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Ateliers du Shôbôgenzô au Dojo Zen de Paris animés par Yoko Orimo


Kanji étudiés en octobre-novembre 2012

(Extraits des comptes-rendus de l'étude des textes Zazengi et Genjôkôan)

Ce fichier reprend ce qui concerne la langue japonaise et les kanji avec en début quelques clés.

L'étude des kanji de la 1ère séance est dans le fichier "Apprendre les kanji", ici les parties correspondent aux trois séances suivantes. En 1ère partie : précisions concernant la langue, lectures on et kun ; sansui, sanzen et sangaku : Shiryô, fushiryô et hishiryô ; Hô (dharma); Genjôkôan. En 2ème partie : jisetsu (moment favorable) ; ware ni-arazaru ("ne sont plus moi"). En 3ème partie : jô, jôju, mujô (impermanence), mu, fu, hi ; shô, shôji (samsâra), busshô.

Sauf exception il s'agit de la lecture on. L'indication [san/yama] donne les lectures on et kun.

Les tracés des kanji viennent du site http://www.romajidesu.com/kanji/%E7%A6%85

Vous avez les comptes-rendus complets sur le blog :  http://www.shobogenzo.eu

À la librairie japonaise Junku (18 rue des Pyramides, 75001 Paris) vous trouvez des manuels pour apprendre les kanji.

Christiane Marmèche

Clés et/ou caractères en composition dans un kanji

Do [do/tsuchi] terre

Getsu [getsu / tsuki] lune

moku [moku / ki] arbre : an 案 en bas on a 木 donc c'est du bois

moku [moku / me] œil : gen veut dire apparaître, dedans il y a l'œil 目

nichi [nichi /hi] soleil : [ji/toki] a pour radical 日 c'est le temps chronologique linéaire

nin[nin / hito] homme : ji a pour radical 人 veut dire « accueillir, servir ».

gen veut dire apparaître, en bas 儿 il y a l'homme

nyo[nyo/onna] femme : nin radical enceinte ;

an en haut il y a un toit avec en dessous une femme

san [san/yama] montagnes : tôge (kun) col (= montagne + monter et descendre)

shin le cœur. : go l'éveil, a pour clé 忄qui est la simplification du cœur

shi est composé de deux éléments, le cœur est en bas

soku [soku / ashi] pied

sui [sui/mizu] eau (et mer, rivières, fleuves, lacs etc.) dans le radical c'est l'eau 水stylisée
Autres clés (radicaux)

gen veut dire « apparaître… (la clé représente un joyau)

kyô {} sûtra (clé 糸 )

setsu couper (la clé représente des bambous)

sho multitude (la clé 言)

sûtra (la clé )

toku (la clé 彳)

zen (traditionnellement ) (la clé est un autel pour prier)

Première partie : extraits des CR du 20/10/2012 (fin Zazengi et Genjôkôan)

1°) Quelques points concernant la langue japonaise.

a) À propos de la langue sino-japonaise.

Les langues chinoise et japonaise sont des langues qui s'inscrivent essentiellement dans le contexte. La langue française est extrêmement rationnelle, bien construite, extrêmement claire. « Ce qui n'est pas clair n'est pas français » comme on dit. Le chinois et le japonais sont fondés sur le contexte c'est pourquoi lorsqu'il y a des éléments qui sont évidents pour les destinataires, qu'il s'agisse de l'oral ou de l'écrit, on omet, on supprime. Donc il y a des phrases qui, apparemment, ne contiennent pas de sujet ou pas de complément d'objet, ou…

b) Au plan grammatical et au plan syntaxique.

Les temps grammaticaux français sont extrêmement bien élaborés. Le chinois et le japonais sont à l'antipode. Il n'y a pas de futur à proprement parler sur le plan grammatical, on devine par le contexte s'il s'agit de présent ou de futur. Au niveau grammatical il n'y a que le passé et le présent.

