qui joue avec les mêmes couleurs, le bleu et le blanc, que les Lynx des Neiges Yacinthois... dix ans déjà qu'ils n'ont plus réussi à battre les Castors de l'Iroquoise !

La dernière fois, il s'en souvient encore, il n'était qu'un gamin.
Impossible de dormir à nouveau. Heureusement les heures passent et le jour approche, enfin il est l'heure de se lever, de déjeuner et de préparer ses affaires dans le grand sac de sport.

Ensuite tout se passe comme dans un rêve, les images défilent, l'arrivée au stade où les gamins finissent de balayer la neige sur la pelouse, les vestiaires, l'entraîneur qui les envoie s'échauffer, les muscles durcis par le froid et la sensation agréable de retrouver le ballon...

Une heure de jeu, déjà, les jambes en feu, le cerveau embrouillé, et cet enfoiré d'arrière gauche épais comme un bûcheron du Klondike avec des jambes aussi grosses que celle de l'orignal chassé par Tonton Bernie l'hiver dernier, il arrête pas de me massacrer, quel vrai enfoiré, tout à l'heure il s'est essuyé les crampons sur ma cheville gauche sous les yeux de l'arbitre, il est bigleux cuilà, ah un bon ballon enfin, putain, vite, le contrôle, merde un peu trop long, pousser la balle de la pointe du pied pour éviter le tacle, voilà ! comme ça ciao mon pote, allez, accélérer, accélérer, accélérer encore, plus vite, manque de souffle, la ligne de touche file à toute allure, tiens y'a la petite voisine rouquine, super mignonne, comment elle s'appelle déjà, ah oui, Jo, elle s'est mise à côté de maman au bord du terrain, zut, rester concentrer, voilà le grand bûcheron qui me fond dessus, ce coup-ci mon gars, tu vas voir, tiens mange-toi le crochet extérieur, ça y est, putain y'en a encore un, il en sort de partout.... argh... ouais, petit pont sur le libero, avec un rebond, trop de la chance, je repique, je suis devant les bois, putain pas s'affoler, bien la placer, merde il sort trop vite lui, allez pas le temps, mon spécial, la roulette à 180° avec le pied au-dessus du ballon, c'est le jour ou jamais, oui, ouiiiiiii, ça passe, c'est passé, 'tin de bordel de merde, quel but, ce que je viens de leur faire aux Castooo.... SLASHHHHHH !!

La chute, la face contre la neige, dure et glacée. Si l'arbitre de la rencontre n'a réellement pas vu la main du gardien de but des Castors accrocher du bout des doigts la cheville de l'attaquant des Lynx au moment où celui-ci allait frapper dans le but vide, nul ne le saura jamais... Mais tous ceux qui étaient présents au stade ce jour-là ont soupiré en le voyant s'effondrer au terme d'une action d'éclat, quelques secondes avant de soupirer à nouveau au moment de l'ouverture du score par l'équipe adverse, l'unique but synonyme de victoire pour la onzième année... Au moment de rentrer dans les vestiaires, son entraîneur, l'air mauvais, lui a lancé : "Qu'est-ce qui t'a pris ? Tu te crois au cirque ? Pourquoi t'a pas tiré plutôt en force au lieu de nous faire ta pirouette ?" et puis il a ajouté, plus doucement, « bon allez, va prendre ta douche... »


11. Poussière d'ange

Il fait froid et les bulles du champagne qui dans le vestiaire voisin s’envolent laissent rêveur. Antoine repense à l’histoire de sa nuit, à ce cauchemar un peu fou, un peu chaud. Il revoit ces belles images lumineuses qui hantent désormais son esprit.

Bien sur, ce qui le fait rêver d’ordinaire c’est la France du football avec ces entraîneurs au langage chamarré.

Mais, ça le replonge vite dans la mélanco, il sait bien que le canadien est plus connu pour sa francophonie et son voisin américain que pour sa passion naissante. Son esprit confus tel un brouillon de Miro sautille de déprime en extase à mesure que son rêve apparaît puis disparaît. Il se revoit aussi plonger dans la poudreuse tel un loup blessé. Il voudrait échapper à ce terrible état. Puis, encore dans ses rêveries, il s’aperçoit qu’ils ne sont plus que deux dans le vestiaire serviette sur le corps. Son voisin Lillian Rubin qui a du ressentir l’état pensif du ptit Toine comme on l’appelle trop souvent (et ça l'énerve tout le temps) s’adresse à lui avec son accent unique en ces termes confus « fallait pas t’sentir harvesti d’une telle mission pour chuter si fort qu'on aurait cru un parpaing tombé du ciel, pour te r’monter l’moral, ça t’brouche pas de tester, comme Julien, le plan coke que j’ai dégoté ? »


12. Stupeur : « Tu vois quand tu veux... »

La proposition prit Antoine totalement au dépourvu. Jamais il n'aurait pus imaginer que Lilian, son co-équipier, son "frère" puisse oser lui soumettre une telle offre.

Toute sa jeunesse Antoine avait été élevé dans le respect d'une certaine morale et sa mère lui disait souvent : « un p'tit coup d'alcool de feuille d'érable pour se chauffer l'corps à jamais nuit à personne mais t'avise jamais de toucher à la drogue mon p'tit gars ».

Ces sages conseils revenaient à l'esprit d'Antoine alors qu'il répondait vivement et sous l'emprise de la colère à LIlian :

« Comment peux-tu te regarder dans un miroir après avoir ingurgité pareil saleté! n'as tu donc aucun amour propre ? Et les valeurs que nous défendons, qu'en fais tu ? »

Antoine s'apprêtait à partir dégoutté parce qu'il venait de découvrir quand Lilian répondis :

« Bah te fâches pas. Je te propose ça comme ça, tu veux qu'on aille aux putes plutôt ? »

La réponse d'Antoine ne tarda pas, tendue, directe, instinctive :

« Ah ben tu vois quand tu veux ! »

Et il partirent tous les deux vers les vieux quartiers de Québec bras dessus - bras dessous, soulagés d'avoir crevé l'abcès.

