Chapitre 2 – La monnaie et le financement de l’économie








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Chapitre 2 – La monnaie et le financement de l’économie


  1. La monnaie dans les théories économiques




    1. La masse monétaire en circulation dépend-elle de l’offre ou de la demande de monnaie ?


Document 1 : d’où part la dynamique de la création de monnaie ?

Il existe un débat scientifique quant à l’importance relative qu’occupe la Banque centrale dans le processus de création monétaire et, par extension, quant à son pouvoir effectif de contrôle de l’évolution de la masse monétaire. Ce débat s’appuie sur deux acquis importants qui font l’objet d’un consensus au sein de la communauté des économistes :

  • ce sont les banques de second rang, et non la banque centrale, qui créent l’essentiel de la monnaie en circulation dans l’économie (…) ;

  • la banque centrale dispose d’un pouvoir d’intervention indirect sur les créances monétisées. En utilisant les instruments de la politique monétaire conventionnelle et non conventionnelle, la banque centrale régule la création monétaire en articulant contrôle et incitation.

La question porte sur le caractère premier ou second de la Banque centrale par rapport aux banques de second rang dans le processus de création monétaire. Les économistes disposent pour cela de deux modèles explicatifs : le multiplicateur de crédit et le diviseur de crédit.

Source : Alain Beitone et Christophe Rodrigues Economie monétaire, A.Colin, 2017, p.106


      1. Monnaie exogène et approche du multiplicateur de crédit


Document 2 : La conception exogène de la monnaie

La formule « helicopter Ben » (et le dessin humoristique associé) pour désigner Ben Bernanke, alors président du conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale des Etats-Unis, illustrent bien la conception de la monnaie exogène. La monnaie serait, dans cette perspective, soit le résultat des découvertes d’or (au temps de l’étalon-or), soit le fait de la décision de la banque centrale : elle aurait son origine à l’extérieur de l’économie. Dans cette perspective défendue par de nombreux économistes, de David Ricardo à Milton Friedman en passant par Jacques Rueff, ce qui importe, c’est la quantité de monnaie.

Cette approche correspond aux thèses de la Currency School qui aboutissent à la réforme monétaire de 1844 en Grande Bretagne (Bank Charter Act ou Peel’s Act). Celle-ci limite la création de monnaie en subordonnant toute émission supplémentaire de billets à une couverture en or à 100 %. Dans cette approche quantitativiste, il faut soit imposer une contrainte métallique stricte grâce à l’étalon-or (Jacques Rueff), soit imposer une règle intangible à la banque centrale en matière de création monétaire (c’est la fameuse « règle des k % » de Milton Friedman).

En se fondant sur le mécanisme du multiplicateur de crédit, les tenants de la théorie de la monnaie exogène considèrent qu’il suffit de contrôler la quantité de monnaie centrale pour contrôler l’ensemble de la création de monnaie par le système bancaire.

Alain Beitone, « La monnaie dans les théories économiques » in Cahiers Français Hors Série n°7, Janvier 2015, p.80-81
Document 3 : L’approche du multiplicateur de crédit

La quantité de monnaie (au sens strict, billets et dépôt) mise en circulation par l’ensemble du secteur bancaire est un multiple de la base monétaire (billets + dépôts des banques en monnaie centrale) créée par la banque centrale. C’est ce que met en lumière le modèle du multiplicateur.

Considérons un secteur bancaire constitué de n banques, où la banque centrale impose un taux de réserves obligatoires de 20%. La première banque détient auprès de la banque centrale 1000 de réserves. Il lui faudra maintenir en permanence sur son compte en monnaie centrale 200 de réserves obligatoires et pourra donc accorder avec le reste 800 de crédits, créant ainsi 800 de dépôts. Les 800 de dépôts ne tarderont pas à circuler. Ils serviront à régler un achat dont le bénéficiaire possède un compte dans la deuxième banque. Cette dernière enregistre alors 800 de dépôts supplémentaires et devra constituer 160 de réserves obligatoires auprès de la banque centrale. Ainsi disposera-t-elle de 640 de liquidités disponibles pour octroyer un crédit. Une fois ce crédit accordé, 640 de monnaie supplémentaire auront été créés. Ces 640 vont circuler jusqu’au compte du client d’une troisième banque. La troisième banque enregistrera une augmentation de 640 du compte de dépôt de son client, constituera 128 de réserves obligatoires et pourra octroyer 512 de crédits, et ainsi de suite. Au total, il sera créé dans cet exemple cinq fois plus (multiplicateur) de monnaie qu’il n’y avait de réserves au départ. Le montant total de monnaie créée (ici 5 000) à partir de la réserve initiale de 1 000 euros est le résultat d’une suite mathématique. Le multiplicateur de crédit a alors pour valeur (1-r) / r avec r = le taux de réserves obligatoires.