Au niveau syntaxique le japonais diffère du chinois. En France, quand il y a quelque chose qui n'est pas facile à comprendre on dit que c'est du chinois. Mais sur le plan linguistique, tout de même, la langue chinoise est beaucoup plus proche des langues européennes, en ce sens que même si parfois c'est omis, d'abord il y a le sujet, et puis le verbe et ensuite le complément d'objet (direct ou indirect, circonstanciel etc.). Or ce n'est pas du tout le cas dans la langue japonaise. En japonais (et en allemand c'est pareil) le verbe est toujours à la fin de la phrase, et l'adverbe de la négation ou de l'affirmation est également à la fin. Ce qui veut dire que pour comprendre l'opinion de l'autre, il faut toujours écouter jusqu'à la fin. Si on coupe au milieu, on ne comprend rien du tout parce que le verbe n'est pas encore prononcé, ni « oui ou non ».On dit que les Japonais sont très disciplinés, très patients…. Mais les Japonais sont linguistiquement déjà conditionnés : il faut écouter jusqu'à la fin !

c) Au plan de la ponctuation et des paragraphes. Les différentes éditions modernes.

Vous avez tous le texte original en édition moderne. Je veux souligner cela parce qu'il y a la ponctuation quand même dedans. Vous avez deux signes de ponctuation : « o (manu) » qui correspond à notre point ; et « 、(ten) » qui correspond à notre virgule. Ce sont les éditeurs modernes qui les ont introduits. Dans le texte manuscrit, donc calligraphié, il n'y a pas de ponctuation et pas non plus de division du texte (alinéa, paragraphe).

Je vous ai apporté un livre où se trouvent des manuscrits calligraphiés par la main de maître Dôgen lui-même. La plupart des manuscrits sont perdus mais il y a des fragments écrits à l'encre de Chine qui restent et qui sont authentifiés comme étant vraiment de la main de maître Dôgen. Vous pouvez voir qu'il n'y a ni alinéa, ni paragraphe, ni ponctuation. Ça c'est vraiment le texte original des originaux. Ce qu'on vous a distribué c'est l'édition moderne.

Et actuellement il y a quatre ou cinq éditions modernes du Shôbôgenzô, parfois les différences sont minimes, mais parfois ça apporte de grandes différences de sens à cause de la différence de ponctuation. Donc avant même de comparer des traductions françaises il faut se mettre ça dans la tête pour comprendre d'où viennent ces différences. L'édition moderne que je vous fais lire c'est celle d'Okubo, c'est vraiment l'édition moderne fondamentale.

Tout à l'heure quelqu'un m'a dit qu'il y avait beaucoup de différence au niveau des traductions du même texte. Mais vraiment, traduire par exemple le Shôbôgenzô en langue européenne, c'est presque une création parce qu'il y a tellement d'éléments qui sont omis dans le texte initial…

P F : Question : en bas de la page de l'édition moderne il y a des caractères plus petits.

Y O : Ça s'appelle la collation. C'est Monsieur Okubo, un grand philologue, qui compare une dizaine de manuscrits calligraphiés. Et entre les manuscrits calligraphiés conservés dans divers temples, il y a des différences parce que comme les originaux ne sont pas forcément conservés, ce sont des copies, donc il y a toujours quelques différences. Et ces différences sont notées en bas.

2°) Lectures on et kun. Exemple du mot SANSUI 山水.

SANSUI 山水 est formé des deux caractères montagne et eau (le caractère de l'eau désigne aussi la mer, les rivières, les fleuves, les lacs etc.). Ce mot composé provient de la Chine.

Mais quand le premier caractère 山 est tout seul, les Japonais le prononcent yama et non san (c'est donc la lecture kun), par exemple le Fuji Yama c'est le mont Fuji.

Pour l'instant vous retenez ceci : quand le caractère sino-japonais apparaît tout seul c'est la lecture kun ; quand il y a des mots composés avec deux ou trois caractères sino-japonais c'est la lecture on.

