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![]() LACAN Psychoses 1955–56 Ce document de travail a pour sources principales : – Les psychoses…, sur le site E.L.P. (sténotypie au format image). – Les psychoses…, document au format « thèse universitaire » avec pour seule mention d’origine : « En souscription » Les références bibliographiques privilégient les éditions les plus récentes. Les schémas sont refaits. N.B. : – Ce qui s’inscrit entre crochets droits [ ] n’est pas de Jacques LACAN. Table des séances Leçon 1 16 Novembre 55 Leçon 2 23 Novembre 55 Leçon 3 30 Novembre 55 Leçon 4 07 Décembre 55 Leçon 5 14 Décembre 55 Leçon 6 21 Décembre 55 Leçon 7 11 Janvier 56 Leçon 8 18 Janvier 56 Leçon 9 25 Janvier 56 Leçon 10 01 Février 56 Leçon 11 08 Février 56 Leçon 12 15 Février 56 Leçon 13 14 Mars 56 Leçon 14 21 Mars 56 Leçon 15 11 Avril 56 Leçon 16 18 Avril 56 Leçon 17 25 Avril 56 Leçon 18 02 Mai 56 Leçon 19 09 Mai 56 Conférence 16 Mai 56 Leçon 20 31 Mai 56 Leçon 21 06 Juin 56 Leçon 22 13 Juin 56 Leçon 23 20 Juin 56 Leçon 24 27 Juin 56 Leçon 25 04 Juillet 56 Daniel Paul Schreber : Denkwürdigkeiten eines nervenkranken Sigmund Freud : Psychoanalytische Bemerkungen über einen autobiographisch beschriebenen Fall von Paranoia Sigmund Freud : Über den Gegensinn der Urworte Gesammelte Werke Sigmund Freud : Der Realitätsverlust bei Neurose und Psychose Gesammelte Werke Sigmund Freud : Neurose und Psychose Gesammelte Werke Sigmund Freud : Die Verneinung Gesammelte Werke 16 Novembre 1955 Table des séances Comme vous l'avez appris, cette année commence la question des psychoses. Loin qu'on puisse parler d'emblée du traitement des psychoses, et encore moins du traitement de la psychose chez FREUD, ce qui littéralement se réduit à néant, car jamais FREUD n'en a parlé, sauf de façon tout à fait allusive. Nous allons d'abord essayer de partir de la doctrine freudienne pour voir en cette matière, ce qu'il apporte, puis nous ne pourrons pas manquer, à l'intérieur même de ces commentaires, d'y introduire, dans les notions que nous avons déjà élaborées au cours des années précédentes, tous les problèmes actuels que posent pour nous les psychoses :
le bénéfice que peut apporter l'analyse, n'avait pas été complètement dégagé,
Puisque aussi bien ce point de mire… et assurément ce n'est pas un hasard, mettons que ce soit un lapsus, c'est un lapsus significatif …ce point de mire déjà nous pose une question qui est une sorte d'évidence première, comme toujours le moins remarqué est dans ce qui a été fait, dans ce qui se fait, dans ce qui est en train de se faire. Quant au traitement des psychoses, il est frappant de voir qu'il semble :
de l'abord des schizophrénies, beaucoup plus que de l'abord des paranoïas. Je vous propose en manière de point d'interrogation cette remarque dès maintenant. Nous resterons peut–être un long moment à y apporter la réponse, mais assurément elle restera sous–jacente à une bonne part de notre démarche, et ceci dès le départ. En d'autres termes la situation un peu privilégiée, un peu nodale… au sens où il s'agit d'un nœud, mais aussi d'un noyau résistant …la situation des paranoïas est quelque chose. Ce n'est certainement pas sans raison que nous en avons fait le choix pour aborder, pour commencer d'aborder, le problème des psychoses dans ses relations avec la doctrine freudienne. En effet ce qui est frappant d'un autre côté, c'est que FREUD s'est intéressé d'abord à la paranoïa… il n'ignorait pas bien entendu la schizophrénie, ni ce mouvement, lui, qui était contemporain de l'élaboration de la schizophrénie …il est très frappant et très singulier que s'il a certainement reconnu, admiré, voire encouragé les travaux autour de l'école de Zurich, et mis en relation les concepts et la théorie analytique avec ce qui s'élaborait