13. Où Enzo réapparaît...

Antoine réfléchit quelques secondes et désappointé accepta la proposition. Lui et Lilian s’isolèrent pour appeler le dealer surnommé « Papy » mais que dans le milieu, on nommait plus respectueusement « René la came ». Celui-ci donna rendez-vous aux gamins dans sa forêt préféré de l’ouest parisien où il aimait tant se faire remuer tel un habitué.

Ils prirent le métro, descendirent à porte Dauphine et marchèrent longtemps dans la forêt se faisant interpeller régulièrement par des dames à la voix rauque.

Au bout d’une heure, ils se décidèrent à interpeller l’une d’entre elles.

« M’dame, on vient voir M’sieur René » lui dirent-ils intimidés.

« Enzo, y’a des gosses qui cherchent le patron » cria-t-elle alors en direction des sous-bois.

Antoine cru qu’il devint fou quand il vit son frère aîné sortir des fourrés…….


13 bis. Vladivostok année zéro...

Alors le jeune Igor se réveille soudain, son corps lui rappelant les douloureux évènements de la veille.. Il avait assisté à la défaite de son équipe nationale dans un café du centre ville. La déception qui était la sienne l'avait incité à faire une marche dans les rues ensoleillées de sa ville natale. Jamais il n'aurait imaginé que de telles émeutes puissent avoir lieu. Observant la foule des visages torturés par la colère il se remémorait le superbe documentaire sur la victoire des bleus de 98 et, plus exactement, de cette scène d'anthologie montrant la philosophe français Emmanuel exprimant son désarroi face à toute la violence qui peut entourer le foot...

Ses souvenirs s'arrêtent là. Il devine sans peine que les évènements ont du s'enchaîner l'entraînant inexorablement vers les murs blancs de l'hôpital où il se réveille, l'esprit embrumé de ses rêves, le corps perclus de douleurs et le pied droit en moins...


14. Ce maudit chantage

...celui-ci, vêtu tout de cuir et portant lasso, ses cheveux coiffés et gominés comme ceux d'un danseur de tango, se retrouva désespéré en face du seul être qu'il ne voulait pas voir en ce moment précis. Il chercha un instant la solution miracle qui lui permettrait d'être à cent mille lieues sous les mers.

En effet, son petit frère adoré, footballeur et encore minot, encore innocent des choses de la vie, ne comprendrait jamais sa situation. Enzo sentit le vent de la révolte étreindre son cœur. S’il était là ce soir, dans cet accoutrement ridicule, c'était à cause d'un seul homme. Cet homme, le plus cruel de tous les hommes, lui faisait du chantage, à cause d'1 vieille affaire de mœurs commise dans sa jeunesse en la personne d'une c'chtite mineure brésilienne de 19 ans à peine, retrouvée dans un état proche de la folie à Lisbonne, éperdue et souffrant de faim et de soif après plusieurs jours de séquestration et qui impliquait sa femme Océane et les frères de celle-ci. Enzo était comme fou. D'un geste rageur, il envoya valser son lasso et dans un geste violent prit son frère par les épaules et dit : "C'est le big boss qui m'oblige à garder ses chèvres la nuit". 'toine n'était pas remis de sa terrible émotion. Il regardait son frère adoré d'un air hébété quand brusquement, il vit une apparition effrayante, une vision de cauchemar. Un corps long et maigre, un visage sombre, des yeux glauques et vitreux, reconnaissable entre tous. C'était... Pépé La Came...


15. Pépé, tes papiers !

Fiche d'identité : « Pépé La Came »

Nom : Lleys

Prénom : René

Age : inconnu mais certainement plus vieux que le petit Grégory

Activité : connue des Services de Polices

Lieu de naissance : faubourg de Buenos Aires près de la porte de Saint Clou, mais il y a encore quelques doutes.

Carrière chauffeur routier viré parce que trop maigrelet, se décida à devenir patron et instaura la première ligne directe Caracas - Buenos Aires – Québec – Bois de Boulogne par paquet de poissons panés dont l’auteur tait sciemment la marque pour ne pas payer d’amandes fraîches.

Tournant de Carrière : le transfert à Lyon des cendres de Champion (vainqueur du tournoi de tennis en salle du 15ème arrondissement en 1991), ce jour là même Pépé se décida à investir le réseau du trafic de flamme olympique en préparation des Jeux de Sydney. Sa tentative échoue lamentablement sur les rives d’un cargo brésilo-québecquois. Dès lors, il se mit à importer quelques désœuvrés au détriment desquels il se remplit les poches ce qui lui permit aussi de créer le premier élevage de chèvres prostituées du bois de Boulogne parce que c’est un ami de la nature tout de même.


16. Une véritable légende urbaine

Beaucoup de rumeurs et légendes urbaines étaient parvenues aux oreilles de notre jeune héros sur ce Pépé la came.. Certains prétendent qu'il hantait ce parc avant que le premier homme n'osa s'y aventurer.. D'autres que son apparence vieillie serait due à une série d'expérimentations qui auraient mal tourné et qu'il n'aurait que 36 ans… Parmi toutes ces rumeurs, une seule importait vraiment: La légende voulait que Pépé soumette toutes personnes le rencontrant à sa volonté en usant d'une technique hypnotique à base de pavés littéraires reliés plein peau…

17. Quelques escargots morts trop jeunes...

Au milieu de cette ambiance sordide, Tonio se mit à claquer des dents se cachant derrière ce grand échalas de Lillian. Les formes du bois aussi inquiétantes qu’un moule-frittes en Afrique du Nord faisaient sombrés le glorieux raté du jour dans une frayeur sans nom. Pépé la Came s’approcha lentement, lentement, écrasant dans un craquement sourd les cadavres gelés de quelques escargots morts trop jeunes. La communication fut difficile car interrompre le Pépé était aussi difficile que de dribbler Nesta pensait le petit Tonio aux yeux savamment éclaboussé par les postillons incessant du faux vieux. Enfin, Papy ponctua son discours par de brillants sonnets, une forme de poésie lente aronés qui voulait dire en quelque sorte « vous voulez quoi au juste, de l’amour, du pain, des jeux ou des chèvres ? »