À propos de ce mot sansui on peut faire une méditation. Pour l'asiatique il n'y avait pas d'abord le mot nature en tant que concept. Pour nous Français la nature est un mot en tant que concept, mais pour l'asiatique le mot nature n'existait pas mais c'était désigné par la montagne et l'eau : quand on dit sansui c'est la nature.

Ainsi certaines peintures chinoises à l'encre noire s'appellent sansuiga, le dernier caractère signifiant tableau, ça s'appelle tableau de l'eau et de la montagne c'est-à-dire tableau de la nature.

Et aussi dans le Shôbôgenzô il y a un texte qui s'appelle sansuikyô 山水 経 que je traduis ainsi : « les montagnes et les rivières comme sûtra », ça veut dire « le sûtra de la nature ».

2°) La pratique [sanzen 参禅] et l'étude [sangaku 参学]

La dernière fois j'ai dit : « Chez maître Dôgen la pratique [sanzen 参禅] et l'étude [sangaku 参学] ne font qu'un » et ces deux termes sanzen et sangaku sont en tandem.

– Le mot san est un caractère qui souligne la dimension collective. En tant que verbe il veut dire : « participer, se mêler, se rendre, se rencontrer », également il a le sens d'aller.

Examinons le caractère san 参. C'est un idéogramme qui représente une dame bien coiffée avec trois épingles à cheveux décoratifs, parce que pour se rendre quelque part il faut un peu se parer, c'est une conduite féminine.

– Le mot zen 禅 nous l'avons vu la dernière fois. Donc quand on emploie le terme sanzen il ne s'agit pas de zazen [zazen 坐禅] qui est le zen pratiqué tout seul dans l'ermitage, mais il s'agit de la méditation assise apprise dans la communauté (sangha) avec un ami de bien (un bon maître).

– Le mot gaku est un idéogramme composé de trois éléments :

- le signe冖représente un toit donc la maison ;

- en haut ce sont des mains de deux personnes différentes qui se croisent comme le donner et de recevoir ;

- en bas 子 ce qu'il y a dedans c'est un enfant.



Explication trouvée sur le site webloginjapan.com et très légèrement différente

Donc grosso modo c'est une école : il y a la maison, l'enfant et l'acte donne de donner et de recevoir. Ceci est le sens initial de ce caractère gaku qui signifie "étudier". Et dans sangaku les deux caractères ne font qu'un.

Faute de mieux je traduis sanzen par la pratique de la méditation assise, et sangaku par l'étude, mais l'étude dans un sens collectif.

- sanzen c'est ce que vous faites avec les autres, pas tout seul.

- sangaku c'est l'étude qui fait tandem avec cette méditation assise.

Pour maître Dôgen les deux ne font qu'un.

Le tracé de zen 禅 a été vu la dernière fois.

Voici le tracé de sangaku : à gauche la clé (le radical) donne le sens général du kanji

san

gaku

3°) Shiryô, fushiryô et hishiryô.

On a vu dans le Zazengi les mots shiryô 思量 (pensée), fushiryô 不思量 (non-pensée), hishiryô 非思量 (ce qui n'est pas de l'ordre de la pensée). C'est un lieu de méditation important.

a) Les deux caractères shi et ryô.

Shi veut dire penser, mais vous allez voir la différence avec le verbe français penser. C'est un idéogramme composé :

- la partie du haut est un idéogramme qui représente une petite tête de bébé (c'est petit)

- la partie du bas est un idéogramme qui représente le cœur en tant qu'organe

Donc les Chinois pensaient déjà avec la tête et avec le cœur. On traduit shi par le verbe "penser" ou par le substantif "la pensée" mais le sens précis de ce caractère est entre penser et croire parce qu'il y a le cœur.

► Est-ce que le shi qui est là a un rapport avec le shin qu'on traduit souvent par cœur-esprit ?

Y O : Oui, shin c'est la partie basse du shi .