Notre exemple a réduit au maximum les « fuites » de liquidité qui limitent la création monétaire des banques. Aux fuites dites institutionnelles (réserves obligatoires), il faut ajouter celles dites « autonomes » (retrait de billets et paiements interbancaires). Sous l’hypothèse que ces fuites soient simples à prévoir (la préférence pour les billets représente une fraction connue et stable des dépôts, de même que les réserves excédentaires pour régler les paiements interbancaires). (…) la masse monétaire (au sens strict) est un multiple de la base monétaire, d’autant plus grand que les fuites contraignant les banques à restaurer leur liquidité sont faibles.

Jézabel Couppey-Soubeyran, Monnaie, banques, finance, collection Licence, PUF, 2ème édition, 2012
Document 4 : lien entre monnaie exogène, multiplicateur et théories quantitative et monétariste de la monnaie

Ce modèle du multiplicateur de crédit a comme avantage de mettre en évidence la fonction régulatrice de la banque centrale : les banques de second rang créent de la monnaie, mais leur activité est subordonnée au contrôle de la banque centrale. Ce modèle est cohérent avec la théorie quantitative de la monnaie et avec la conception monétariste de la politique monétaire : la monnaie centrale est qualifiée de base monétaire, c’est une « monnaie à haute puissance » (high powered money) qui conditionne la création de monnaie par les banques de second rang

Source : Alain Beitone et Christophe Rodrigues Economie monétaire, A.Colin, 2017, p.106


      1. Monnaie endogène et approche du diviseur de crédit


Document 5 : la conception endogène de la monnaie

A l’inverse, les conceptions de la monnaie endogène considèrent que ce qui est premier est le crédit accordé par les banques aux entreprises qui souhaitent financer leur production. Dans ses travaux postérieurs à la Théorie générale, Keynes intègre cet aspect à travers le « motif de finance » dans l’analyse de la demande de monnaie. C’est grâce à l’impulsion que constitue la création de monnaie que les entreprises vont pouvoir produire et distribuer des revenus, qui vont alimenter une demande adressée à l’économie (débouchés pour la production). Au total, les entreprises, à partir des produits de la vente, vont pouvoir rembourser le crédit initial. Il s’agit d’une analyse en termes de flux : la monnaie est considérée comme une dette et la dynamique de l’économie est assurée par la succession des opérations de création et de destruction de monnaie. Cette approche est déjà formulée par la Banking School au 19ème siècle. Les auteurs de ce courant, notamment Thomas Tooke, considèrent que l’inflation a des causes réelles plutôt que monétaire et mettent en avant la « loi du reflux » en vertu de laquelle toute monnaie créée (et injectée dans le circuit économique) finit par revenir dans les banques au moment du remboursement. Ce qui importe donc, c’est la qualité de la monnaie (plutôt que sa quantité), c’est-à-dire la solvabilité des agents auxquels les banques accordent des crédits. De plus, on considère que les banques commencent par accorder des crédits et se préoccupent ensuite d’assurer leur liquidité en se procurant la monnaie centrale nécessaire aux règlements interbancaires. La création de monnaie doit être pensée en termes de diviseur de crédit. La conception endogène de la monnaie est défendue par les post-keynésiens (N. Kaldor, J. Robinson, M. Lavoie, H. Minsky, etc.), les « circuitistes » français (A. Parguez, F. Poulon, etc.), les régulationnistes (M. Aglietta, R. Boyer, etc.) et les conventionnalistes (A. Orélan, etc.).