18. Légère et généreusement échancrée... Amalia !!

...mais soudain, derrière Pépé la Came, qui voit-il ? Amalia!!!!! La petite Amalia!!!! Celle du bus de Buenos Aires, il y a déjà tellement longtemps. Le souvenir qu'il avait d'elle est bien le même. Oui c'est bien elle. Que fait-elle là en compagnie de ce sombre individu ? Amalia tenait les yeux baissés. Ah, pensa-t-il, elle est peut-être venue s'inscrire à Dauphine. Bien sûr se persuade-t-il ! En plein été? Ben oui alors. Oui c'est ça pensa 'toine et elle s'est perdue. C'est pourquoi elle était là, à 2 heures du matin, frissonnant dans sa trop courte robe de couleur criarde, légère et généreusement échancrée (NDLR : vous remarquerez que tous les préjugés sont soigneusement entretenus :-). Elle a dû vouloir demander son chemin et le hasard l'a fait tomber sur cet homme, ce roi sans royaume, qui régnait malgré tout sur ce territoire minuscule qu'est le bois de l'ouest de paris et où venait s'échouer toute la misère du monde. Emu, il enleva sa veste et la mit sur les épaules de la jeune fille qui le remercia d'un oeil humide et reconnaissant, qui le bouleversa.... il faillit en tomber et buta sur des crottes d'oiseaux éparpillés ça et là sur la terre enflée par l'humidité...

Enzo de son côté pensait à toute vitesse. Il fallait trouver une solution. Peut-être devrait-il téléphoner à M. Aulasson, président d'un petit club de footebale aux abords du rhaône et qu'il avait connu pendant cette triste période où il avait risqué la prison et dont Pépé la Came l'avait tiré... M. Aulasson n'était pas un philanthrope, loin s'en faut, mais la perspective d'avoir un joueur aussi bon que promettait de devenir le 'toine permettait de garder un espoir. Perdu dans ses pensées, il sursauta quand la main lourde de Pépé la Came s'abattit sur son épaule...


19. Enfin un peu d'action et d'effets spéciaux !!

Soudain la sublime Océane surgit d’une Cadillac garée en bord du chemin. Elle tenait à la main son célèbre rouleau à pâtisserie lance-roquettes que tous les services secrets de la planète lui enviaient. Elle jeta un regard noir à Enzo, visa Papy la Came, pris les enfants par la main (on dirait du Yves Duteil) et les conduisit avec toute l’infinie tendresse maternelle qui la caractérisait jusqu’à la Cadillac à l’intérieur de laquelle attendait vaillamment son mentor El Petitmalin qui démarra aussitôt en trombe. Enzo sauta alors sur son 103 SP et la poursuite s’engagea….


20. Poursuite

El malin conduisait vite et bien. Océane le rouleau de pâtisserie au-dessous de sa t^te lui criait d'aller encore + vite. Enzo se rapprochait... elle prit dans son sac du pain qu'elle émietta au fur et à mesure que la voiture bondissait dans les rues de la capitale déserte. Pourvu que la police nous retrouve pensa-t-elle. Soudain, à 1 carrefour, il sembla à el malin, qu'1 voiture tous feux éteints l'attendait. et l'espace d'1 seconde, il vit le terrible visage glabre et pâle de Pepe la came...


21. Le commissaire a deux problèmes…

Pendant ce temps-là, au quai des Orfèvres, le commissaire divisionnaire Jamel Attal essayait de faire le point sur les deux affaires qui l’occupaient depuis si longtemps.

D’abord, cela faisait maintenant deux ans qu’il tentait en vain de coincer un trafiquant notoire, René Leys dit « Papy la came ». Ce jeune retraité de 36 ans (il avait été Jésus dans une crèche de Noël et touchait depuis une pension) menait une vie en apparence paisible, et il lui avait été impossible jusque là de le coincer.

Attal pensait avoir trouver un nouvel angle d’attaque en la personne d’Enzo dit « El principe », son bras droit d’origine sud-américaine. Il cherchait activement un moyen de pression sur celui-ci afin qu’il lui balance son patron et que le commissaire puisse enfin partir en vacances tranquille avec sa secrétaire Julie Grémillon, dans un camp naturiste du Cap-d-Agde, où, par hasard il rencontrait souvent un petit malfrat qu’il avait fait coffrer lorsqu’il était inspecteur dans la région bordelaise.

Ensuite, il avait toujours sur les bras la disparition du petit Bast2, jeune garçonnet devenu célèbre par ses exploits de hacker (piratage de la base de données des photos de lingerie de La Redoute, programmeur présumé du logiciel d’intelligence artificielle Celtic 1.0). Un de ses informateurs toulousains venait de le mettre sur une piste : la mère du petit garçon, surnommée Resist à cause de sa faculté à résister à toute forme d’interrogatoires, serait affiliée au grand banditisme, par amour pour un chef de gang parisien. Il ne serait donc pas étonnant qu’un autre gangster ait enlevé le gosse pour faire chanter sa mère. Il ne restait plus qu’à trouver l’identité de l’autre malfrat…

Son intuition de flic lui soufflait que tout était lié, mais les pièces du puzzle refusaient de s’assembler. Il appela l’inspecteur Martini et ils décidèrent d’aller s’en jeter un p’tit, justement, de Martini…


22. Réveil glacial

Un seau d'eau glacée jeté en plein visage réveilla Océane. Elle s'aperçut alors qu'elle et son compagnon de fuite étaient solidement attachés sur des chaises de métal dont la froidure les pénétrait jusqu'aux os. Le visage du mallorquin, tuméfié , n'évoquait plus que le lointain souvenir de sa ressemblance avec la comtesse Dubarry de Bordeaux.

Le pépé se tenait là , assis en face d'elle , une tenaille à la main. « Les photos ! » Hurla-t-il dans un rugissement aronesque qui fit même tressaillir son fidèle homme de main , Gabisu de l'Estaque , surnommé le Tapie à Kalt-pattes. C'en était trop , elle s'évanouit pour la cinquième fois de la nuit.
Pendant ce temps là , (les apparitions du commissaire Attal commençaient toujours par « pendant ce temps là » depuis que son biographe et compagnon d'armes en Corée, le major F. s'était mis en tête de raconter ses aventures pour se faire quelques drachmes), pendant ce temps là, donc, le commissaire Attal appelait son Equipier corse, Doumé Rousseau, obscur plumitif à ses heures de loisirs, afin d'obtenir quelques éclaircissements sur la mafia marseillaise et son parrain, le redoutable ZZ-Le-Mat.