autour de BLEULER, FREUD en soit resté assez loin. Et pour vous indiquer tout de suite un point de texte auquel vous pourrez vous reporter… nous y reviendrons d'ailleurs mais il n'est pas inutile que vous en preniez connaissance dès maintenant …je vous rappelle qu'à la fin de l'observation du cas Schreber… qui est le texte fondamental de tout ce que FREUD a apporté concernant les psychoses, texte majeur …vous y verrez de la part de FREUD la notion d'une « ligne de partage des eaux » si je puis m'exprimer ainsi, entre paranoïa d'un côté, et d'un autre tout ce qu'il aimerait, dit–il, qu'on appelât « paraphrénie »… et qui correspond très exactement au terme qu'il voudrait bien, lui FREUD, qu'on donne au champ à proprement parler des schizophrénies, ou encore ce qu'il propose qu'on appelle champ des schizophrénies dans la nosologie analytique …paraphrénie qui recouvre exactement toute la démence. Je vous indique les points de repère qui sont nécessaires à l'intelligence de ce que nous dirons dans la suite. Donc pour FREUD, le champ des psychoses se divise en deux : psychoses à proprement parler pour savoir ce que cela recouvre à peu près dans l'ensemble du domaine psychiatrique, psychose cela n'est pas démence. Les psychoses, si vous voulez… il n’y a pas de raison de se refuser le luxe d’employer ce terme …ça correspond à ce que l'on a appelé toujours, et qui continue d'être appelé légitimement, les folies. Dans le domaine de la folie FREUD fait deux parts très nettes. Il ne s'est pas tant mêlé de nosologie en matière de psychoses que cela, mais là il est très net et nous ne pouvons pas tenir cette distinction… étant donné la qualité de son auteur …pour tout à fait négligeable. Je vous fais remarquer au passage, qu'en ceci – comme il arrive – nous ne pouvons que remarquer qu'il n'est pas absolument en accord avec son temps, et que c'est là l'ambiguïté, soit parce qu'il est très en retard, soit au contraire parce qu'il est très en avance. Mais à un premier aspect il est très en retard. En d'autres termes, l'expansion qu'il donne au terme de paranoïa, il est tout à fait clair qu'on va beaucoup plus loin qu'à son époque on ne donnait à ce terme. Je donne quelques points de repère pour ceux qui ne sont peut–être pas familiers avec ces choses. Je ne veux pas vous faire ce qu'on appelle l'historique de la paranoïa depuis qu'elle a fait son apparition avec un psychiatre disciple de KANT au début du XIXème siècle. C'est tout à fait une incidence épisodique. Le maximum d'extension de la paranoïa, c'est justement le moment où la paranoïa se confond à peu près avec ce qu'on appelle « les folies », qui est le moment qui correspond à peu près à l'exemple des soixante dix pour cent des malades qui étaient dans les asiles et qui portaient l'étiquette « paranoïa ». Ça voulait dire que tout ce que nous appelons psychoses ou folies étaient paranoïas. Mais nous avons d'autres tendances en France à voir le mot paranoïa pris, à peu près identifié avec le moment où il a fait son apparition dans la nosologie française… moment extrêmement tardif : ça joue sur une cinquantaine d'années …et où il fut identifié à quelque chose de fondamentalement différent comme conception, de tout ce qu'il a représenté dans la psychiatrie allemande. En France ce que nous appelons un paranoïaque… ou tout au moins ce qu’on appelait un paranoïaque avant que la thèse d'un certain Jacques LACAN sur Les psychoses paranoïaques dans leurs rapports avec la personnalité, ait tenté de jeter un grand trouble dans les esprits, qui s'est limité à un petit cercle, au petit cercle qui convient : on ne parle plus des paranoïaques comme on en parlait auparavant …à ce moment–là c'était « la constitution paranoïaque », c'est–à–dire que c'était des méchants, des intolérants, des gens de