Alain Beitone, « La monnaie dans les théories économiques » in Cahiers Français Hors Série n°7, Janvier 2015, p.80-81
Document 6 : L’approche du diviseur de crédit

Le mécanisme du multiplicateur fait de la masse monétaire une quantité déterminée par des réserves préalables détenues par les banques auprès de la banque centrale, autrement dit, une quantité que la banque centrale peut fixer. Dans ce schéma, la monnaie est donc une quantité exogène fixée par la banque centrale. Dans ce schéma, la monnaie est une quantité exogène fixée par la banque centrale. La création monétaire s’inscrit dans ce cas dans un schéma de « monnaie exogène ». Un tel schéma apparaît toutefois peu réaliste. Le mécanisme du multiplicateur de monnaie ignore la possibilité qu’ont les banques d’emprunter la monnaie centrale dont elles ont besoin. Ainsi, les banques n’ont pas besoin de détenir au préalable un excédent de monnaie centrale pour prêter. Elles prêtent puis se refinancent. Dans ce cas, les banques créent la quantité de monnaie qu’elles souhaitent en répondant à la demande de crédit de leurs clients, et la base monétaire s’ajuste en conséquence. Après avoir crée une quantité supplémentaire de monnaie en accordant des crédits (par exemple), les banques devront se procurer une fraction de monnaie centrale pour se refinancer. La base monétaire devient une division de la quantité de monnaie mise en circulation par les banques. C’est le mécanisme du diviseur de crédit. Dans ce schéma, la monnaie est endogène car elle résulte d’une demande propre au système économique.

Dans un système de monnaie endogène, la capacité de la banque centrale à contrôler la monnaie est donc à pouvoir conduire une politique monétaire est remise en question. Pour autant, la maîtrise qu’elle conserve de la quantité et des modalités de refinancement lui préserve une influence, certes indirecte sur la création monétaire, mais déterminante pour le fonctionnement du secteur bancaire. Les périodes de crises permettent de s’en convaincre.

Jézabel Couppey-Soubeyran, Monnaie, banques, finance, collection Licence, PUF, 2ème édition, 2012
Document 7 : diviseur de crédit et rôle de la banque centrale

Le modèle du diviseur de crédit repose sur l’idée selon laquelle la banque centrale conduit sa politique monétaire en régulant a posteriori les activités d’octroi de crédits des banques de second rang. On voit que cette hypothèse est particulièrement valide dans les systèmes monétaires contemporains au sein desquels les banques centrales interviennent beaucoup plus en orientant les marchés qu’avec des mesures discrétionnaires et/ou administratives. En particulier, le modèle suppose que les banques de second rang déterminent leurs stratégies de crédit sur la base de facteurs liés à la dynamique économique. le diviseur de crédit repose ainsi sur l’hypothèse d’une monnaie endogène qui, lorsque certaines conditions sont remplies (qualité du contexte institutionnel, régulation efficace de la spéculation financière notamment) participent efficacement au financement de l’économie. (…) Une fois le crédit octroyé, les banques de second rang cherchent ensuite à se refinancer en monnaie centrale. (…) Etant donné que chaque banque de second rang dispose dans son bilan, en contrepartie de la monnaie émise, de créances sur les ANF, le modèle montre que ce sont ces créances qui valident la création monétaire dans la mesure où les banques de seconde rang pourront toujours, en cas de contrainte de liquidité forte, les mettre en pension ou les céder à la banque centrale en contrepartie de liquidités. En tout état de cause, on suppose que les crédits bancaires ne sont plus subordonnés à des réserves excédentaires en monnaie centrale. Le diviseur de crédit est égal à l’inverse du multiplicateur. Il est par construction inférieur à l’unité, ce qui atteste du fait que la monnaie centrale émise ex post n’est qu’une fraction de la monnaie créé par les banques de second rang. Plus précisément, c’est la monnaie centrale qui s’adapte au volume de monnaie créé par les banques de second rang et non l’inverse. Cette monnaie centrale n’est plus considérée comme la base monétaire et la banque centrale est placée devant le fait accompli : elle doit mettre en place des dispositifs pour répondre aux besoins de liquidités des banques de second rang, tout en garantissant la confiance dans le système et en prévenant les crises bancaires et financières. ce modèle (…) présente une incontestable portée heuristique : d’une part, il rend efficacement compte du processus de création monétaire tel qu’il est à l’œuvre dans les PDEM depuis les années 1970 et de la capacité des banques à financer l’économie ; et d’autre part, il pose la question de l’efficacité de la politique monétaire.