Beaucoup de traducteurs européens traduisent cette partie qui représente le cœur en tant qu'organe, par le mot "esprit" à cause de l'étymologie sanskrite citta. Mais pour l'écriture sino-japonaise c'est vraiment le cœur, et moi je traduis par le cœur (mais c'est une autre affaire, ça va compliquer les choses si je vous explique).

Ryô est un idéogramme également composé :

- la partie du haut 日 est un idéogramme qui représente des céréales

- la partie du bas 里 est un idéogramme qui représente une balance

Donc avec la balance on mesure des céréales, d'où le sens de mesurer.

shi :

ryô :

b) Le mot shiryô.

Ainsi shiryô veut dire « penser, croire et mesurer » ou bien « on pense, on croit pour mesurer » parce qu'il y a la balance avec les céréales.

Souvent dans le texte du Shôbôgenzô on a ce caractère ryô (mesurer). Et dans la doctrine bouddhique, même dans le sens général du terme, shiryô a une légère nuance péjorative parce qu'on mesure ce qui n'est pas en soi mesurable. C'est pourquoi souvent je traduis par « la pensée analytique » parce qu'on mesure. On mesure ce qui n'est pas mesurable en soi : par exemple on mesure l'énergie alors que l'énergie en réalité c'est quelque chose d'insaisissable.

c) Le mot fushiryô.

L'étymologie de fu

c'est un idéogramme qui représente un bouton de fleur (un bouton d'une fleur qui n'a pas encore éclos)

Fu c'est un adverbe de négation mais qui indique l'absence de quelque chose.

On a vu funi

(non-deux), c'est l'absence de deux, c'est donc le non-dualisme.

Par ailleurs dans fuzai 不在 le caractère 在 signifie "être là" donc fuzai signifie absence

De même pour funin

妊 : dans nin la clé qui est à gauche est le caractère de la femme stylisée et le côté droit (qui est le corps du caractère nin) donne la prononciation. Nin ça veut dire être enceinte, donc funin c'est l'absence de la conception, c'est la stérilité.

C'est pour bien distinguer que je donne ces précisions car il y a beaucoup de confusion au niveau de la compréhension de ces mots.

Donc fushiryô c'est l'absence de la pensée analytique, c'est le non-penser.

fu :

d) Le mot hishiryô.

Le caractère hi est un idéogramme qui représente deux ailes d'un oiseau qui s'écartent. Donc le sens étymologique de hi c'est « écarter, s'écarter ».

C'est pour cela qu'on ne peut pas traduire hishiryô par « au-delà de la pensée » puisque d'après l'étymologique on écarte la pensée (qui est la pensée analytique comme on a vu). C'est pour ça que je traduis par « ce qui n'est pas de l'ordre de la pensée ».

C'est très simple à écrire, vous voyez qu'il y a des plumes.

hi :

4°) Hô (ou Bô)

Maintenant dans l'écriture sino-japonaise, sur le plan doctrinal, on a introduit le terme (en chinois ça se prononce différemment).

a) Forme initiale 灋.

J'écris d'abord ce caractère dans la forme initiale qui est très compliquée : 灋

- il y a un radical qui concerne l'eau. Vous avez appris le kanji de l'eau 水 et ici c'est stylisé. Il y a beaucoup de caractères qui comportent ce radical (cette clé). Il s'agit de l'eau et ça peut être la mer, la rivière etc. Tous les caractères qui concernent l'eau s'écrivent avec ce radical.

- Dans le deuxième morceau une partie représente un animal mythique moitié cerf moitié cheval, c'est la combinaison de deux caractères ; et l'autre partie est un idéogramme qui veut dire "renfermer".

Donc d'après son étymologie, ce caractère sino-japonais voulait dire : un animal mythique moitié cerf / moitié cheval est renfermé dans une petite île au milieu de l'eau. Cet animal peut apprécier pleinement tout ce que la vie lui donne tant qu'il ne sort pas de cette île (il est enfermé), mais du moment qu'il sort de l'île il doit mourir.