23. El Nancéien

Pendant ses rares moments de lucidité, Océane entendait des bribes de l’interrogatoire d’El M. Deux questions lancinantes semblaient obséder Papy : « Les photos ! » et « Où avez-vous planqué le gosse ? ». Comme on lui avait appris à l’école des Services Secrets des Commandos Girondins, et comme il avait pu, plus tard, le mettre en pratique pendant la guerre de Corée, où, capturé avec le Major F., il avait subi la question de ses geôliers dans les caves du Sheraton d’Incheon, El M avait enfoui ces informations capitales au plus profond de lui-même. Papy ne lui faisait pas plus peur que le spécialiste bulgare qui les avait alors cuisinés dans les sous-sols du palace. Il était bien décidé à tenir le plus longtemps possible, et pour ce faire, avoua à Papy tout ce qu’il avait de plus secret en lui, à l’exception des deux pépites qu’il gardait farouchement terrées dans les tréfonds de son âme. Tout y passa : El M commença par relater sa relation ambiguë avec le commissaire Attal dans un camp naturiste, puis il expliqua comment il avait toujours caché que son club préféré était en fait l’AS Nancy-Lorraine, il en arriva même à reconnaître que son souhait le plus cher était de devenir le spécialiste du Water-polo du journal l’Equipe… Toutes ces révélations ne firent bien entendu que décupler la colère du seigneur de la came…

24. Poker menteur

René, dit le Belge, ancien tuteur de ZZ avant sa succession sur la Canebière, décida alors de tenter un dernier coup de poker : il arracha le bâillon de Enzo qui gisait sur le sol dans une flaque de pétrole et lui proposa le marché le plus abominable qui soit : où il lâchait une allumette ( suédoise ) sur le sol, où le prince du vélodrome arrachait lui-même des aveux aux deux tourtereaux.

25. Intermède harvestien Disney Chanel pour nos jeunes lecteurs

C'est alors que dans un fracas épouvantable, la porte du loft explosa et que jaillit dans sa combinaison bleue et rouge, floquée du célèbre "SuperLeys", le vrai René, celui dont le mac du bois de Boulogne avait usurpé l'identité.

Il cassa la gueule de tous les malfrats présents et à venir et libéra les gentils héros, Océane, Enzo et El mallorquin.

Entra alors, resplendissante sous son auréole sacrée, Dame Resist qui n'était jamais loin quand le super-héros apparaissait.

26. Tentative de happy end prématuré voué à l'échec

De sa baguette magique , la belle transporta en ces lieux le jeune Antoine qui put ainsi retrouver ses amis.

27. Délires renéleysiens

Elle était comme ça Océane, quand ça n'allait pas elle rêvait. Le pouvoir qu'elle avait d'échapper à n'importe quelle situation désagréable par l'évanouissement ou l'imagination avait toujours étonné son compagnon. Elle avait sans doute hérité cette faculté de ses origines portugaises, et de l'immense capacité qu'a son peuple de s'évader par la mélancolie. Elle devait sans doute également ce trait de caractère si particulier à l'influence exercée sur sa personnalité par son nom. C'était en tout cas cette faculté qui lui avait permis de voir chez son amant un prince et des principes là où d'autres n'auraient même pas prêté un seul regard. Elle seule avait su déceler dans l’œil que Pépé lui avait laissé, les horizons lointains et la pureté qu'il avait jadis quitté, et surtout ses rêves à lui qui secrètement continuaient à le porter, malgré sa déchéance actuelle. C'est peut-être finalement ça qui les avait rapprochés, cette commune puissance onirique dont ils échangeaient chaque matin les abondantes et nocturnes moissons. Au moment du petit déjeuner, c'était toujours le même rituel, l'un après l'autre ils se racontaient tous les détails de la nuit. Après avoir déballé leur récolte sur la table, au milieu du musli et du pain complet bio de chez Monoprix (la vraie découverte de l'année selon l'ex-truand lyonnais), ils allaient consulter leur grand dictionnaire des rêves illustré, et ils les interprétaient. Ce matin là, malgré l'abondance des symboles, ils n'avaient pourtant rien vu venir...

Enzo connaissait donc bien les immenses pouvoirs se sa maîtresse. Mais cette fois ci Océane s'était surpassée. Imaginer en pleine séance d'inquisition que son tortionnaire était Super Sauveur qui allait les libérer, c'était encore plus extraordinaire que d'habitude. Enzo débâillonné et prostré dans un coin du mouroir, en était resté bouche bée d'admiration. Pour un peu il lui aurait refait la déclaration d'amour de leur 2ème rencontre du 12 juillet 1998. Il était comme ça l'enzo. Fallait pas le chauffer trop longtemps. Un vrai cœur d'artichaut. Mais alors qu'il s'apprêtait à déclamer sa flamme, Gabisu l'interrompit net d'un coup de pied fouetté en plein visage dont lui seul avait le secret. A la place des mots fleuris qu'il destinait à sa douce, ce sont 3 dents qu'Enzo cracha au visage du nervi marseillais. Fou de rage, celui-ci voulut frapper l'autre joue de son impertinente victime avec sa chaussure à crampons vissés droite, mais René l'en dissuada. Malgré les apparences, qui chez lui, comme à propos de son age, étaient souvent trompeuses, c'était un sage le Pépé. L'atmosphère de sa bibliothèque (Papy avait toujours besoin d'être entouré de livres pour interroger ses informateurs) avait beau être lourde, voire pesante, ce n'était pas une raison d'après lui pour céder à la colère et à la passion (et dieu sait que Gabisu n'en manquait pas). Il était là pour obtenir deux renseignements, et il les obtiendrait! Il calma son homme de pied en lui citant une fois plus cette belle phrase de Marie Curie-son idole-"on peut être brutal et malhonnête, et néanmoins sensible et rationnel".