mauvaise humeur : orgueil, méfiance, susceptibilité, surestimation de soi–même, telle était la caractéristique qui faisait pour tout un chacun le fondement de la paranoïa. À partir de quoi on était plus simple, tout s'expliquait : quand il était par trop paranoïaque, il arrivait à délirer. Voilà à peu près… je ne force en rien …où nous en étions en France, je ne dis pas à la suite des conceptions de SÉRIEUX et CAPGRAS1… parce que si vous lisez, vous verrez qu'au contraire il s'agit là d'une clinique très fine qui permet précisément de reconstituer les bases et les fondements de la psychose paranoïaque telle qu'elle est effectivement structurée …mais plutôt à la suite de la diffusion de l'ouvrage dans lequel, sous le titre La Constitution paranoïaque 2, Monsieur GENIL–PERRIN avait fait prévaloir cette notion caractérologique de l'anomalie de la personnalité constituée essentiellement dans une structure qu'on peut bien qualifier… aussi bien le livre porte la marque et le style de cette inspiration … de « structure perverse du caractère » et comme toute perversion, il arrivait qu'il sorte des limites et qu'il tombe dans cette affreuse folie qui consistait simplement dans l'exagération démesurée de tous les traits de ce fâcheux caractère. Cette conception, vous le remarquerez, peut bien s'appeler une conception psychologique, ou psychologisante, ou même psychogénétique de la chose. Toutes les références formelles à une base organique de la chose, au tempérament par exemple, ne changent en rien ce que nous pouvons appeler « genèse psychologique » : c'est précisément cela, c'est quelque chose qui s'apprécie, se définit sur un certain plan, et ensuite les relations, les liens de développement se conçoivent d'une façon parfaitement continue, dans une cohérence qui est autonome, propre, qui se suffit dans son propre champ, et c'est bien en somme de science psychologique qu'il s'agit, quelle que puisse être d'un autre côté la répudiation d'un certain point de vue que l'on trouvait sous la plume de son auteur, ça n'y changerait rien. J'ai donc essayé dans ma thèse, d'y introduire une autre vue. À ce moment–là j'étais encore assurément un jeune psychiatre, et j'y fus introduit pour beaucoup par les travaux, l'enseignement direct et, j'oserais même dire la familiarité de quelqu'un qui a joué un rôle très important dans la psychiatrie française à cette époque, et qui est Monsieur DE CLÉRAMBAULT. Monsieur DE CLÉRAMBAULT… j'évoque sa personne, son action, son influence et son nom dans une causerie introductive de notre champ pour ceux d'entre vous qui n'ont de son œuvre qu'une connaissance moyenne ou approximative, ou par ouïe dire, et je pense qu'il doit y en avoir un certain nombre …passe pour avoir été le farouche défenseur d'une conception organiciste extrême, et assurément c'était là en effet le dessein explicite de beaucoup de ses exposés théoriques. Néanmoins, je crois que c'est là que peut tenir la perspective sur l'influence qu'a pu avoir effectivement, non seulement sa personne et son enseignement, mais aussi la véritable portée de cette découverte, puisque aussi bien c'est une œuvre qui… indépendamment de ses visées théoriques …a une valeur clinique concrète d'une nature considérable : le nombre de syndromes… pour donner à ce terme le sens le plus vague …cliniques descriptifs qui ont été repérés par CLÉRAMBAULT, et d'une façon complètement originale et nouvelle, qui sont dès lors intégrés au patrimoine psychiatrique de l'expérience psychiatrique, est considérable. Et dans l'ordre des psychoses, CLÉRAMBAULT reste absolument indispensable, il a apporté des choses extrêmement précieuses qui n'avaient jamais été vues avant lui, qui n'ont même pas été reprises depuis. Je parle des psychoses toxiques, déterminées par des toxiques : éthéromanie, etc. La notion de l'automatisme mental est apparemment polarisée dans l'œuvre de CLÉRAMBAULT, dans son enseignement, par le souci de démontrer le caractère fondamentalement anidéïque comme il s'exprimait, c'est–à–dire non conforme à une suite d'idées… ça n'a pas beaucoup plus de sens dans le discours de ce maître …de la suite des phénomènes dans le développement ou l'évolution de la psychose. On peut déjà remarquer que rien que ce repérage du phénomène en fonction d'une espèce de compréhensibilité supposée :