C'est ça le sens étymologique de la loi et c'est très parlant : la loi c'est une contrainte, mais c'est aussi la source de la liberté. C'est comme le code de la route : tant qu'on le respecte tout le monde a la liberté de circuler, mais ça n'empêche pas que ce soit une contrainte.

Et l'animal est content, il est très heureux dans son île. C'est-à-dire que la loi est une contrainte mais qu'elle est utile pour la liberté.

b) Forme simplifiée.

On va écrire la forme simplifiée. En effet, la forme initiale est tellement compliquée qu'on l’a stylisé et dans la simplification on n'a pas repris tous les éléments.

Donc ce mot comme le mot dharma veut dire à la fois la loi, les existants, la méthode, l'enseignement, la règle, la convention, tout ça. C'est polysémique.

Vous allez voir dans le Genjôkôan les différentes traductions.

Le tracé de :

Shohô諸法 désigne la multitude des existants (法 c'est le dharma) : donc c'est nous-mêmes en tant que phénomènes.

Buppô 仏法 désigne la loi de l'Éveillé : le 2ème caractère est hô (pô) qui est le dharma, c'est la même chose que dans shohô. Simplement dans buppô c'est de l'ordre de l'un (la loi) alors que dans shohô c'est de l'ordre du multiple (les existants).

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°) Le titre 現成公案 Genjôkôan

  1. Le terme 公案 kôan est un terme paradoxal :

Ko 公 Ça veut dire public. En effet c'est un idéogramme composé. Le haut signifie l'ouverture et le reste c'est les bras qui tiennent quelque chose, donc ça désigne "le mien". D'où c'est public puisque « j'ouvre le mien vers les autres ».



– et le caractère an donne le son et donne la signification. Il est composé de trois parties.

- en haut 宀 ça désigne un toit donc ça désigne la maison, et en dessous 女 c'est une femme donc ça représente la maison dans laquelle il y a une femme (en l'occurrence l'épouse), et quand il y a l'épouse à la maison, c'est la paix, l'assurance (c'est gentil pour la femme)

- en bas le troisième élément représente un arbre 木 donc c'est du bois, ici ça représente une table (ou un bureau) pour travailler.



On a donc ces éléments : la femme et le toit (donc une femme qui est à la maison) ; et la femme ou l'homme est devant la table et dans la paix on réfléchit. Donc an veut dire "réfléchir" en tant que verbe et "idée" en tant que substantif (dans le sens de : devant le bureau je réfléchis et j'ai une idée).

Ici donc an est le domaine particulier, personnel alors que c'est public.

b) Le terme GENJÔ 現成 est également un terme paradoxal parce que

– le premier caractère GEN veut dire « apparaître, se présenter, présenter » et en tant que substantif, « (le) présent, la manifestation ».

c'est un idéogramme composé : la première partie est la clé 玉 , ça représente un joyau,

là 目 il y a l'œil que vous connaissez déjà

et là en bas 儿 il y a l'homme.

Donc l'homme voit un joyau apparaître, se présenter.



– JÔ est lui aussi un idéogramme composé : là ce sont deux outils avec lesquels on travaille, et le sens de c'est façonner et réaliser, se réaliser ; donc quelque chose qui est vraiment constitutif, qui englobe la réalité intérieure.



Donc le premier caractère GEN c'est l'apparence au niveau de la surface et c'est la réalisation intérieure. Le terme genjô 現成 signifie donc le fait que quelque chose se présente en ce moment devant nos yeux en raison même de la réalisation intérieure de soi.

Deuxième partie : extraits des CR du 17/11/2012 (Genjôkôan)

Le caractère shô c'est "vrai" et dans la langue sino-japonaise l'inverse de vrai ce n'est pas "faux" parce que le faux peut très bien faire l'unité avec le vrai pour le véritable vrai. Et donc l'inverse du vrai c'est 邪 ja qui signifie "tordu" : étymologiquement c'est ce qui n'entre pas quand on fait le meuble et qu'on veut faire un assemblage car quand c'est tordu, ça n'entre pas. Donc 邪 ja c'est quelque chose ou quelqu'un qui n'entre pas dans le mouvement et c'est opposé au vrai. Le vrai c'est 正 shô (le shô de shôbô-genzô : la "vraie" loi). Donc dans la langue sino-japonaise le vrai ne s'oppose pas toujours au faux, ça dépend du contexte

1°) Le terme jisetsu 時節.