Pépé n'en était pas à un paradoxe près. Le plus surprenant d'entre eux était peut-être son très surnaturel pouvoir hypnotique. Comme la petite Violine, une autre de ses idoles, il aimait en user et en abuser. A la fois pour séduire, et pour travailler. Ce qui n'était ni honnête, ni rationnel, mais très utile. Face à des adversaires aussi redoutables qu'Océane et Le Mallorquin, l'arme de ses yeux semblait le dernier recours. C'est pourquoi il n'avait pas hésité à l'employer contre la jeune portugaise. Rapidement hypnotisée par les fossettes et l'acuité de son regard sombre, Océane ne tarda pas à s'endormir. Et c'est dans cette 4ème dimension où l'avait plongé le David Copperfield de l'ouest parisien que la compagne d'Enzo prit son bourreau pour Jésus Christ. Ce rôle de composition lui allait bien car après avoir été, enfant, petit Jésus dans une crèche, il avait fait doublure du Christ dans une comédie musicale de Robert Hossein, puis avait posé (presque nu) pour des artistes fauchés peignant des faux renaissance italienne destinés à l'exportation en Arabie Saoudite. Trahi par un ami à 33 ans, ayant perdu sa confiance dans les hommes et la morale, il avait pris sa retraite de la vie honnête, et dit adieu aux belles valeurs. En se faisant passer pour SuperLeys aux yeux d'Océane, René souhaitait encourager la mère de famille à se confier, comme on le fait à un ami, ou au père noël. Et son deal subliminal était clair: je te fais le cadeau de te libérer si tu me communiques l'endroit où sont cachées les photos, et surtout où se trouve le fils de resist.

28. Réflexe sécuritaire

Mais avant de tomber sous le charme de René, Océane avait préparé ses arrières. Dans l'affolement général durant la poursuite, elle avait su conserver toute sa lucidité. Sans paniquer son esprit s'était souvenu du Petit Poucet, l'un des contes que lui racontait sa maman quand elle était ch'tite. Comme le héros de Charles Perrault, elle prit du pain, le rompit, et répandit des miettes sur l'asphalte dans l'espoir de laisser des traces de sa fuite qui attireraient l'attention de la police vers ses poursuivants. Elle qui aimait les symboles, et les signes ésotériques, manifestait par son geste un optimisme sur les capacités intellectuelles des policiers qui forçait l'admiration.

29. La dent dure

Soudain l'obscurité la plus totale envahi la pièce. Quelques cris, une exclamation de Pépé firent supposer le pire. Puis une flammèche et un grand brasier. Des suffocations, des bruits de coups et de douleurs puis plus rien.. Le silence.. Au dehors, une porte s'ouvrait laissant apparaître Enzo, Océane et El M, le visage encrassé de fumée..

Enzo avait conservé une de ses dents cassées par gabisu dans un recoin de sa joue gauche et, usant de la technique du cracha sur la pelouse qu'il avait peaufiné durant ses trois saisons sur le banc du FC Ajaccio, envoya le projectile sur l'ampoule du lustre.. Il s'était alors précipité sur Océane et El M afin de défaire leurs liens, pendant que pépé décidé de craquer une allumette afin de rétablir un peu de lumière. Mais les doigts perclus d'arthrose lui firent lâcher le bâtonnet embrasé qui tomba dans la flaque de pétrole.. Les souvenirs suivants sont flous, et nos trois héros ne se souviennent que d'avoir lutter contre la chaleur et la fumée afin de se frayer un chemin vers l'air pur de la capitale.

L'aventure semblait bel et bien terminée puisque nos héros ne voyaient pas par quel miracle leurs tortionnaires auraient pu réchapper d'un tel brasier.. Mais...


30. Où on l'entend parler du métamoteur Celtic01

Mais avant de tomber sous le charme de René la Came, Océane avait préparé ses arrières. Dans l'affolement général durant la poursuite, elle avait su conserver toute sa lucidité. Sans paniquer son esprit s'était souvenu du Petit Poucet, l'un des contes que lui racontait sa maman quand elle était ch'tite.

Comme le héros de Charles Perrault, elle avait pris du pain, l’avais rompu, et en avait répandu les miettes sur l'asphalte dans l'espoir de laisser des traces de sa fuite qui attireraient l'attention de la police vers ses poursuivants. Elle qui aimait les symboles, et les signes ésotériques, avait manifesté par son geste un optimisme sur les capacités intellectuelles des policiers qui forçait l'admiration ou…

…qui trahissait une incurable naïveté. C’était selon. Ce qu’on ne pouvait lui retirer c’était l’insondable intelligence de son cerveau tortueux. Car la complexité du message et des signifiants que celui-ci avait conçus en à peine quelques secondes, et malgré l’agitation avec laquelle ses neurones et ses synapses avaient été secoués durant la cavalcade, attestaient d’un géni certain. Qui avait peu de chance d’être compris par ses contemporains, mais là résidait aussi sa force. L’idée qu’Océane avait si rapidement échafaudée était d’adresser des Miettes de Pain, tel un Petit Poucet auquel elle s'identifiait facilement face à cet Ogre de rené, à l’attention vigilante de la Préfecture de Police, tout en prévenant le commissaire Attal de se méfier de l’inspecteur Pierre Martini. En langage plus mathématique la formule pouvait se lire ainsi : PP poursuivi par PéPé demande le secours de PP en lui envoyant de la MP pour lui faire comprendre (par l'inversion des lettres) que PM est un ripoux compromis et associé avec eux dans l’affaire de l’enlèvement du fils de resist, mais qu’il a décidé de les supprimer par peur d’être dénoncé au moment de leur arrestation.

Pour interpréter de pareils indices, la police n'était pas démunie. Elle possédait une machine infernale, mais fonctionnant au service du Bien et de la Loi. Ce robot intelligent, calculant mieux et plus vite que l'ensemble de ses concurrents, avait été inventé par un jeune prodige. Le nom de celui-ci avait été gardé secret par les services secrets jacobins par crainte d'un enlèvement de la part des Girondins qui enviaient ses performances. Mais alors que toutes les précautions avaient été prises par Jamel Attal pour protéger le génial créateur, malgré la body garde Julie Grémillon spécialement détachée près du corps du jeune éphèbe, Tatoo, appelons le ainsi pour l'instant, mais ça pourrait tout aussi bien être Bast2, fut quand même rapté par d'infâmes rançonneurs. Si la perte pour la Préfecture de Police avait été immense, car l'adolescent travaillait sur un programme d'évolution des capacités de Métamoteur; il restait toutefois au Commissaire Attal le 1er robot qu'il avait créé. Et c'est à celui-ci donc, Celtic 01, qu'il avait tout naturellement confié les quelques miettes que les pigeons parisiens avaient laissé aux enquêteurs...