de la façon dont je vous ai indiqué le paranoïaque avec son développement délirant, ce serait quelque chose qui irait de soi, …de sorte qu'il y a déjà une espèce de référence à la compréhensibilité, et presque pour déterminer ce qui justement se manifeste pour faire une rupture dans la chaîne, et se présentait justement comme un cas béant, comme quelque chose d'incompréhensible et quelque chose qui ne joint pas maintenant avec ce qui se passe après. C'est là une assomption dont il serait exagéré de dire qu'elle est assez naïve, puisqu'il n'y a pas de doute, il n'y en a pas de plus commune. Et tout de même pour beaucoup de gens… et je le crains, encore pour vous, tout au moins pour beaucoup d'entre vous …la notion qui a constitué le progrès majeur de la psychiatrie, depuis qu'a été introduit ce mouvement d'investigation qui s'appelle l'analyse, consisterait en la restitution du sens à l'intérieur de la chaîne des phénomènes. Ceci n'est pas faux en soi, mais ce qui est faux c'est de s'imaginer… comme il reste d'une façon ambiante dans l'esprit disons des salles de garde, de la moyenne de l’opinion commune, du « sensus commune » des psychiatres …que le sens dont il s'agit c'est ce qui se comprend, qu'en d'autres termes, ce que nous avons appris, ce qu'il y a de nouveau, c'est à comprendre les malades. C'est là un pur mirage ! Cette notion de compréhensibilité a un sens très net, et qui est un ressort tout à fait essentiel de notre recherche : quelque chose peut être compris et strictement indistingué de ce qu'on appelle par exemple « relation de compréhension », et dont JASPERS a fait le pivot de toute sa psychopathologie dite générale. C'est qu'il y a des choses qui se comprennent, qui vont de soi, par exemple quand quelqu'un est triste, c'est qu'il n'a pas ce que son cœur désire… Rien n'est plus faux ! Il y a des gens qui ont tout ce que leur cœur désire et qui sont tristes quand même, la tristesse est une passion qui est complètement d'une autre nature. Je voudrais quand même un tout petit peu insister : quand vous donnez une gifle à un enfant, eh bien ça se comprend, il pleure sans que personne réfléchisse que ce n'est pas du tout obligé qu'il pleure, et je me souviens du petit garçon qui, quand il recevait une gifle demandait « c'est une caresse ou une claque ? ». Si on lui disait « c'est une claque ! », il pleurait, ça faisait partie des conventions, de la règle du moment : s'il avait reçu une claque il fallait pleurer, et si c'était une caresse il était enchanté. Il faut dire que le mode de relations qu'il avait avec ses parents un peu vifs, donnait cette sorte de communication active du contexte, assez courant dans cette notion de relation de compréhension telle que l'explicite M. JASPERS. Vous pouvez d'ici la prochaine fois, vous reporter au chapitre très précis intitulé La notion de relation de compréhension dans M. JASPERS |
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![]() | «Entre relativisme et universalisme» p. 64-67 dans le collectif Claude Lévi-Strauss. Tristes tropiques, Paris, Ellipses, 1992 | ![]() | «Écoutons-là : c’est une belle leçon de courage et même une leçon tout court car cet accident qui l’a brisée et que, sottement, nous... |
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