時節 Jisetsu est composé de deux caractères sino-japonais ji et setsu en lecture on. Pour ces deux caractères indépendants, il vaut la peine que vous reteniez la lecture kun.

[ji/toki] : ce caractère désigne le plus souvent le temps, mais le temps chronologique linéaire qui paraît s'écouler horizontalement. Il désigne aussi le moment comme « bonne occasion » et même la saison. Parfois il est employé (surtout par les japonais) comme conjonction de coordination quand on veut changer de propos : « toki ni » correspond au « or » français.

Nous allons voir à quel point les deux caractères ji et setsu sont contradictoires, c'est l'unité d'une contradiction. C'est un peu un oxymore.

Premier caractère : [ji/toki]

– 日 est le radical (la clef), c'est le soleil. Dès qu'il y a ce radical ça concerne le soleil.

– l'autre côté 寺, ce qui fait le corps du caractère, est un idéogramme composé de deux éléments : en haut 土 cela représente initialement une main et en bas 寸 cela représente un pied.

Donc le sens initial du corps du caractère 寺 comme il y a deux pieds et deux mains, c'est « travailler, avancer ».

D'où le caractère [ji/toki] puisqu'il y a "le soleil" et "avancer", c'est le temps chronologique.

Par ailleurs 寺 [ji/tera] c'est le temple ou le monastère. La lecture de ce caractère 寺 est ji en lecture on et tera en lecture kun, mais attention, quand on transcrit la prononciation japonaise avec le système Hepburn, il y a des "R", et les français prononcent "téra", mais en langue japonaise le "R" n'existe pas, donc tout en écrivant tera il vaut mieux prononcer "téla".

Comme je vous l'ai expliqué à la première séance c'est le corps du caractère qui donne à la fois le son et la signification. Je vais vous expliquer pourquoi le corps du caractère qui au départ donc signifie « travailler avec les mains et les pieds » en est venu à signifier « le temple, le monastère ».

Tout d'abord ce même corps de caractère quand on lui ajoute le radical homme 人, se prononce aussi ji et alors ce caractère 侍 veut dire « accueillir, servir ».

Or à l'époque de la dynastie des Han en Chine, les Chinois ont accueilli des moines bouddhistes qui venaient d'Inde dans une maison d'accueil gouvernemental. Et l'une des maisons représentatives de cet accueil que les Chinois ont fait pour les moines indiens s'appelait Kôroji avec ce sens d'accueillir, de servir les moines. C'est pourquoi l'étymologie du temple c'est la maison d'accueil avec le son ji.

Tracé de 時 [ji/toki] :

P F : Et normalement on trouve ce caractère 寺 [ji/tera] sur le fronton du Dojo. Ici c'est le « Parisan bukkoku zenji » (Dojo zen de Paris), donc ce caractère doit se trouver quelque part sur la façade, il faudra regarder en sortant.

Y O : Et pour le caractère [ji/toki], je vous ai dit, il y a l'horizontalité, c'est le temps chronologique qui s'écoule : ––––––––––––––––––––––>

Deuxième caractère : [setsu/fushi] : setsu (on) fushi (kun).

Initialement c'est un idéogramme composé qui représente un nœud de bambou. Or quand vous voyez un bambou il y a beaucoup de nœuds, d'où les sens figurés : la mélodie, la cadence, la section, la coupure… Tout ce qui est coupé, cadencé c'est [setsu/fushi]. On coupe quelque chose verticalement, comme le nœud de bambou.