31. Les merguez sont dans la couscoussière magique, je répète...

Dans un bruit de crépitement les disques durs et processeurs de Celtic 01 se mirent en branle.. De longues minutes s'écoulèrent durant lesquelles Jamel observa le ballet des diodes électro luminescentes en se répétant dans son fort intérieur : "mais quel bordel..."

Soudain, Celtic 01 se stoppa et dans un dernier hurlement électronique renvoya sa réponse : "les merguez sont dans la couscoussière magique".

Le commissaire dut lire à plusieurs reprises cet obscur message pour en comprendre toutes les subtilités. Après quelques secondes d'intense activité dans ses connections synaptiques le cheminement de ses réflexions le mena à la seule interprétation possible : "Quel con ce Tatoo! Mais que ce que tu veux que je fasse de ça! Et dire qu'on l'a payé en plus..."

32. Les deux cousins.

« Vite, il faut réfléchir, et trouver une solution. » se disait le commissaire Attal, tout en farfouillant dans le tiroir de son bureau pour en sortir sa flasque de Talisker, sous le regard désapprobateur de Julie Grémillon. Une longue lampée lui réveilla le cortex aussi sûrement que son réveil-radio-CD gonflé de Trash-metal.
« EUREKA ! Les cousins… »

Il faisait bien sur allusion aux cousins Olaf Grossebaf et Graham (Goudu) Rix, anciens flics de la police scientifique, à leurs heures perdues opérateurs émérites de Celtic 1.0. Ces cousins à la ressemblance gémellaire avaient été radiés pour de sombres histoires de marchandises confisquées et revendues, mais le commissaire les avaient toujours défendu.

Il commença par appeler Olaf, mais seul un répondeur répondit à son appel :


« Je suis absent pour quelques temps, ayant organisé une expédition pour prouve la possibilité de suivre le cours de l’Amazone en Drakkar. Veuillez laisser un message ou contacter le consulat du Danemark, poste restante, Brasilia ».

Plus qu’un seul espoir, Graham :

  • Graham, I need you…

  • Quel est ton problème ?

  • Y’a Celtic 1.0 qui déconne, il ne veut pas analyser des miettes de pain importantissimes pour la suite de mon enquête.

  • … (bruits d’aspiration, toux sèche de)

  • Graham ?

  • C’est simple Jamel, tu dois paramétrer la base de données de Celtic en lui expliquant que les miettes proviennent d’un quignon. Il adore les quignons !!!

33. Géopolitique du pire ou la tentative de décryptage piemesque du désastre en cours

Pendant ce temps là, le petit Tonio était parti à la recherche de Pépé la Came qui devait leur livrer amour, pains et jeux. Il tenta de convaincre le Lillian aux yeux vaporeux de prendre hébergement au camp de Loges, mais celui ci n’aimait pas les maçons. Dépourvus, les 2 éternels amis cherchaient des pistes, ils se devaient de retrouver le frère encuiré et le dealer essoufflé au plus vite car ils craignaient les mots de cœur du p’tit Toine et les maux de corps d’un Rubin toxico-dépendant.

A errer dans les rues, ils reprirent contacts avec leur racine auprès de l’ambassade canado-argentine subitement créée suite à la dissolution du pacte Mexico-sino-saoudien. Bien sûr, là, à leur grande surprise ils découvrirent qu’en cette période géopolitique troublée leur Etat double était devenu triple en s’alliant avec le Saint-Empire Israélo-Magrhebin. Cette alliance qui paraissait absurde à la fin du XXème siècle s’étaient pourtant conclu grâce aux mariages des fils de clones de l’Impératrice Franco-Belge mariée avec le Cousin germain du propriétaire du patté de maison entourant la tombe de Yasser-Arafat.

Après des heures passées à expliquer les fins maux de leur histoire, on les mit en contact avec un étrange agent quadruple appelé K14. Cet homme avait la particularité de posséder des facultés d’analyse doublée de motivation littéraire. Il fut condamné à une époque pour détournement poétique à devenir poète officiel de la Société des Etats-Empires-Nations Ouzbecko-chillienne ce qui lui donna des contacts dans l’ensemble du monde et lui permis de comprendre les enjeux internationaux, faculté unique et rare sur cette terre puisque personne n’y comprenait plus rien sauf les Inuits qui étaient s’informaient des événements par télépathie 12 ans avant qu’ils ne se produisent grâce aux déchets radioactifs déposés dans leur sous-sol.

K 14 après avoir mis une demi seconde à démêler toute cette sombre histoire se souvint qu’un jour il connut cette fée d’Océane aux photos dénonciatrices disparues. Mais, simultanément, il s’aperçut aussi qu’il fallait absolument ramener Tonio à sa mère…

34. See, sex and son

Ainsi reparamétré, Celtic 1.0 ne tarda pas à retrouver la forme. Il reconstitua le puzzle en à peine 3 minutes: selon lui il ne pouvait y avoir le moindre doute, les miettes de pain avaient bien été fabriquées à partir d'une farine de son...

Il ne lui fallut que 3 minutes supplémentaires pour sentir que ce pain au son avait été truffé au lars. Jamel en était resté le souffle coupé. Son robot avait reconstitué mentalement une boule de pain Larsson, un des plus rare du marché, que même le pain bio surgelé de chez Monoprix n'était jamais parvenu à surpasser. Mais il n'était pas encore arrivé au bout de ses surprises. En poursuivant ses calculs, Celtic 1.0 allait bientôt faire le lien entre son, son et sun.