Source : Alain Beitone et Christophe Rodrigues Economie monétaire, A.Colin, 2017, p.110

    1. La création de monnaie a-t-elle un impact sur l’activité réelle ?


Document 8 : monnaie neutre vs monnaie active (dichotomie entre sphère monétaire et sphère réelle ?)

La seconde grande opposition théorique concerne les effets de la monnaie sur l’économie. Elle conduit à distinguer :

  • d’une part, les théories qui reposent sur l’hypothèse d’une monnaie-voile (la monnaie n’a que des effets nominaux et n’affecte en rien les grandeurs réelles de l’économie). on parle de monnaie neutre ;

  • d’autre part, les théories qui considèrent que la monnaie a des effets réels sur l’économie (c’est-à-dire que la monnaie affecte la structure des prix relatifs et modifie donc les choix de consommation, d’épargne et d’investissement des agents). On parle alors de monnaie active.

(…) Parmi les théoriciens de la monnaie endogène, les décisions relatives à la monnaie sont inséparables des décisions relatives à la production. Pour eux, la monnaie est donc forcément active. En revanche, parmi les théoriciens de la monnaie exogène, (il y a débat) on distingue trois positions :

  • la dichotomie forte. Dans cette approche il y a séparation complète entre la sphère monétaire au sein de laquelle les variables monétaires n’ont d’effet que sur le niveau général des prix et la sphère réelle au sein de laquelle les variables réelles se déterminent entre elles ;

  • la dichotomie faible, qui regroupe les auteurs pour lesquels la monnaie a des effets réels à court terme, mais pas à long terme ;

  • le refus de la dichotomie, qui regroupe les auteurs pour lesquels la monnaie est exogène, mais à des effets réels à court terme et à long terme. ces auteurs refusent la théorie quantitative de la monnaie et considèrent que la monnaie a des effets néfastes sur l’économie : elle est à l’origine des crises et plus largement de l’instabilité des économies.

Source : Alain Beitone et Christophe Rodrigues Economie monétaire, A.Colin, 2017, p.116-117


      1. La monnaie est neutre : la monnaie « voile » et la dichotomie forte


Document 9 : La monnaie est un voile

On connaît la formule de John Stuart Mill (1806-1873) selon laquelle la monnaie est « insignifiante » ou celle de Jean-Baptiste Say (1767-1832) pour qui « la monnaie n’est que la voiture de la valeur des produits ». C’est ce dernier qui utilise la métaphore du « voile monétaire », donnant ainsi une image éloquente de la conception dichotomiste : la monnaie n’a qu’un rôle superficiel.

Dans cette approche dichotomiste, que l’on peut faire remonter à Jean Bodin (1530-1596), l’économie est séparée en deux sphères : la sphère réelle et la sphère monétaire.

Dans la sphère réelle, les grandeurs se déterminent entre elles et ne sont donc pas influencées par les grandeurs monétaires : le stock de capital, le niveau de l’emploi, le volume de la production, le salaire réel, etc., appartiennent à la sphère réelle. Au sein de cette dernière, les prix relatifs jouent un rôle décisif : ils servent de fondement aux choix des individus. Par exemple, une baisse du taux de salaire réel incite les producteurs à substituer du travail au capital, ce qui élève le niveau de l’emploi.

Les prix absolus (ou prix nominaux) se déterminent quant à eux au sein de la sphère monétaire et dépendent de la quantité de monnaie en circulation. Dans la conception dichotomiste, les variations de la quantité de monnaie n’ont d’effet que sur le niveau général des prix (les prix nominaux) mais laissent inchangés les prix relatifs (donc les comportements des agents et les grandeurs réelles).

Alain Beitone, « La monnaie, neutre ou active ? » in Cahier Français n°345, Juillet-Août 2008
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