Regardons le caractère :

– en haut 竹 c'est la clé, ça représente des bambous ;

– en bas艮卩 c'est un idéogramme également qui représente un homme agenouillé en train de plier les genoux. Le sens important c'est « plier » dans le sens de « couper, sectionner ».



c) L'ensemble des deux caractères :

D'où par rapport au temps ji : ––––––––|––––––––––––––>

on a le mouvement de setsu : couper.

Donc le sens profond de jisetsu c'est : on tranche, on divise ce qui n'est pas divisible à savoir le temps chronologique qui s'écoule. Et ça ce n'est pas seulement chez Dôgen (mais c'est particulièrement chez lui) : le temps chronologique avance non pas d'une manière lisse comme une ligne, mais d'une manière pointillée.

Vous connaissez mieux que moi les claquoirs quand vous faites zazen. C'est le tac, tac, tac, tac tac tac… que vous entendez en zazen, ça c'est le son de jisetsu. Le temps n'est pas divisible mais on coupe pour qu'on soit vraiment conscients d'être ici et maintenant.

Ici et maintenant c'est précisément à la croisée de l'horizontale et de la verticale ––|–– , du temporel et de l'atemporel. C'est le sens même de l'existence telle qu'elle est conçue chez maître Dôgen. Chaque instant de notre existence se trace en pointillés (tac tac tac…) et chaque instant a sa valeur absolue et sa plénitude, c'est ça le jisetsu. La cadence, la mélodie ou bien la section qui intervient, le moment même d'altérité (nous allons voir ça tout à l'heure) intervient. Sinon on se lasse, tandis que « tac.. » on est ici et maintenant, la colonne vertébrale toute droite !

2°) Traduction de ware ni arazaru (2ème verset du Genjôkôan)

Prenons ce qui a été mis sur le blog dans les comptes-rendus d'ateliers en 02/c :

法 とも に わ れ に あら ざる 時 節、

BAN-PÔ TOMONI WARE NI ARA ZARU JI-SETSU,

10 000 existants tous ensemble moi (cf explications) moment favorable

Voyez ici à quel point la langue française et la langue japonaise fonctionnent à l'inverse : on commence en français par « le moment favorable (jisetsu) » mais en japonais il est tout à la fin.

a) La particule NI. Le mot あらARA.

L'important c'est le NI de NI-ARAZARU. J'ai vérifié sur le dictionnaire de japonais classique tout à fait spécialisé, rien que pour notre particule NI on compte au total six fonctions différentes, et chaque fonction comporte 18 cas, cinq cas, 2 cas... : au total on compte 30 cas de figures grammaticales différentes pour ce NI.

Le mot あらara (qui est une forme indéterminée de ありari) a le sens de « il y a » ou bien il désigne la copule « être » et ざるzaru correspond ici à l’adverbe de négation.

Ce que j'ai fait dans mes traductions précédentes (avec la majorité des autres traducteurs européens) pour le Genjôkôan, c'est de prendre NI comme équivalent de la proposition française "dans", "en", "à" d'où ma traduction « les dix mille existants ne sont plus en moi ».

Mais il y a d'autres possibilités d'interprétation du NI d'où la complication.

b) Deux interprétations possibles.

En ce qui concerne ce passage du Genjôkôan il y a donc deux possibilités d'interprétation :

– si on interprète le NI comme l'équivalent d'une préposition, on traduit par « Au moment favorable où les 10 000 existants tous ensemble ne sont plus à moi (ou "en moi") » ; et "ne sont pas à moi" correspond à " n'appartiennent pas à moi"

– mais on peut interpréter le NI comme faisant partie de la déclinaison de la copule "être" et alors cela donne : « Au moment favorable où les 10 000 existants tous ensemble ne sont plus moi ».

Donc ça peut être soit la négation de l'appartenance, soit la négation de l'être.

Dans mes livres j'ai choisi la première interprétation et depuis j'ai réfléchi et je garde maintenant la deuxième traduction.

3°) Un mot du sixième patriarche :

Je vais vous citer une parole du sixième patriarche Enô qui a dit à son disciple Ejô :
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