Le robot mit en effet 3 autres longues minutes à comprendre que ces miettes étaient en fait un mince fil d'Ariane conduisant au fils ("son") de resist ("sun"). Superbe conclusion, néanmoins inutile. Toutes les miettes de la ville avaient été réquisitionnées pour les besoins de l'enquête, et ne pouvaient plus indiquer la moindre direction... Un vaste coup de balais qui avait exterminé tous les indices pouvant conduire à Pépé et aux ravisseurs, et dont le commissaire Attal, qu'on appelait pas pour rien Exterminator de site dans le milieu, n'était à cet instant pas très fier.

Il était temps murmura -t-il un tantinet fataliste, et las, mais alors las, de tout plaqué pour repartir avec Julie sur les plages naturistes du Cap d'Agde, et de se livrer avec elle à des séances interminables de jambes en l'air sur le sable fin, sous les cocotiers, et sur les rythmes endiablés d'une Marseillaise version reggae...

35. Les pensées de Julie

Julie Grémillon tourna la clé de contact de sa vieille Simca 1100, une antiquité automobile ramenée de ses dernières vacances en Hongrie et que son père, garagiste en retraite, s'acharnait à remettre en état tous les week-ends.

En voyant les miettes de pain dispersées sur le siège passager et un peu partout sur le sol, elle pensa aux futurs et inévitables reproches de son paternel, et à l'éternelle maladresse de Jamel... Tout à l'heure, il l'avait encore appelée pour lui proposer des vacances avec lui au Cap d'Agde, en insistant pour qu'elle l'accompagne, le grand tralala romantique habituel, à base de reggae torride sous les cocotiers, etc. Des cocotiers au Cap d'Agde, non mais quelle idée, et quel baratineur, cette attendrissante andouille ne changera donc jamais... C'est vraiment un commissaire hors normes, le Jamel. Le seul problème, c'est que l'inspecteur Pierre Martini lui avait également téléphoné un peu plus tôt dans l'après-midi pour l'inviter dans le Cap Corse... et que le brigadier Etienne Melvec avait renouvelé le matin même sa pressante invite à découvrir les joies de la thalassothérapie et des bars à chouchen dans sa Bretagne natale...

Il faudrait quand même que je fasse un peu le ménage dans cette voiture et dans ma vie privée, se dit-elle. Et puis après tout, qu'ils aillent tous les trois au diable, j'ai envie d'être peinarde, cette année je pars en solo dans les Caraïbes, j'ai besoin de respirer un peu l'air du grand large...

Au feu rouge, elle alluma la radio. De station en station, il n'y en avait que pour cette affaire d'enlèvement, les noms de René La Came, d'Océane, d'Enzo, de Gabisu le Terrible, d'El Mallorquin, du disparu, le petit Antoine, rebondissaient d'une onde à l'autre, scandés par les voix des journalistes débitant leur flash infos... "La police est sur les dents... on n'est toujours sans nouvelles de... ces individus déjà tristement célèbres..." D'un seul coup, elle repensa à Enzo, à ce trouble qu'il l'avait saisi lors de leur unique rencontre, cet interrogatoire de toute une nuit, il y a déjà plusieurs années, à la suite d'une sombre histoire de séquestration d'une jeune chanteuse à laquelle il n'était aucunement mêlé. Elle n'avait jamais pu totalement l'oublier. Il faudrait tout de même songer à régler cette affaire, sinon personne ne partira en vacances nulle part. Et puis, ce sera peut-être l'occasion de revoir enfin le ténébreux, "El Principe"...

36. Voyage éclair

...ténébreux mais trouble le Enzo pensa Julie. Faut faire gaffe. non non c'est pas le moment. Jamel, Pierre, Etienne, c'est toujours les mêmes se dit-elle. Elle se sentait épuisée et songea à rentrer se reposer afin d'avoir les idées + claires. Les clés à la main, elle avançait vers le hall quand 2 gorilles la ceinturèrent en plaquant 1 serviette sur sa bouche. Quand elle se réveilla, sur 1 plage des Antilles, elle ne se sentit pas dépaysée. Elle était étalée sur 1 transat blanc avec pour seul habit 1 minuscule bikini et se sentait super bien. Devant elle, 1 petite table ronde et 1 ti-punch frais comme elle les aimait.

Elle s'étira mollement et dit : « au diable le Toine et les affaires et vive le soleil ». Pas loin d'elle, se tenaient 3 types qui la regardaient bave aux lèvres et l’œil avide. Elle les reconnut immédiatement : Brouchaut qui aime Salentino, Piem le hobereau placide, Harvest le docteur folamour. Pas moyen d'échapper à sa vie d'agent secret. Mais avec eux au moins pas de danger immédiat. on allait voir ce qu'on allait voir...

37. Les états d'âme d'Enzo

Pendant ce temps dans la bibliothèque de Pépé la Came, l'interrogatoire se poursuivait avec une rare férocité. Sans davantage de succès pourtant pour les Torquemada de l'ouest parisien. La situation d'Enzo n'était pas des plus confortable. Outre le fait qu'il avait les mains attachés dans le dos et la bouche ensanglantée, il était l'amant et le confident onirique d'Océane, et souffrait à ce titre de voir la malheureuse ainsi violentée par celui qui de surcroît l'avait frappé la veille. En même temps il avait noué depuis des années des relations particulières avec René qui autrefois lui avait évité la prison, et qui l'avait sorti du ruisseau. Et même si l'ex-gaucho de la vaste pampa était devenu à cause de lui berger caprin pour promeneur noctambule du bois de Boulogne, il ressentait une dette ineffaçable à l'égard de celui qu'il prenait un peu pour un père spirituel, lui qui en avait tant manqué durant son enfance orpheline.

Mais c'était bien là le problème. Enzo savait bien qu'il ne pouvait pas toute sa vie demeurer dans l'ombre de ce protecteur si imposant, qu'il faudrait bien qu'un jour il se résolve si ce n'est à lui même enfanter, du moins à cesser de faire l'enfant, à devenir adulte, et à assumer à son tour un rôle de père. En revoyant son frère si innocent, et si menacé par le Caïd sino-ardennais, de devenir comme lui une épave sous l'emprise du mal, en l'entendant cauchemarder d'incompréhensibles délires géopolitiques, cette fibre paternelle s'était mise à vibrer en lui, accélérant dans son cerveau toutes ces pensées jusqu'alors trop confuses pour le pousser à réagir.

Prétextant avoir réfléchi à toute cette histoire, et surtout avoir choisi son camp, Enzo demanda à René de le libérer. Débâillonné et à moitié édenté, la parole aussi bavarde que son mentor, il entama avec lui un concours de postillons pour le convaincre de son bon foie. Pépé, bon perdant, se laissa attendrir par le seul être qu'avec resist, il était parvenu à aimer après la trahison de ses 33 ans. Enzo c'était sa petite faiblesse au Papy, celui qui le rattachait encore à la communauté des vivants, lui le cadavre ambulant, au visage lugubre et si proche des ténèbres. Il détacha le beau parleur, le prit dans ses bras, et le regarda droit dans les yeux en lui disant: si tu voulais Enzo, si tu voulais...

Enzo ne savait pas vraiment ce qu'il fallait vouloir. Peut-être que René faisait allusion à la carrière littéraire qu'il n'avait fait, comme d'hab, que rêver, alors que selon lui il avait le talent pour l'oser...

Mais trêve de sentiments. Il fallait maintenant agir vite. Pendant que la came était retourné aider resist et Gabisu qui s'acharnaient toujours avec leurs tenailles, ciseaux et autres fourchettes à escargots pour faire avouer Océane et El Mallorquin, Enzo essaya de chasser de son esprit le sentimentalisme mièvre avec lequel le vieux avait essayé de l'acheter. Il savait y faire l'ancêtre. Mais Enzo trouva la force car il ne s'agissait plus de lui, mais de son frère qu'il fallait à tout prix préserver des salissures du monde qui l'avait lui-même connu trop tôt. Il pensait à leur mère, et à Julie, la belle Julie, qui lui avait fait entrevoir une fois, lors d'un interrogatoire, grâce à l'échancrure d'un décolleté, les vertus de la générosité et de l'honnêteté.

Profitant d'un mouvement de torture particulièrement travaillé à l'entraînement, mobilisant trois joueurs, s'échangeant des pinces à épiler à une touche de balle dans des doubles une-deux millimétré, El Pricipé libéra Anto, Lillian et Amalia...


38. Un Girondin à la rescousse de la République

A paris, lasse et tendue, les yeux rougis par les insomnies resist ne voulait plus qu'1 chose revoir son fils. Tous les filets tendus par la police avaient échoué. Même Pepe la came, transformé par ses propres soins en héros planétaire avec cet immense S sur la poitrine rentra bredouille. Pourtant, il avait passé au peigne fin toutes les pistes. Son seul espoir tenait en un nom: Julie, la grande Julie Grémillon, agent secret de sa majesté chiraquienne et membre d'un mouvement d'extrême gauche, secret absolu qui l'obligeait à être en possession de toutes ses facultés jour et nuit. Mais depuis quelques jours, Julie semblait avoir disparu. Kidnappée. On avait retrouvé une serviette imbibée d'éther dans le hall de son immeuble. Jamel, Pierre, Etienne faisaient semblant de la chercher partout comme des fous, alors qu'avachis à longueur de journée, ils suçaient des sucettes à l'anis en s'engueulant sur le nom du prochain entraîneur de Red Star. Le téléphone sonna. Resist regarda le numéro affiché et respira : enfin el girondin sortait de sa réserve et était prêt, disait-il à aller à sa recherche, au péril de sa vie, pour sauver Julie, aider la république et retrouver toine...

39. De tétris à t'es triste

Pour Anto, le choc de l'enlèvement et celui de la vision de la déchéance où était tombé son frère avait été terrible. Mais pas autant que le double bonheur qu'il avait ressenti en le retrouvant, ainsi qu'en revoyant Amalia. Après avoir longtemps couru dans la forêt, les 3 fuyards s'arrêtèrent à une terrasse de Café pour refaire connaissance. Amalia commença par leur raconter son histoire depuis le bus jaune.

Lorsqu'elle était arrivée chez sa tante, elle s'était très vite aperçue que celle-ci travaillait dans la rue, mais pas dans un kiosque à journaux, et que son mari n'était pas professeur de chant, mais maître chanteur, et mac à ses heures perdues. Elle qui rêvait de devenir Maria Creuza, Maria Battania, et Astrud Gilberto fut alors happée par un réseau de traite des blanche latino-marseillais... qui la fit travailler à Paris sous le nom de Seine de Zaza la tigresse. Et c'est sur son lieu de travail que lui et Lillian Rubin l'avait découvert l'autre soir. En parlant de tout ça, Amalia ne put retenir une larme qui exprimait aussi un peu son bonheur de retrouver celui dont le visage angélique, qu'elle avait mémorisé depuis leur seule et inoubliable rencontre, lui avait permis de tenir aussi longtemps...

40. Et la lumière fut..

Jamel n'en pouvait plus.. La dernière conversation menée avec ses acolytes avait eut raison de ses nerfs. Entendre dire que Luis suçait beaucoup mieux que Johan l'avait exaspéré.. Il était parti faire un tour dégusté une savoureuse chupa chups en repensant aux méandres de cette affaire.. Le terme de Merguez lui rappelait une histoire qu'il avait suivit au début de sa carrière. Trois individus spécialisés dans le rapt de jeunes filles se faisaient appeler les merguez masquées. Personne n'avait jamais percé les raisons de ce ridicule surnom, mais les faits étaient là. Il se rappela alors que ces individus, aussi appelé Brouche, Piem et Harvest avaient pris leurs retraites sur une plage du nord Algérien dont la traduction française s'approche du chaudron aux miracles...

« Bon sang bleu mais c'est bien eurêka qui ne saurait mentir ! » s'écria le commissaire divisionnaire, qui avait la fâcheuse tendance de mélanger les expressions aux significations plus au moins proches... « Ces trois lascars ont du remettre ça! », « et même si ça ne semble avoir aucun rapport avec mon affaire, je ne peux pas rester les pouces croisés en me tournant les bras à rien faire ! »


41. Mappemonde intégrale de la République des dingues, tentative désespérée et vouée à l'échec de dresser un tableau général et synthétique de l'histoire en cours...

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